Des parents manifestent«Une place en crèche pour chaque enfant!»
Des familles sans solution de garde, excédées par le système actuel, ont réclamé du changement. Une initiative cantonale pourrait être lancée.

Certains manifestants du jour ont à peine deux mois. Samedi, sur la plaine de Plainpalais, ils sont une cinquantaine de parents à avoir répondu présent à l’appel du collectif «Une crèche pour tous» pour réclamer une place subventionnée pour chaque bambin dans le canton. La poussette dans une main, une pancarte dans l’autre. Le slogan «Une place = un droit» est brandi haut et fort.
La situation a de quoi pousser à bout de nerfs les familles. À Genève, seul un enfant sur trois obtient une place en crèche, selon les données de l’Observatoire cantonal de la petite enfance (OCPE, 2021). Pour ceux qui n’en obtiennent pas, c’est la débrouille; horaires découpés des jardins d’enfants, contributions de proches, recherche d’une nounou, etc. Souvent un parcours du combattant. Avec de lourdes conséquences, tant financières et organisationnelles que professionnelles.
Stress et gouffre financier
Lucia s’est inscrite auprès du Bureau d’information petite enfance (BIPE) pour une place en crèche alors qu’elle était enceinte de 16 semaines, mais elle le sait déjà, ce ne sera pas pour la rentrée de janvier. Sans solution de garde d’ici deux mois, elle craint le pire: «Mon mari et moi avons un emploi à 100%. J’espère que je ne devrai pas arrêter de travailler!»
Parmi les familles présentes, certains ont été plus «chanceux», à l’image d’Elena et Raphaël, parents d’une petite Enora, qui se décrivent même comme des «miraculés». Ils ont tenu à venir ce samedi en signe de solidarité.
«Parmi les choses les plus stressantes vécues en devenant mère, la question de la garde est dans le top 3. Désespérée, je me suis vue être en larmes au téléphone pour supplier une place», confie la jeune mère.
Après un refus en crèche publique et l’impossibilité de débourser les 3900 francs mensuels demandés pour quatre jours par semaine en crèche privée, ils ont finalement pu avoir une place à l’espace de vie enfantine de l’Université de Genève, puisque Raphaël est employé par l’institution.
Le couple reste lucide. «Outre les crèches, c’est tout une mentalité qu’il faut changer. Dans quatre ans, on sera à nouveau bloqués avec les mercredis sans école et la fin des cours à 16 h. Le système genevois (et suisse) est pensé pour un foyer dans lequel un parent travaille et l’autre reste à la maison!» déplore le trentenaire.
«Parmi les choses les plus stressantes vécues en devenant mère, la question de la garde est dans le top 3.»
Arrêter de travailler?
«Tellement de mamans autour de moi ont arrêté de travailler», commente Laure, une habitante de Saint-Jean venue avec son fils de 6 ans et sa fille de 21 mois. Être obligés de baisser son taux d’activité ou complètement arrêter engendre une baisse de revenus mais aussi une moins bonne retraite. Une crèche de dépannage lui assure le mois de septembre, mais ensuite, plus rien. «Il y a six ans, l’État promettait une couverture totale en 2022. Aujourd’hui, ce n’est toujours pas le cas. Cela m’a même fait hésiter à faire une deuxième enfant. Pourquoi d’autres cantons y arrivent et pas Genève? Il faut anticiper!» lance-t-elle remontée.
À côté d’elle, un représentant des grands-parents, hautement mis à contribution pour pallier la pénurie. Il marche, une pancarte à la main: «Grands-parents fatigués». Un passant, visiblement aussi concerné, lui crie son soutien: «On est avec toi papi!»
«Un droit, comme l’école»
La députée PDC et candidate au Conseil d’État Delphine Bachmann est présente dans le cortège. Elle n’a jamais obtenu de place en crèche pour ses enfants âgés aujourd’hui de 4 et 5 ans. Pour la députée, il faut développer l’offre subventionnée, certes, mais aussi privée.
«On doit accompagner les initiatives privées et les entreprises qui sont nombreuses à vouloir développer des structures mais sont bloquées par le cadre légal. Il faut davantage d’agilité et une politique de bon sens», suggère-t-elle. Et pourquoi ne pas octroyer, comme dans d’autres cantons, une subvention directement aux parents? Imagine-t-elle. Leur laissant ainsi le libre choix du type de garde.
Pour les organisateurs, cette marche n’était qu’une étape. À l’issue de cette dernière, sur la Promenade de Saint-Antoine, ils ont annoncé réfléchir au lancement d’une initiative cantonale pour que l’accès à une place en crèche soit un droit, inscrit dans la loi, au même titre que l’école.
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