Lettre du jourUn monde bipolaire

Bernex, 27 mai
La chute de l’Empire soviétique laissait espérer un monde diversifié qui n’opposerait plus deux blocs. L’Europe, apaisée, pouvait enfin s’ouvrir à sa partie la plus orientale, la Russie.
Mais les Américains, par leurs provocations, en infiltrant l’Ukraine, ne l’ont pas vu ainsi et ont préféré rallumer la guerre froide pour assurer leur hégémonie mondiale. La réaction de la Russie, déjà assiégée par l’OTAN sur toute sa frontière ouest, était prévisible: la meilleure des défenses, dit-on, c’est l’attaque: l’Ukraine en fera les frais.
Ainsi les Européens, idiots utiles au service des intérêts des États-Unis, paieront la facture économique et recueilleront à leurs frais les réfugiés qui sont les premières victimes d’un jeu cynique qui les dépasse.
De leur côté, les Américains, qui sont à l’origine du conflit, sont déjà les grands bénéficiaires de cette guerre mondiale jouée à distance, sans le risque d’avoir à ramener à Washington les cercueils de leurs soldats. Ce sera au profit de la vente d’armes US et du très polluant gaz de schiste; surtout, ces tensions assurent la montée en puissance du pacte de défense atlantique sous contrôle américain, que rejoignent maintenant la Finlande, la Suède et… de facto, la Suisse.
Bien joué, l’Oncle Sam! Mais quel gâchis pour l’Europe, l’Ukraine bien sûr – simple pion sur l’échiquier géostratégique – mais aussi la Russie.
Le pire, c’est, pour un siècle peut-être, la division du monde en deux blocs, l’un qui soutient Moscou ou ne s’engage pas dans le conflit, l’autre qui isole l’Occident: des régimes autoritaires d’un côté, des démocraties de l’autre, bien-pensantes et arrogantes.
À vouloir toujours donner des leçons aux autres et imposer sa présence, y compris par les armes, on finira par se faire haïr.
Gérard Eperon
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