
Cologny, 26 juillet
Sondages et initiative à l’appui, une nouvelle atteinte au climat semble préoccuper de nombreux Suisses: les feux d’artifice en général, et ceux du 1er Août en particulier («Tribune» du 26 juillet: «Êtes-vous pour ou contre les feux d’artifice?»).
Alors que la prochaine Coupe du monde de football au Qatar se jouera dans des stades climatisés, que l’Allemagne exploite à nouveau ses mines de charbon et que l’Europe applaudit l’arrivée du gaz liquéfié au bilan CO2 catastrophique, la nocivité de nos feux d’artifice paraît bien dérisoire. Que l’opulente Commune de Cologny défende encore les feux du 1er Août, événement populaire qui rassemble classes sociales et générations, ne manque pas d’ironie. Qu’elle en soit ici remerciée. Il est en effet permis de douter qu’un brunch bio sur vaisselle recyclable provoque le même enthousiasme fédérateur, et un souvenir aussi impérissable dans la mémoire des enfants.
On pourrait rire de ce nouvel épisode d’écologie gadget. Il faut néanmoins s’en méfier. À l’aulne d’une défense de l’environnement aux critères flous, certains groupes s’arrogent le droit de légitimer ou de condamner nos pratiques sociales et culturelles. Aujourd’hui, on s’attaque à la tradition des feux du 1er Août et, demain, quid de nos sports d’hiver gourmands en neige artificielle? On peut dès lors s’étonner de l’écho favorable reçu à l’initiative d’interdire les feux d’artifice. Osons l’hypothèse que le soutien aux injonctions d’une écologie austère et punitive est d’autant plus important que l’enjeu est anecdotique.
Il préserve ainsi, à moindres frais, la bonne conscience environnementale de nombreux concitoyens. «Cachez ces feux que je ne saurais voir», mais combien de tartuffes ont pris l’avion cette année pour des vacances au soleil (rappelons ici que le trafic aérien est presque revenu à son niveau de 2019)? Combien sont-ils à faire des kilomètres en voiture chaque week-end pour du tourisme d’achat? Les admirateurs, petits et grands, de la puissance féerique des feux d’artifice pourraient bien faire les frais de ce besoin d’absolution écologique.
Nicholas Marcet
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Lettre du jour – Un besoin d’absolution écologique