
Le Grand-Saconnex, 13 mai
Le référendum lancé contre la loi sur la valeur fiscale des immeubles, objet de votation le 18 juin prochain, paraît très technique, alors que ses enjeux financiers sont de la plus haute importance, et que cette loi est révélatrice de l’incroyable arrogance des milieux immobiliers. De surcroît, il semblerait qu’elle ne respecte pas le cadre légal! On rappellera qu’avec la santé, le logement est au cœur de la crise du pouvoir d’achat à laquelle sont confrontés les Suisses («TG», 17 avril).
Or, la droite genevoise veut priver l’État de 100 millions pour «soulager les propriétaires» («TG», 12 mai), contre l’avis de leur magistrate phare, réélue brillamment fin avril, et qui, quant à elle, avait déposé sur ce sujet un projet de loi devant rapporter 90 millions à l’État, lequel aura bien besoin de moyens pour procurer davantage d’aide à tous ces Genevois qui ne peuvent plus payer leur loyer, ainsi que l’a d’ailleurs proposé le PLR dans son programme… Et que l’on ne vienne pas nous dire que l’argent est là, alors que l’on passe son temps à dénoncer l’endettement élevé du canton et que chacun sait que les dernières recettes fiscales, certes confortables, sont conjoncturelles.
Avec la quasi-non-répercussion sur les loyers (6%) de la baisse constante des taux hypothécaires pendant plus de quinze ans et d’importantes hausses de loyers au moment des changements de locataires, sans parler de la pratique des baux fictifs, les milieux immobiliers ont éhontément profité de la pénurie de logements au détriment de l’ensemble de la population. Mais ce puissant lobby jusqu’au-boutiste en veut toujours plus et ne tient aucun compte de l’intérêt général. Je me souviens qu’il avait, en pleine crise pandémique et contre l’avis du Conseil d’État (à majorité de droite), refusé de suspendre les évacuations jusqu’au 31 mai, pour en appeler – vainement – à Berne («TG», 6 mai 2020). Il faut donc accepter ce référendum, puis reprendre la loi qui avait été déposée non pas par des gauchistes obtus et attardés, mais par une conseillère d’État de droite qui, je le précise, avait indiqué qu’aucun petit propriétaire ne serait obligé de quitter son bien à cause de sa loi («TG», 5 novembre 2018).
Jacques Morard
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Lettre du jour – S’opposer à un puissant lobby