Festival de CannesL’impossibilité d’une passion durable, sur fond de lutte des classes
Avec «Simple comme Sylvain», la Québécoise Monia Chokri est en lice dans «Un Certain Regard» avec un film plein d’amour et d’humour, aux dialogues savoureux et aux situations piquantes.

Avant la projection qui avait déjà pris un sacré retard, la réalisatrice était bien décidée à livrer son message, s’associant aux cinéastes qui veulent changer les mentalités, mettre de la bienveillance sur les plateaux et condamner les abus de pouvoir. Elle faisait ainsi écho aux dénonciations du silence autour des agissements coupables de certains artistes, sous prétexte qu’ils ont du génie.
La réalisatrice, découverte actrice chez Xavier Dolan («Les amours imaginaires») était déjà venue sur la Croisette avec «La femme de mon frère», opus plutôt corrosif. Là, elle se montre plus tendre en racontant le coup de foudre entre Sophia, quadra intellectuelle, et le beau charpentier Sylvain, tombés follement amoureux.
Les différences apparaissent fatalement
Insatiables, les deux amants se livrent à des ébats torrides. Répondant à l’appétit d’ogre de Sylvain, Sophia se laisse follement aller à ses envies sexuelles entre deux cours sur Platon et Spinoza à l’université du troisième âge, et des discussions philosophico-gaucho-bobos sur les grands thèmes sociaux. Face à cet étalement de science, Sylvain ne peut régater avec son manque de connaissances, ses manières modestes et son vocabulaire fruste. Forcément, la relation entre les deux tourtereaux en pâtit.
Monia Chokri évoque ainsi l’impossibilité d’une passion durable (ce qui, en soi, n’est pas spécialement nouveau même entre personnes également cultivées…), qui se complique en se greffant sur la lutte des classes et les préjugés inévitables des uns envers les autres.
Comme le dit l’auteure en se mettant dans le même sac, c’est bien joli de se revendiquer de gauche, de manifester un esprit ouvert, de militer pour l’environnement et l’immigration, mais dans le fond est-on capable d’en parler avec quelqu’un de différent de soi?
Émouvant, joyeux, sensuel, charnel, plein d’amour et d’humour, aux dialogues savoureux et aux situations piquantes, «Simple comme Sylvain» est en plus porté par deux excellents acteurs, Magalie Lépine-Blondeau et Pierre-Yves Cardinal, très crédibles et complices de tous les instants.
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