Dies academicusRescapé du Covid, un médecin honoré
Le Dr Charles-Henry Rochat sera récompensé pour sa carrière.

Il est urologue et se dit très heureux d’avoir pu concilier, grâce à son métier, haute technologie et activité humanitaire. «C’est mon côté bipolaire nécessaire à mon équilibre», note le Dr Charles-Henry Rochat (67 ans). Une double casquette reconnue qui lui vaut aujourd’hui d’être désigné Alumnus 2020. Il sera récompensé ce vendredi par l’Université de Genève, à l’occasion du traditionnel Dies academicus.
«Je suis très honoré, commente le lauréat. Et cela d’autant plus que j’ai appris cette bonne nouvelle alors que je sortais de six semaines d’hospitalisation, dont deux intubé aux soins intensifs, à cause d’un grave Covid. Cette distinction m’a aidé à remonter la pente. J’étais très affaibli et je manquais de perspective.» Bien soutenu par son épouse, l’ancienne conseillère d’État Isabel Rochat, leurs trois enfants et leur chienne Iska, ce père de famille accompli est encore plus accro à son foyer aujourd’hui.
Un robot sécurisant
Mais revenons à notre Alumnus de l’année. Grand adepte du robot Da Vinci, créé au début des années 2000, le spécialiste a, depuis lors, la sensation d’être plus intelligent, plus adroit et plus performant: «On se découvre même ambidextre grâce à des télémanipulateurs orchestrant à distance les bras de la machine. On peut ainsi se promener dans le corps humain… là où l’œil ne peut pas se rendre!»
Le regard pétillant bleu azur, le Dr Rochat – auteur de la première prostatectomie radicale laparoscopique en Suisse en 1999 – ne tarit pas d’éloges sur ce robot, avec lequel il a effectué lui-même plus de 1500 interventions à la Clinique Générale-Beaulieu. «On a beaucoup gagné en sécurité, précise ce praticien qui utilise cet outil sur des patients atteints de cancer de la prostate et autres maladies urologiques. Une robotique basée sur de petites incisions qui provoque moins de douleurs et permet une meilleure récupération.»
Ce souhait de confort pour les malades, Charles-Henry Rochat l’a puisé auprès de son grand-père qui était docteur: «On vivait en tribu et je baignais dans l’univers de cet aîné que j’admirais.» L’habileté manuelle nécessaire à la chirurgie, ce sont peut-être ses parents, artisans coiffeurs, qui la lui ont transmise. Une chose est sûre: la médecine est pour Charles-Henry Rochat «une vocation, un mode de vie».
Sa fibre humanitaire est née, elle, il y a quarante ans. Après avoir suivi son premier cours de délégué CICR en 1981, le jeune Rochat participe à un séjour de sept mois à Peshawar, au Pakistan, dans un hôpital de guerre. S’ensuivront quantité de missions en Afghanistan, au Cambodge, en Irak, avec 1000 blessés de guerre opérés par ses bons soins.
Après sa dernière mission du Kurdistan irakien en 1991, le Dr Rochat s’est consacré aux fistules obstétricales. Chaque année depuis 1996, il se rend au Bénin et à Madagascar pour opérer des femmes porteuses de ces fistules: «Elles surviennent quand l’accouchement se passe mal, en dehors de toute assistance médicale. La tête de l’enfant reste bloquée dans le bassin de la mère, entraînant des destructions tissulaires. Les conséquences sont désastreuses: l’enfant meurt et la mère souffre d’une incontinence permanente. À cette souffrance physique se greffe un drame social. Ces jeunes femmes sont abandonnées par leur mari, stigmatisées et mises au ban de la société.»
En l’aide aux pestiférées du Bénin
Et de nous dévoiler s’être d’abord cassé les dents sur cette pathologie «dont j’ignorais tout. Quand j’ai vu l’importance du problème, j’ai décidé d’acquérir la connaissance pour aider ces pestiférées.» Avant l’arrivée du Covid-19, Charles-Henry Rochat se rendait périodiquement au Bénin pour soigner ces jeunes femmes afin de leur permettre de reprendre une vie normale: «Sans téléphone, il n’est pas aisé de programmer les interventions chirurgicales. Alors c’est le tam-tam africain! Et ça fonctionne très bien.»
Pour faire face à cette vie fort exposée qui lui a valu deux malarias, le médecin multiplie les activités physiques. Il a ainsi participé à de nombreuses courses pédestres et à quatre petites Patrouilles des Glaciers. Il se préparait à tester la grande Patrouille cette année… avant d’être terrassé par le coronavirus. «Je suis passé du sommet de ma forme au sommet de ma méforme. J’ai perdu 12 kilos en trois semaines. J’ai vu la mort de près, mais j’ai gagné la paix intérieure. Tout ce qui m’est offert à présent est un cadeau du ciel.»
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