Sorties cinémaQuels films aller voir cette semaine?
L’année commence fort avec un gros coup de coeur, le superbe et tragique «16 ans» de Philippe Lioret, qui dépasse sans peine les quelques autres sorties de la semaine.
«16 ans»

«16 ans», de Philippe Lioret. Le titre rappelle celui de la pénible nunucherie de Suzanne Lindon, «Seize printemps», sorti il y a plus d’un an. Question de génération avant tout. Car ici, nous ne sommes ni dans le rêve ni dans le fantasme, mais au contraire au cœur d‘un réel trop inhumain pour être faux.
Nora et Léo sont dans la même classe. En un regard, tout est dit. Aimantés l‘un par l’autre, ils vont s’aimer au grand dam de leurs parents. Car le frère de Nora travaille dans l’hypermarché dirigé par le père de Léo. Et se fait virer à cause d’une bouteille supposée volée.
Entre les deux familles, le ton va monter. Les différences éclatent, les dissensions virent au conflit. Jusqu’à ce que tout bascule sans qu’on s’y attende. Dans les tragédies de Racine (ou de Shakespeare), les titres des pièces désignent les victimes du récit. Il en va de même dans ce film de Philippe Lioret qui prend aux tripes parce que le destin se joue des haines et des bagarres.
C’est le hasard, ici, qui finit par tout broyer, par détruire tout sur son passage, telle une implacable mécanique qui se dresse sur le chemin du bonheur. Notre premier grand coup de cœur de l’année.
Cote: ***
«Rimini»

Un chanteur de schlager (variété allemande) face à son passé dans une ville où il peut encore chanter pour un public de retraités venus se changer les idées dans des hôtels de classe moyenne. Ambiance fin de siècle au cœur d’un hiver tout gris. Décors décrépits, personnages amers, héros désenchanté. Son nom? Richie Bravo. Parfait pour une idole déchue. Ce drame glauque et peu aimable sur le vieillissement se corse encore lorsque la fille de Richie débarque et exige de l’argent de son père.
Le film est signé Ulrich Seidl, cinéaste autrichien dont on connaît le regard acéré et la misanthropie. Moins entomologiste que dans d’autres films, il garde néanmoins ici cette cruauté froide qui est celle de l’observateur en quête de dissection. Cette férocité va de pair avec le désespoir. Seidl n’évite pas la gêne, exemple ici dans une scène de sexe pas franchement utile. Pas le genre de film à voir en cas de baisse de moral. Un éloge de la ringardise au final très moyen.
Cote: **
«Tirailleurs»

Au sein de l’empire colonial français, dès la seconde moitié du XIXe siècle, les tirailleurs sénégalais formaient un corps de militaires en soi. Ce film de Mathieu Vadepied plonge dans la Grande Guerre et adopte le point de vue d’un père (Omar Sy, également producteur) qui se fait enrôler pour rejoindre son fils (Alassane Diong), qui, lui, a été recruté de force.
Deux hommes face à la guerre, deux trajectoires, deux destins qui fusionnent, le tout dans un récit mis en scène de manière standardisée par un cinéaste qui doit sans doute batailler pour triompher d’une technique qui demeure retorse dans le cinéma de guerre, même si elle est moins compliquée qu’il y a quatre-vingts ans.
L’intérêt du film réside donc dans la reconstitution et la lecture historique qu’il faut endosser pour le visionner. Omar Sy s’éloigne ici de ces productions commerciales qui ont fait sa popularité, pour ne pas dire sa gloire. Il relit avec le spectateur une page de l’histoire française.
Mathieu Vadepied a eu l’idée du film en 1998, année du décès à l’âge de 104 ans du dernier tirailleur sénégalais, mort la veille du jour où la Légion d‘honneur devait lui être remise. Il définit son film comme le projet d’une vie. Directeur de la photo sur «Intouchables», il connaît Omar Sy depuis ce moment-là. Honorable, sans plus.
Cote: **
«Cet été-là»

Il y a Marina Foïs, Gael Garcia Bernal et la plus rare Chiara Mastroianni, qui sont au moins trois raisons d’aller voir un film. Elles sont pourtant insuffisantes ici. Sur un scénario de Delphine Gleize lui-même tiré d’un roman graphique, Eric Lartigau met en scène une chronique estivale qui s’apparente à un récit initiatique.
Il y a du mystère et même du drame qui se cache au cœur de cette intrigue où les choses ne se dévoilent que petit à petit. Pour Lartigau, la famille est le motif central de son histoire: «Parce qu’on est dans la vie, parce que ça parle à tout le monde, et parce qu’il n’y a rien de plus chiant que la famille et de plus fabuleux en même temps», déclarait-il au site Allociné.
À l’arrivée, l’objet est cependant plus ripoliné qu’anguleux. Presque lisse, si l’on excepte quelques séquences savoureuses ou surprenantes. On aurait aimé voir un métrage plus tripal, plus audacieux, moins conforme à ce que suggère son titre, qui ressemble à s’y méprendre à celui d’un téléfilm de prestige que les chaînes proposent chaque été. Tout cela dénote une forme de paresse, une volonté d’entrer dans le moule. C’est tout à fait regardable mais peu mémorable.
Cote: *
«Opération fortune: ruse de guerre»

Rien ne ressemble plus à un film de Guy Ritchie qu’un autre film de Guy Ritchie. Et au moins on sait ce qu’on va voir. C’est-à-dire pas grand-chose. Du film d’espionnage bourrage de crâne, une intrigue sans queue ni tête, et des scènes d‘action lénifiantes interchangeables d’un produit à l’autre. C’est la cinquième fois qu’il collabore avec Jason Statham et c’est toujours aussi mauvais.
Cette histoire de trafic d’armes fomenté par un milliardaire sans scrupule est aussi peu captivante que la guerre des gangs qui cimentait l’intrigue de «Revolver», il y a plus de quinze ans. De style, il n’y a point. De plaisir pas davantage. Pour l’anecdote, sa sortie a été retardée en raison de la présence scénaristique de méchants ukrainiens pour finalement atterrir sur des plateformes dans plusieurs pays, dont la France et les États-Unis.
Cote: 0
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