Poumon de la planète, l'Amazonie risque l'agonie sous Bolsonaro
Le président élu favorisera-t-il la déforestation? Les premiers indices sont alarmants.

Jair Bolsonaro est-il une menace pour l'humanité? La question peut paraître exagérée. Mais force est de constater que le président d'extrême droite élu ce dimanche au Brésil fait craindre le pire pour l'avenir de l'Amazonie, ce «poumon de la planète» qui produit 20% de l'oxygène que nous respirons. Donnera-t-il carte blanche à une déforestation massive au profit de l'agrobusiness? La possible fusion des Ministères de l'agriculture et de l'environnement semble le confirmer.
La décision serait déjà prise, si l'on en croit les propos, mardi, du député Onyx Lorenzoni, pressenti pour diriger le gouvernement dès le 1er janvier. Jair Bolsonaro a promis de réduire de moitié le nombre de ministères, passant de 29 à 15. La fusion de l'Agriculture et de l'Environnement serait donc acquise. Pas encore, affirmait mercredi soir Luiz Antonio Nabhan Garcia, le leader de l'Union démocratique ruraliste, le lobby des grands propriétaires, que l'on voit déjà à la tête du super-ministère.

Exprimant «sa surprise» et «sa préoccupation», Edson Duarte, actuel ministre de l'Environnement, a poliment appelé le président élu à éviter ce pas «imprudent». Plus alarmants, les milieux écologistes, WWF et Greenpeace en tête, ont rappelé que l'Amazonie a déjà perdu 20% de sa surface en cinquante ans et que si le recul atteint 25%, la forêt tropicale pourrait franchir un point de non-retour et commencer à se transformer en savane. Or, il s'agit actuellement de notre meilleur rempart contre le changement climatique. L'Amazonie, dont les deux tiers se trouvent au Brésil, absorbe des quantités immenses de dioxyde de carbone et régule les systèmes météorologiques. C'est aussi l'écosystème qui compte le plus d'espèces végétales et animales au monde. Or, année après année, des milliers de kilomètres carrés sont perdus au profit de l'élevage et de l'agriculture principalement.
Sacrifiée pour le business
Le Brésil, deuxième producteur mondial de bœuf, fournit près d'un steak sur cinq dans le monde. L'élevage a connu une augmentation phénoménale ces vingt dernières années. Et parmi les dix États régionaux qui ont vu la plus forte croissance, huit sont situés en Amazonie. Les cultures de soja, par exemple, se sont beaucoup étendues également, représentant désormais près de la moitié de la production agricole. Globalement, l'agrobusiness représente un cinquième de l'économie brésilienne.
Rien ne doit entraver la relance de la huitième puissance mondiale, tel est le credo de Jair Bolsonaro, qui a promis d'assouplir les règles protégeant la forêt amazonienne. Pas question de céder ne serait-ce qu'un centimètre de plus aux peuples autochtones, qui contrôlent déjà 13% du territoire. Des zones où ces communautés indigènes ont réussi à limiter la déforestation à 2%. Le président élu, lui, espère voir relancés enfin les projets de mégabarrages sur le fleuve Amazone. De même, il songe à remettre d'actualité le projet de nouvelle autoroute BR-319 entre Manaus et Porto Velho, quitte à traverser des zones sensibles. Or, on sait que 95% de la déforestation se produit dans les 5 km bordant les routes. Les deux principales autoroutes existantes illustrent bien le phénomène…
Ce n'est pas tout. Le président Bolsonaro, après avoir menacé de retirer le Brésil de l'Accord de Paris sur le climat, a déclaré qu'il s'y maintiendrait à condition que le projet Triple A, corridor écologique reliant les Andes à l'Atlantique à travers l'Amazonie, ne menace d'aucune manière la souveraineté brésilienne sur ces territoires. Pas question de se soumettre à la communauté internationale! Après tout, l'Occident industrialisé est plutôt mal placé pour faire la leçon, alors qu'il n'a réussi à préserver que 0,3% de ses forêts originelles. Le Brésil, lui, en possède encore 69%.
Mauvais calcul
Voilà un très mauvais calcul, estime Nilo D'Ávila, directeur de campagne à Greenpeace Brésil. «Réduire le combat contre la déforestation nous fera perdre en compétitivité économique et pourrait affecter notre capacité à générer de l'emploi. Les marchés internationaux réclament des garanties que notre production agricole n'est pas entachée par la destruction» de l'Amazonie. Des sanctions pourraient frapper les importations de produits brésiliens, s'est inquiétée mercredi une coalition de 180 entreprises agraires, pêcheries et organisations de la société civile.
Par ailleurs, souligne le WWF, même l'agrobusiness et le secteur de l'énergie ont besoin, pour garantir leur production, que l'Amazonie continue de purifier l'eau et l'air, et de maintenir le cycle des pluies!
Autant dire que l'arrivée au pouvoir du président Bolsonaro pourrait aggraver une situation qui était déjà alarmante bien avant son élection. Ainsi, par exemple, ce jeudi a commencé la mise au concours de près de 900 concessions pour l'exploration pétrolière et gazière. Plus d'une centaine d'entre elles sont situées en Amazonie. À cela, le président élu n'y était pour rien!
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