La France vote ce dimanche et, en préparant ces législatives, je suis allé voir l’évolution du taux d’abstention. Ce n’est pas très réjouissant. Jusqu’au milieu des années 80, les Français votaient à plus de 70% pour élire leurs députés, un chiffre impressionnant. Mais depuis, cela a baissé régulièrement pour tomber à 48,7% il y a cinq ans. On pourrait être plus bas encore cette année.
À vrai dire, nous autres Suisses sommes mal placés pour faire la leçon: cela fait plus de 40 ans, depuis 1979, que la participation aux élections fédérales est inférieure à 50%. On se rassure en se disant qu’on vote beaucoup, que l’initiative et le référendum offrent d’autres moyens de s’exprimer, mais il reste ce constat: un citoyen sur deux, en Suisse comme en France, n’élit pas son parlement. Soit parce que ça ne l’intéresse pas, soit qu’il estime que ça ne sert à rien.
«En somme, Emmanuel Macron est le souverain et il y aurait félonie à ce que le peuple ose élire un parlement non acquis à sa cause.»
D’ailleurs, à quoi sert un parlement? Sans l’avouer vraiment, il me semble que c’est le débat que la France est en train de mener avec ces législatives qui passionnent si peu de monde. Du côté du président Macron, la réponse est simple: le parlement est là pour lui permettre de mener sa politique. Il faut donc une majorité qui soutienne ses réformes, par souci de «cohérence».
Olivier Véran, l’ancien ministre de la Santé chargé désormais des Relations avec le parlement, le dit sans ambages: «Vous savez, on est un pays plutôt légitimiste, on aime l’ordre plutôt que le désordre, on préfère accorder une majorité plutôt que créer les conditions d’une crise institutionnelle», a-t-il expliqué mercredi sur France Inter.
Je trouve cela stupéfiant. Le vocabulaire d’abord. «Légitimiste», l’ignore-t-il?, désigne les royalistes fidèles à la branche aînée des Bourbons, seule légitime à leurs yeux. Mais aussi le fond. À l’en croire, si la coalition du président Macron perd la majorité absolue aux législatives, ce ne serait pas une défaite électorale mais une crise institutionnelle. En somme, Emmanuel Macron est le souverain et il y aurait félonie à ce que le peuple ose élire un parlement non acquis à sa cause.
Quel contre-pouvoir?
De même, Olivier Véran considère comme ridicule l’idée que le parlement puisse exercer un rôle de contre-pouvoir: «Attention, s’exclame-t-il, l’élection législative n’est pas la désignation d’un adjoint au président de la République!» Argument bizarre, peu compréhensible, qui semble indiquer qu’à ses yeux, un parlement qui oserait refuser des lois ou en proposer contre l’avis du président serait une absurdité.
Je reconnais que si Jean-Luc Mélenchon obtenait la majorité des sièges à l’Assemblée, il y aurait une véritable crise politique. Mais les institutions en ont vu d’autres.
En revanche, si le président perdait sa majorité et devait composer avec une partie de l’opposition, cela serait-il un drame? Pourquoi pas plutôt l’occasion de revivifier un fonctionnement institutionnel qui en a bien besoin?
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La rédaction – Peuple, donne la majorité à Macron, sinon tu es félon!
Les élections législatives françaises de ce week-end devraient connaître une abstention record. Est-ce si étonnant?