Élections genevoises 2023Petit guide pratique pour faire entendre votre voix
Entre le Grand Conseil et le Conseil d’État, chaque citoyen genevois peut choisir 107 personnes parmi 713 candidats. Comment procéder?

Le 2 avril, Genève élira son Grand Conseil. Ce sera également le premier tour pour le Conseil d’État; le second est agendé au 30 avril. Mais de quoi s’agit-il exactement?
Pour commencer, rappelons que la séparation des pouvoirs est l’un des principes fondamentaux de la Confédération. Il y en a trois: le pouvoir législatif, qui écrit les lois, le pouvoir exécutif, qui les met en œuvre, et le pouvoir judiciaire, qui veille à leur application. Garder ces instances autonomes permet d’éviter les dictatures: aucun citoyen ne peut à la fois édicter une loi, la faire appliquer et sanctionner tous ceux qui ne s’y plient pas.
Voter, ce privilège
Il faut aussi savoir que le Grand Conseil actuel n’a été élu que par 18,53% de la population du canton. Cette dernière s’élevait en 2021 à 511’921 individus, dont 416’322 majeurs. En retranchant les adultes étrangers, seuls 244’691 peuvent voter au niveau cantonal, ce qui ne correspond déjà plus qu’à 47,8% de la population.
Il y a cinq ans, lors des dernières élections, le taux de participation était de 38,77%. Pierre Maudet, élu à la majorité absolue au premier tour avec 50’180 voix, ne représentait donc que 10% de la population cantonale (501’180 individus fin 2018).
Pourtant, la Suisse est l’une des démocraties les plus participatives au monde, notamment car elle est semi-directe. Pas besoin de s’annoncer pour devenir électeur, le registre est mis à jour d’office. Les bulletins de vote sont envoyés directement à domicile accompagnés d’une brochure présentant les objets des votations de façon neutre, suffisamment à l’avance pour que chacun puisse se forger son opinion. Nul besoin d’affranchir l’enveloppe de retour, ni même de s’en procurer une nouvelle. Et si on a oublié de poster son bulletin, des bureaux de vote sont ouverts le dimanche matin, jour des résultats, dans tous les quartiers, pour que l’on puisse le glisser dans l’urne.
Le Conseil d’État

À Genève, le pouvoir exécutif s’appelle le Conseil d’État; c’est notre gouvernement. Il est composé de sept membres élus tous les cinq ans, chacun à la tête d’un département. Comme au début de chaque nouvelle magistrature, ces dicastères seront redistribués entre les élus.
L’élection du Conseil d’État se déroule en deux tours. Lors du premier, qui aura lieu le 2 avril, les Genevois auront 7 voix à répartir entre 23 candidats. Si l’un d’entre eux obtient plus de la moitié des votes, il est élu d’office. Ce cas de figure est rare et d’ordinaire, les candidats se départagent lors du second tour. Lors de celui-ci, les 7 personnes ayant récolté le plus de voix sont élues.
La dernière législature a été particulièrement mouvementée. Pierre Maudet, élu dès le premier tour avec 51% des voix, a démissionné de ses fonctions en octobre 2020. Pour le remplacer, une élection partielle a été organisée. C’est Fabienne Fischer (Verts) qui a été élue, renversant la majorité au sein du gouvernement, passé à gauche en avril 2021.
La droite compte sur cette élection pour reprendre la majorité à l’alliance rose-verte. Mais elle part divisée: la coalition historique entre Le Centre et le PLR n’a pas été reconduite. En face, le Parti socialiste et les Verts font, eux, front commun.
Cerise sur le gâteau: Pierre Maudet, après avoir été éjecté du Conseil d’État, tente un grand retour avec son parti «Libertés et justice sociale». S’il est élu, ses anciens collègues sauront-ils travailler en bonne entente avec lui? En 2020, ils lui avaient retiré son dicastère, rompant avec la sacro-sainte collégialité helvétique.
Le Grand Conseil

Le Grand Conseil est le parlement cantonal. Constitué de 100 personnes, il s’agit du pouvoir législatif: on y écrit, soumet, modifie et vote les lois qui sont ensuite appliquées au niveau cantonal. 690 personnes réparties sur 12 listes se présentent cette année. Chaque liste correspond à un parti ou une coalition.
Cette élection se fait en un seul tour. Chaque citoyen a 100 voix à disposition, qu’il peut répartir de trois façons. Premièrement, il est possible de voter pour une liste: il suffit de la détacher de la brochure et de la glisser dans son enveloppe de vote. Cela donne 100 voix à la liste choisie, même s’il n’y a pas 100 candidats inscrits dessus.
Deuxième option: le panachage. Il s’agit là aussi de sélectionner une liste, mais en la modifiant à sa convenance: en ajoutant le nom de candidats qui n’y figurent pas et/ou en barrant ceux de personnes qui nous convainquent moins. Cela octroie 100 voix au parti choisi moins le nombre de candidats ajoutés.
Troisièmement, composer sa propre liste. À la fin de la brochure, il y a une page vierge où l’on peut inscrire le nom des candidats de son choix. Si l’on n’y écrit pas 100 noms, pour éviter de perdre des voix, il faut lui donner le numéro d’une liste existante. Le parti choisi obtient ainsi les voix non attribuées nommément.
Pour siéger au Grand Conseil, un parti doit obtenir le quorum, soit 7% des voix. S’il ne l’obtient pas, tous les votes en sa faveur sont perdus. Les cent sièges du parlement sont attribués au prorata entre les partis qui obtiennent le quorum. Pour l’extrême gauche, par exemple, la tâche sera délicate. L’alliance qui leur avait permis d’atteindre 7,83% en 2018 a volé en éclats. Deux partis se font la guerre et il leur sera difficile de sauver leurs sièges.
D’ailleurs, ils ne sont pas les seuls à risquer de ne pas pouvoir atteindre ces fameux 7%. Les voix de droite risquent d’être éclatées: pas moins de 8 listes se revendiquent du camp bourgeois.
Quelques idées pour voter sans heurt
Élire 107 personnes – surtout quand on ne suit pas activement l’actualité et que la plupart des noms nous sont inconnus – peut sembler insurmontable. Mais il existe des outils simples et pratiques, comme smartvote.ch, une application gérée par l’association sans but lucratif et politiquement neutre Politools. Cette plateforme propose des listes de questions sur de grands thèmes sociétaux, classées par canton et par objet de votation.
Actuellement, il y a donc une série pour l’élection au Grand Conseil, une seconde pour celle du Conseil d’État. En comparant les réponses de l’utilisateur avec celles des candidats en lice, smartvote établit des classements personnalisés, liste les personnes qui se présentent par ordre d’affinités politiques avec son utilisateur.
Cependant, même en choisissant la version «rapide» du questionnaire, il faut se positionner sur une trentaine de sujets très divers. Les questions sont posées de façon simple, mais pour se lancer, le faire en même temps que des amis par exemple, a ses avantages. À plusieurs, il est possible d’échanger sur les sujets, de poser ses questions et de s’assurer de bien comprendre les tenants et aboutissants des objets – voire d’en débattre et de faire avancer ses idées. Le faire accompagné d’une personne politisée et pédagogue simplifie aussi la tâche.
Et pour finir, afin de vérifier que vous avez bien tout compris, participez à notre quiz:
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.