La colère a fini par s’estomper. Les larmes ont séché. Mais le monde n’a plus jamais été le même. Il y a dix ans, Claude Dubois, violeur et assassin de Pascale, avait retrouvé la liberté lorsqu’il a choisi sa nouvelle proie. Marie, 19 ans, découvrait la vie d’adulte, l’insouciance, l’indépendance. Dubois lui a tout volé.
Si, aujourd’hui, «24 heures» a décidé de reparler de ce drame, ce n’est pas pour plonger dans le sordide. Mais parce que cette affaire a créé une des crises institutionnelles les plus importantes de l’histoire de ce canton. Parce que, depuis, pas un seul juge vaudois n’a oublié le poids de ses décisions lorsqu’il a face à lui un criminel. Parce que, depuis, les autorités pénitentiaires ont vécu dans la crainte d’un nouveau Dubois, elles qui se doivent pourtant de réinsérer.
C’est surtout que cette affaire, comme rarement, a réveillé chez vous, chez moi, et chez nombre de Suisses, son lot de pulsions. Cette histoire nous a plongés dans les plus sombres travers de l’humain, que ce soit ceux d’un «monstre», Dubois, ou dans les nôtres. Peur, quasi panique, après l’enlèvement de Marie. Tristesse et colère à l’annonce de sa mort.
«Depuis, pas un seul juge vaudois n’a oublié le poids de ses décisions lorsqu’il a face à lui un criminel»
La rue a hurlé. Dubois était biffé du royaume des hommes. Juste un monstre à abattre. La haine avait gagné une bataille. En parallèle, et durant des mois, les politiciens se sont écharpés, jusqu’à oublier toute décence. Tout cela dans le but de trouver un autre coupable.
Quasi obsédante par son injustice, cette affaire nous a donc, comme jamais, rassemblés. Tout en nous divisant sur les fautifs. Écartelant même le monde en deux clans sur le sort à réserver au seul véritable coupable. La question de l’internement à vie n’a pas fini de faire couler de l’encre! Soyons clairs, la rédaction de «24 heures» n’a pas été épargnée. Alors qu’une centaine d’articles ont été écrits à ce sujet, entre nous les mots ont parfois été féroces. Quelques portes ont claqué…
Trois ans après le crime, le procès a joué son rôle. Premier pansement. Derrière les portes du tribunal, dans ce huis clos qui décortique l’horreur dans le moindre détail, au point parfois d’en avoir la nausée malgré l’habitude, l’audience a exorcisé. Dans ce théâtre où tous les acteurs sont représentés, où étrangement l’assassin n’est qu’à quelques mètres d’une famille détruite, le tourbillon de sentiments a réservé son lot de surprises. Alors oui, au procès de Claude Dubois, on a parfois souri, on a même ri. Rappelant à nos pulsions que nous sommes tous humains.
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Éditorial – Marie, dix ans après… – Personne n’est sorti indemne