«Pékin a peur que nos voix soient entendues»
Figure emblématique de la contestation à Hongkong, Denise Ho a parlé à l'ONU.

Scène piquante, ce lundi après-midi au Palais des Nations. En pleine session du Conseil des droits de l'homme, la Chine a eu recours à une procédure assez rare pour interrompre par deux fois le discours de la chanteuse contestataire hongkongaise Denise Ho. Censurée par Pékin depuis qu'elle s'est investie dans la «révolte des parapluies» (mouvement prodémocratie en 2014), la pop star est venue à Genève pour appeler la communauté internationale à mettre la pression sur le régime communiste: «Tandis que les manifestations se poursuivent, les Nations Unies convoqueront-elles une session d'urgence pour protéger le peuple de Hongkong? Étant donné les abus de la Chine, sera-t-elle suspendue de ce Conseil des droits de l'homme?»
Dai Demao, le premier secrétaire de la mission chinoise auprès de l'ONU, a d'abord réclamé un «point d'ordre» pour reprocher à Denise Ho de mentionner «Hongkong aux côtés de la Chine», un «affront [au principe] d'une seule Chine et aux principes de la Charte des Nations Unies». Puis il a interrompu la chanteuse une seconde fois pour dénoncer ses «allégations non fondées» sur le principe «Un pays, deux systèmes». Voilà qui fait ricaner la pop star. Voyez plutôt.
Pourquoi la Chine vous interrompt-elle plutôt que de vous ignorer tout simplement?
Il faudrait bien sûr poser la question au représentant de la Chine. En plus, les prétextes utilisés pour me couper la parole étaient ridicules. Une chose est sûre: Pékin a peur à chaque fois que des voix s'élèvent et qu'elles sont entendues. Après mon intervention, la déclaration chinoise a montré à quel point le gouvernement tient à ce qu'il soit dit que les droits de l'homme sont respectés, de même que le principe «Un pays, deux systèmes» (ndlr: adopté pour cinquante ans lors de la reddition en 1997 de Hongkong par le Royaume-Uni).
Pourtant, tout le monde sait que ce n'est pas le cas, non?
Beaucoup de ces diplomates assis au Conseil des droits de l'homme ont peur de critiquer la Chine, un pays puissant. Pékin leur rappelle que la critique n'est pas permise.
Vous qui manifestez à Hongkong, vous étiez samedi à la Geneva Pride, la Marche des fiertés. Quel contraste! Comment l'avez-vous vécu?
C'est par hasard que je suis arrivée samedi à Genève. Vous avez raison, c'était surréaliste d'être là pendant que d'autres manifestent à Hongkong. Mais je ne me suis pas sentie coupable de faire la fête, parce qu'une des particularités du mouvement de contestation actuel, c'est que chacun doit pouvoir s'autoriser des moments de fun, pour mieux tenir le coup dans la durée. Je m'explique: plutôt que d'essayer de tout paralyser comme en 2014 lors de la révolte des parapluies, il s'agit cette fois-ci de multiplier les manifestations durant des mois. La frustration contenue depuis cinq ans a explosé, laissant éclater la colère. Et il va être plus difficile d'y mettre fin, car le mouvement ne connaît pas de leader.
Le principe «Un pays, deux systèmes», vous appelez la Chine à la respecter. Mais ce statut spécial expire en 2047!
Il peut se passer tant de choses en vingt-huit ans… L'attitude de la communauté internationale peut changer. J'ai bon espoir. À travers l'histoire, on voit bien que même les pires tyrannies ne durent pas éternellement, surtout celles qui bafouent les droits de la population.
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