Mais que fait-on des «fake news»?
Qu'est-ce qu'une «fake news»? Par quels moyens combattre sa toxicité? Ces deux questions ont déjà été évoquées dans cette chronique. En restent d'autres. Par exemple, comment les «fake news» sont-elles accueillies et utilisées dans le public? Deux études intéressantes sont parues sur le sujet au cours des derniers mois.
La publication la plus récente concerne une enquête menée par une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT) de 2006 à 2017. Elle est parue au début de mars dans la revue «Science». Elle porte sur quelque 126 000 histoires relayées sur Twitter plus de 4,5 millions de fois et par 3 millions de personnes.
Deux conclusions saillantes: les «fake news» ont 70% de chances supplémentaires d'être «retwittées» en cascade que les informations avérées; la nouvelle vraie met six fois plus de temps qu'une «fake news» à atteindre un public de 1500 personnes.
La «fake news» se diffuse donc davantage, plus vite et à plus de personnes qu'une information vraie et consolidée. Explication: la «fake news» offre le plus souvent un contenu plus original, inspire des émotions différentes et plus marquées, comme la surprise, la peur ou le dégoût.
Au contraire, peut-on ajouter, une nouvelle vraie s'inscrit ordinairement dans une chaîne d'informations, dans un contexte déjà connu. Elle «fait suite», elle n'est qu'une nouvelle ajoutée.
Une question subsiste. Dans l'esprit du public, la distinction entre nouvelle fausse et nouvelle vraie est-elle aussi claire que pour les chercheurs du MIT? La seconde enquête introduit le doute. Elle a été réalisée en 2017 par le Reuters Institute pour l'étude du journalisme, rattaché à l'Université d'Oxford. Elle porte sur huit groupes constitués dans quatre pays (États-Unis, Royaume-Uni, Espagne, Finlande). Ses conclusions sont plutôt nuancées.
Les gens ont tendance à distinguer les «fake news» des nouvelles avérées par une différence de degré plutôt que par une différence de nature. Ils donnent ainsi aux «fake news» des contours assez flous. Ils considèrent comme telles les productions d'un journalisme «bas de gamme», superficiel, imprécis ou inexact, porté au sensationnalisme. Ils y rattachent ce qu'ils tiennent pour de la propagande, incluant les mensonges des politiciens, les contenus partisans très affirmés, certaines publicités ou contenus sponsorisés.
En revanche, les gens ne manquent pas d'établir une différence entre les «fake news» et la satire fondée sur des canulars, de fausses nouvelles identifiables par le contenu ou le contexte, visant à divertir et non à tromper.
Les personnes participant à l'étude du Reuters Institute sont pour la plupart capables de repérer des sources fiables sur le Net. Elles ne s'accordent cependant pas sur les sources en question. Très peu de sources passent pour fiables aux yeux de tous.
Principale leçon de cette étude britannique, la «fake news» s'inscrit dans un contexte de scepticisme généralisé visant en première ligne les acteurs politiques, les acteurs médiatiques et, de plus en plus, les détenteurs d'un savoir.
Une remarque du sociologue français Romain Badouard («Le Monde» du 10 mars) permet de renchérir: les gens qui partagent les «fake news» «n'y croient pas forcément dur comme fer; en revanche, ils adhèrent à la vision du monde qu'elles colportent».
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On établira une différence entre les «fake news» et la satire fondée sur des canulars visant à divertir et non à tromper
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