S'engouffrant discrètement dans un grand hôtel de retour de Palexpo, la jeune femme représente le visage de l'eldorado chinois pour bon nombre de patrons horlogers qu'elle a rencontrés au SIHH, qui se tient jusqu'à vendredi à Genève. Rencontre avec Wan (Belinda) Chen, la responsable du département montres de JD.com, le géant du commerce en ligne chinois qui a vendu 10 millions de montres – toutes origines confondues – sur les six premiers mois de 2017. Pas loin du total de pièces produites en Suisse sur la même période.

Arrêt sur image dans cette course que représente cette visite au salon horloger de Genève, Madame Chen. Quels en sont les moments forts?

Par le passé, nous venions pour mieux comprendre les impératifs des marques horlogères. Aujourd'hui, nous venons pour les attirer en Chine et nous avons signé des partenariats en ce sens avec Eberhard & Co et H. Moser & Cie, qui vont installer leur boutique en ligne sur notre plate-forme. Nous avions déjà signé des accords avec Zenith et Chopard et venons de commencer à offrir les montres Mido à nos clients. Pour Moser, cet accord coïncide avec leurs premiers pas en Chine et l'ouverture d'une boutique.

Tout est censé repartir pour l'horlogerie suisse en Chine. Et sur vos sites Internet?

Sur la seule période courant d'octobre à décembre, nos ventes de montres suisses ont été supérieures de 300% à celles de l'an dernier. Ceci s'explique par la montée en puissance d'une classe moyenne plus soucieuse de qualité et par l'arrivée de nouvelles marques dans notre offre.

Un exemple de ces ventes flash dont vous avez le secret?

Le 11 novembre dernier, lors de la Fête des célibataires, TAG Heuer a vendu davantage en une heure que durant tout le long de cette journée très spéciale, il y a un an. Peu après, la même marque a lancé une édition exclusive Pincement de sa montre connectée à 23 000 yuans (ndlr: 3400 francs), partie en un jour. Le modèle classique a, lui, été en rupture de stock en dix jours.

Les manufactures ont longtemps été réticentes à l'idée de voir leurs modèles figurer sur votre site à côté d'un autocuiseur…

Cette remarque revient régulièrement et c'est bien normal, l'image de marque étant ce que ces maisons cultivent le plus. C'est pour cela que nous nous engageons à collaborer avec elles, par exemple sur des campagnes de vente ciblées. Prenez Chopard, dont le prix moyen d'une montre tourne autour de 85 000 yuans (ndlr: 13 000 francs). Elle ne sera présentée qu'à des clients ciblés et leur livraison par groom comme leur emballage seront uniques. Il faut en outre garder en tête que cette présence sur JD.com ne fait souvent que compléter un réseau de boutiques, tout en permettant de conquérir l'intérieur du pays.

Quid des modèles «vintage» d'occasion, qui marchent fort sur Internet en Europe?

Nous avons lancé un site de montres d'occasion en octobre, mais le marché n'en est qu'à ses balbutiements. Les acheteurs chinois restent surtout attirés par les modèles cultes et les dernières collections.

Vendre ses montres sur vos sites n'est pas gratuit…

Cela fait partie de la négociation lors des relations de long terme avec un client. En général, nous gardons 5% de la vente pour tout ce qui passe par la plate-forme, certaines dépenses de marketing et la livraison restant à la charge des marques. Notre spécificité reste le contrôle de notre propre logistique, au point que de plus en plus de marques l'utilisent pour les ventes conclues sur leur propre site Web. Pour notre activité de grossiste, les marges sont évidemment plus faibles. Ce n'est pas très cher au regard des coûts fixes que représentent un réseau de boutiques et ses employés…

Prenons le temps de souffler encore un instant. Quels ont été vos coups de cœur au salon horloger?

Je dois dire que j'ai encore une pensée pour les dernières Royal Oak d'Audemars Piguet ainsi que pour les magnifiques Cartier; des marques que nous souhaitons faire découvrir à nos clients.