LoisirsL’orgue du collège Claparède refait son cinéma
L’instrument qui accompagne des films muets à l’occasion du festival «L’orgue fait son cinéma» est vieillissant mais toujours vaillant. Il sera bientôt restauré.

L’aula du collège Claparède accueille, pour la neuvième fois, un festival un peu particulier intitulé «L’orgue fait son cinéma». Comme son nom l’indique, il allie art visuel et musical, et cela d’une manière très originale. On le sait, il fut un temps où le cinéma était muet, la plupart des films se faisaient alors accompagner par un piano, ou mieux, par un orgue de cinéma. Aujourd’hui, le septième art est généralement parlant, mais pour les nostalgiques, les mélomanes et autres cinéphiles, un retour dans le passé est envisageable au 61 chemin Fossard, jusqu’à samedi prochain.
L’orgue du Collège Claparède y fera chauffer ses tuyaux et ses soufflets à l’occasion de ce désormais traditionnel festival. On pourra y découvrir des (courts) métrages en noir et blanc lors des quatre dernières soirées. La partie visuelle sera présentée par un ancien professeur du collège et spécialiste d’histoire du cinéma, Serge Lachat. Et le volet musical par de nombreux organistes, dont les Genevois, Vincent Thévenaz et Nicolas Hafner.
Un instrument particulier
Au centre de toutes ces festivités se trouve un des trésors patrimoniaux du canton: un orgue de cinéma datant de 1937, plus précisément, un des six derniers Wurlitzer, encore conservés en Europe (voir Tribune du 22 mars 2019). L’instrument est notamment capable de reproduire le son du galop d’un cheval, d’un klaxon de voiture, le bruit que fait la vaisselle quand elle se brise et il peut imiter le timbre de nombreux instruments d’orchestre. L’orgue accompagnait les films et divertissait le public durant les entractes jusque dans les années soixante à Londres. Acquis dans les années 80 par l’État de Genève, il a été installé au Collège Claparède en 1982. Mais il se fait vieux… À cet égard, l’association des amis de l’orgue de cinéma du collège Claparède (AAOCCC) a été créée en 2012 avec pour but de mettre en valeur et de rénover cet instrument exceptionnel. Pour son actuel président, Vincent Thévenaz, organiste titulaire de la cathédrale Saint-Pierre, et enseignant à la Haute École de musique de Genève, «L’orgue ne se porte pas si mal, car il est régulièrement révisé par des facteurs d’orgue. Mais de nombreuses pièces sont en cuir original, soit de 1937 et elles sont en mauvais état. Il devait être rénové en 2020, mais ça n’a pas été le cas. En décembre 2022, nous avons reçu finalement le feu vert de l’administration, un vrai cadeau de noël pour l’association.» L’opération n’est pas une mince affaire, puisqu’il faudra entièrement le démonter et l’expédier en Grande-Bretagne. Plusieurs tonnes de matériel tout de même. Mais le jeu en vaut la chandelle, «Jouer de cet orgue relève de l’ordre de l’euphorie. Il n’est pas très grand mais il y a un maximum de possibilités. C’est extrêmement stimulant pour un musicien. La manière de fonctionner, la sonorité, sont très différentes d’un orgue classique. C’est un peu comme si on avait un Big Band sous les doigts.» précise l’organiste et président de l’AOCCC.
Demandez le programme
Le jeudi 23 mars, Serge Bromberg directeur du label Lobster à Paris devait venir donner une conférence sur la restauration de films, mais il ne pourra pas venir. «Et l’organiste qui devait remplacer la soirée s’est cassé un doigt. Mais on a trouvé son remplaçant en la personne de Nicolas Hafner» dit Vincent Thévenaz. «À la place il y aura un ciné-concert avec la projection du très divertissant «The cameraman», réalisé par Edward Sedgwick et Buster Keaton, en 1928, 75 minutes où surviennent toutes les catastrophes possibles et imaginables.», précise Serge Lachat.
«Jouer de cet orgue relève de l’ordre de l’euphorie.»
Vendredi 24 mars, Charles Balayer, organiste français, qui a une double culture jazz et classique, jouera le Hammond pour une soirée musicale intitulée «Wurlitzer rencontre Hammond. «Pour lui, ce concert est un rêve de gosse, car des pianos de cinéma, il n’y en a quasi-pas en France», dit Vincent Thévenaz.
L’après-midi du samedi 25 sera consacrée aux enfants, avec projection des images de l’histoire de Babar le petit éléphant de Jean Brunhoff avec lecture du texte par Vincent Thévenaz sur la musique de Francis Poulenc. La transcription pour orgue a été réalisée par Guy-Baptiste Jaccottet, un organiste de 25 ans au palmarès spectaculaire qui accompagnera la lecture et la projection. Le soir sera projeté «La princesse aux huîtres» d’Ernst Lubitsch (1919), un film très drôle qui sera accompagné à l’orgue par Paul Gousset «qui est un catalogue ambulant, cela promet une soirée incroyable! D’ailleurs, il vient d’être nommé à la Haute École de Musique, on sera donc collègues», se réjouit Vincent Thévenaz.
Plus d’infos sur www.orguedecinema.ch
Aula du collège Claparède, 61, chemin de Fossard, 1231 Conches, Parking gratuit à disposition. Bus 5, 25, 34, arrêt «Collège Claparède», jeudi 23 , vendredi 24 et samedi 25 mars.
«On a découvert avec beaucoup de regrets que les élèves du collège n’étaient pas tellement intéressés par cet orgue, dit Serge Lachat, mais pour le festival, le public est là.» «Ce festival est vraiment un moment particulier, conclut Vincent Thévenaz, cet orgue Wurlitzer du Collège Claparède est mal connu sur place, mais c’est une autre histoire à l’international. C’est un orgue mythique.»
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.