Les portables servent de guide aux Rois
L'association Utopiana propose un parcours sur le thème des abeilles.

L'installation a l'élégance discrète de ne pas faire d'ombre aux majestueux hôtes du parc. C'est au pied des vieux arbres du cimetière des Rois que les dix panneaux du projet «L'autre côté» se sont gracilement dressés, profitant de la paix de leurs ramures. Sur chacune de ces petites plaquettes noires et trapézoïdales figure un dessin délicat où s'entremêlent des motifs végétaux et des abeilles. Car c'est autour du vénérable insecte mellifère que s'élabore cette expérience sonore conçue par l'artiste finlandaise Ulla Taipale et dédiée au naturaliste François Huber. Né à Genève en 1750, ce visionnaire, devenu aveugle à 15 ans, jeta les bases de l'apiculture moderne.
«Depuis Aristote, beaucoup de penseurs se sont intéressés aux abeilles, explique Ulla Taipale. Pas pour le miel qu'elles produisent, mais parce qu'en les observant, ils ont été fascinés par leur complexité.»
Pour développer son projet, celle qui est aussi chercheuse et curatrice s'est inspirée du «Sang des fleurs», un roman dystopique écrit par sa compatriote Johanna Sinisalo, qui relie une tragédie familiale à l'extinction des abeilles. «Aujourd'hui, on parle beaucoup de la disparition de ces insectes, mais essentiellement du point de vue de ce qu'ils nous apportent, soit le miel et la pollinisation. Je souhaitais renverser ces valeurs et me pencher sur leurs vertus immatérielles.»
De nombreuses civilisations dotent ces petits animaux volants de la capacité de voyager entre les mondes de la vie et de la mort: «Pouvoir installer «L'autre côté» dans un cimetière, qui plus est jardin magnifique, était particulièrement propice», se réjouit Anna Barseghian, directrice de l'association Utopiana, à l'origine de cette proposition originale.
Cette aventure contemplative et auditive à travers les siècles nécessite un outil résolument contemporain: un téléphone portable, sur lequel il faut télécharger «Arilyn», une application de réalité augmentée gratuite. Avant de se lancer sur le parcours, mieux vaut également jeter un œil à la carte disposée à l'entrée du parc, afin de repérer où se situent les étapes. Il s'agit, ensuite, de se promener d'un panneau à l'autre, en scannant les illustrations. Chacune d'entre elles ouvre un document sonore, soit un fragment de texte lu, en français, par la comédienne Barbara Baker – la visite est aussi possible en anglais, en espagnol ou en catalan.
Au cours de ce voyage en pays de littérature, on croise évidemment Johanna Sinisalo, mais aussi Virgile, Maurice Maeterlinck ou encore Jorge Luis Borges, lequel repose non loin. À l'exception de ce dernier, tous les auteurs évoquent les abeilles, leur exceptionnelle intelligence collective et leur dimension presque magique. «Je souhaitais offrir au public une autre vision des abeilles, leur rendre hommage et lever les peurs à leur égard, affirme Ulla Taipale. Sans compter que leur déclin est absolument dramatique: sans elles, l'humanité perdra son équilibre sur Terre.»
«L'autre côté» vit à Genève sa troisième édition. L'œuvre a été présentée à Helsinki en 2016, puis au cimetière de Poblenou, à Barcelone, deux ans plus tard, sur commande de la Fondation Joan Miró. Soutenu notamment par la Ville et le Canton, le projet sert d'ouverture à l'événement «1000 écologies», organisé par Utopiana du 9 septembre au 10 octobre au Commun.
«L'autre côté» Jusqu'au 10 octobre au cimetière des Rois. Tous les jours de 7 h 30 à 19 h. Infos sur www.utopiana.art
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