Allocution d'Emmanuel Macron (direct) «Nous devons apprendre à gouverner et légiférer différemment»
Le président français s'est exprimé mercredi soir après le revers des législatives.
Emmanuel Macron a convié mardi et mercredi à l’Élysée les forces politiques ayant vocation à constituer un groupe à l’Assemblée à la suite des élections législatives, a annoncé lundi la présidence.
«Garant des institutions, le président de la République est déterminé à agir dans l’intérêt des Françaises et des Français, dépositaire du mandat que ces derniers lui ont accordé», a expliqué l’entourage du chef de l’État.

«Dès lors qu’il n’y a pas de majorité alternative, la question de la manière de mener les transformations nécessaires pour le pays est posée. C’est le sens de cette rencontre avec les forces politiques: dialoguer et échanger pour l’intérêt supérieur de la Nation et bâtir des solutions au service des Français», a ajouté cette source.
Les représentants des forces politiques ayant vocation à former la dizaine de groupes prévus seront reçus successivement.
Le président des Républicains Christian Jacob a accepté cette invitation, a indiqué son parti à l’AFP.
Deux mois après la présidentielle, les macronistes n’ont pas réussi à conserver la majorité absolue à l’Assemblée, fixée à 289 sièges sur 577, en obtenant 245 députés. Ils devancent la Nupes, qui aura au moins 150 représentants dans l’hémicycle, selon un décompte actualisé de l’AFP, devant le Rassemblement national, qui réalise une percée historique (89 sièges), puis les Républicains, avec un taux d’abstention de 53,79%.
L’Assemblée nationale française n’est pas fatalement réduite à l’impuissance. À condition que le camp présidentiel parvienne à des accords avec les élus. Les différents scénarios.

L’entrée spectaculaire du Rassemblement national (RN) à l’Assemblée nationale va lui permettre de constituer un important groupe parlementaire. Et ensuite? Lire notre article.

Le Parti socialiste, EELV et le PCF ont déclaré lundi à l’AFP refuser la proposition de Jean-Luc Mélenchon de former un groupe Nupes unique à l’Assemblée nationale, estimant que l’accord de coalition signé début mai prévoyait des groupes distincts.
«Il n’a jamais été question d’un groupe unique. Il y aura un groupe socialiste à l’Assemblée nationale», a déclaré Pierre Jouvet, porte-parole du PS, qui a négocié l’accord avec LFI. «Le contrat de coalition était très clair, il prévoyait que chaque parti ait son groupe et qu’ensuite il y ait un intergroupe», a-t-il rappelé.

«Pas question de se fondre dans un groupe unique», a pour sa part réagi le porte-parole d’EELV Alain Coulombel. «On a un contrat avec la Nupes et je pense que c’est pareil pour PCF et PS: il était convenu que chacun ait son propre groupe. Cette proposition est inappropriée par rapport à l’engagement mutuel. On est mis devant le fait accompli», a-t-il dénoncé.
«Avoir un groupe propre est un des éléments de l’accord, nous avons toujours été clairs à ce sujet», a précisé à l’AFP Igor Zamichiei, numéro 2 du PCF, parti d’accord en revanche avec le principe d’un intergroupe.
Jean-Luc Mélenchon a proposé lundi que la Nouvelle union populaire écologique et sociale se constitue «comme un seul groupe» à l’Assemblée nationale, inquiet que l’obtention de 89 députés par le RN remette en cause son «statut» de première opposition à Emmanuel Macron.
«Dès lors qu’il y a un seul groupe, sans aucune discussion possible, l’opposition s’appellerait Nupes», a-t-il expliqué devant le siège de La France insoumise à Paris, affirmant qu’il s’agissait d’une «proposition, pas d’une injonction : «Naturellement, je m’en remettrai à ce que décideront les groupes».
Valérie Rabault, cheffe de file des socialistes à l’Assemblée nationale lors de la précédente législature, s’est également opposée à la proposition, tout comme à la proposition d’Eric Coquerel (LFI) d’une motion de censure début juillet contre le gouvernement d’Elisabeth Borne.
D’après l’élue du Tarn-et-Garonne interrogée par l’AFP, la «seule solution» pour les macronistes privés de majorité absolue est de «négocier texte par texte, ce qui est très bien».
Sur la présidence de la commission des Finances, qui revient de droit à l’opposition et pour laquelle le chef du PS Olivier Faure reconnaît à LFI une «primauté», Valérie Rabault, qui a été rapporteure générale du budget dans le passé, ne «s’interdit rien» quant à une éventuelle candidature à cette fonction.
Mardi après-midi doivent se réunir les députés socialistes, au nombre de 34 à 35 selon elle. «Je souhaite réunir les élus dans l’accord Nupes et les élus hors accord Nupes. La réunion vise à voir si un centre de gravité est possible», en fonction de quoi elle pourrait se représenter pour le diriger, a-t-elle précisé.
Un vote interne est prévu jeudi.
Négocier au cas par cas avec l’opposition, chercher un accord de législature avec la droite ou dissoudre l’Assemblée nationale: voici les scénarios possibles pour le président français Emmanuel Macron, privé de majorité absolue aux élections législatives de dimanche.
Un accord de législature
Avec ses 245 députés sur un total de 577, la coalition Ensemble! pourrait négocier un accord de législature avec l’opposition, principalement le parti de droite Les Républicains (LR) qui dispose de 61 députés, ce qui pourrait lui permettre de dépasser la barre des 289 sièges, seuil de la majorité absolue, pour approuver les textes de loi.

Le vote a été marqué par la percée sans précédent du Rassemblement National (RN, extrême droite) de Marine Le Pen, son adversaire du second tour de la présidentielle, avec 89 députés, et le regain de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes, coalition de gauche) emmenée par le tribun de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, qui a fait élire 131 députés.
«Ce serait une solution à l’allemande», affirme sur la radio RMC la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina, qui souligne que cette solution consisterait à «donner des gages de gouvernance à l’autre parti».
Des membres de LR pourraient, par exemple, rejoindre le gouvernement. Christian Jacob, président des Républicains, a toutefois assuré dès dimanche que son parti resterait «dans l’opposition». «Pour l’instant, ils ferment la porte, mais cela peut évoluer», explique à l’AFP le politologue Pascal Perrineau.

Cette solution consiste à gouverner sans une majorité stable et la chercher pour chaque projet de loi. «Sur la réforme des retraites, Emmanuel Macron pourrait, par exemple, s’appuyer sur LR qui y est favorable», affirme à l’AFP Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à l’université Panthéon-Sorbonne.
«Pour la transition écologique, il pourrait s’appuyer sur les divers gauche et casser la Nupes» en cherchant les voix des écologistes qui font partie de cette alliance de gauche, souligne le constitutionnaliste.
«Le cas par cas, c’est possible mais pas facile», nuance Pascal Perrineau, pour qui le mouvement du président centriste libéral Emmanuel Macron, qui a gouverné avec une majorité absolue pendant les cinq années écoulées, «n’a pas forcément le compromis dans les gènes».
Cette situation n’est pas inédite: l’ancien premier ministre Michel Rocard avait déjà gouverné avec une majorité socialiste relative de 1988 à 1991, mais il avait alors plus de sièges (275).
Avec une majorité relative, le gouvernement peut aussi avoir recours à l’article 49:3 de la constitution pour contourner le parlement. Cet article permet de faire passer un texte sans vote, mais son utilisation est désormais limitée au budget, la sécurité sociale, ainsi qu’un texte de loi par session parlementaire.
«C’est une arme à double tranchant», prévient Dominique Rousseau, rappelant que les députés ont la possibilité de déposer une motion de censure après son utilisation. Si la Nupes, le RN et LR «la votent ensemble, ils feraient tomber le gouvernement».
La dissolution
Autre arme à double tranchant. Selon Dominique Rousseau, Emmanuel Macron peut l’utiliser à tout moment. «C’est un pouvoir discrétionnaire: mais une fois qu’il dissout, il ne peut pas dissoudre une nouvelle fois pendant un an», prévient le constitutionnaliste.
«Constitutionnellement, il pourrait donc dissoudre dans les jours qui viennent, mais politiquement, ce serait très dangereux», prévient-il.
«Ce serait même un suicide politique compte tenu de l’antimacronisme qu’il y a dans le pays», renchérit Pascal Perrineau qui prédit dans ce cas le même effet contreproductif qu’en 1997, quand l’ancien président de droite Jacques Chirac avait dissout l’Assemblée et s’était retrouvé en cohabitation avec la gauche.
«Politiquement, Emmanuel Macron a tout intérêt à attendre afin d’avoir une justification objective de la dissolution», comme un blocage à l’Assemblée, précise Dominique Rousseau.
Le référendum
C’est une autre solution pour contourner le parlement. «L’article 11 de la Constitution permet d’organiser des référendums sur toutes les questions relatives à la politique économique, sociale et environnementale du pays», souligne Dominique Rousseau.
«On peut très bien imaginer qu’Emmanuel Macron fasse voter la loi sur le pouvoir d’achat par référendum», ajoute-t-il, tout en soulignant qu’il s’agit aussi «d’une arme à double tranchant», les votants n’approuvant pas forcément cette façon de contourner leurs élus.
La démission
C’est le scénario le moins probable, mais il existe: la démission d’Emmanuel Macron, réélu le 24 avril pour un second mandat de cinq ans, et la convocation d’une nouvelle élection présidentielle.
«Ce serait un coup de poker», prévient Dominique Rousseau, d’autant que la question se posera sur la possibilité pour lui de se présenter à nouveau.
«La Constitution interdit de faire plus de deux mandats, mais pourrait-il se représenter en argumentant qu’il n’a pas fait deux mandats entiers?», s’interroge le constitutionnaliste, qui craint un débat sans fin sur la question. «À l’heure où les radicalités sont au plus haut, c’est extrêmement risqué», tranche Pascal Perrineau.
La droite obtient 26 circonscriptions sur 27. Malgré un bon score en nombre de voix, la Nupes ne parvient à faire élire qu’un seul de ses 17 finalistes. Lire notre article.

«La Nouvelle union populaire écologique et sociale devrait se constituer comme un seul groupe» à l’Assemblée nationale, a «proposé» lundi Jean-Luc Mélenchon, inquiet que l’obtention de 89 députés par le RN remette en cause son «statut» de première opposition à Emmanuel Macron.
«Dès lors qu’il y a un seul groupe, sans aucune discussion possible l’opposition s’appellerait Nupes», a-t-il estimé devant le siège de La France insoumise à Paris. Il a justifié cette proposition: «Personne n’avait vu arriver cette situation». Il ne souhaite pas «donner le sentiment que nous amplifions la confusion (…) par notre propre éparpillement».
«Naturellement je m’en remettrai à ce que décideront les groupes», a-t-il déclaré, plaidant: «Je crois que nous devons être et rester une alternative unie».
Interrogé sur les discussions sur ce point avec le PS, EELV et le PCF, Jean-Luc Mélenchon a répondu: «ça commence là tout de suite. Quelques uns ont évoqué le sujet devant moi mais je ne veux pas les mettre dans l’embarras».
Il a ensuite cité comme interlocuteurs, dès dimanche soir, le premier secrétaire du PS Olivier Faure et le chef d’EELV Julien Bayou.
En attendant, Valérie Rabault, cheffe de file des socialistes à l’Assemblée nationale lors de la précédente législature, s’est d’ores et déjà opposée à la proposition.
«La gauche est plurielle, elle est représentée dans sa diversité à l’Assemblée Nationale. C’est une force au service du peuple français. Vouloir supprimer cette diversité est une erreur et je m’y oppose», a-t-elle tweeté aussitôt après la déclaration de Jean-Luc Mélenchon.
«C’est une proposition, pas une injonction. Ca n’empêche pas chaque partie d’avoir une délégation, comme au Parlement européen, qui s’auto-organise», a voulu rassurer Jean-Luc Mélenchon.
«Dussions-nous perdre quelques moyens matériels, j’estime que c’est dérisoire par rapport à l’enjeu politique qui se dessine devant nous», a-t-il dit en référence aux financements des partis.
Le député de l’Oise fraîchement élu et porte-parole du Rassemblement national Philippe Ballard a réclamé lundi que la présidence de la commission des Finances de l’Assemblée nationale revienne à un député du parti de Marine Le Pen.
Ce poste «est dévolu depuis une quinzaine d’années au parti d’opposition majoritaire», a-t-il rappelé sur franceinfo. Or, «nous sommes le premier parti de France» et «le premier parti d’opposition, donc la commission des Finances nous revient», a-t-il estimé.
«Ce serait une très bonne chose, la moindre des choses, et ce serait l’application de nos textes», a-t-il justifié.

Disant «entendre la bataille» qui va s’ouvrir pour ce poste, la porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire a souligné sur France Inter qu’il «doit aller constitutionnellement à un groupe d’opposition» et «qu’il n'y a pas de certitude quand on lit la Constitution».
Le poste crucial de président de la commission des Finances revient traditionnellement depuis 2007 au groupe d’opposition le plus important. Il était occupé sous la précédente législature par le député LR Eric Woerth – passé au printemps dans les rangs de la majorité macroniste.
Au vu des résultats du second tour des législatives dimanche, la désignation du président de cette commission aux pouvoirs étendus devrait donner lieu à une bataille si, comme le RN, LFI la revendique, contre l’avis de la majorité présidentielle. Le vote aura lieu le 30 juin.
Marine Le Pen a annoncé lundi depuis son fief d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) qu’elle ne «reprendrait pas la tête» de son parti, le Rassemblement national, pour se consacrer à la présidence du futur groupe RN à l’Assemblée nationale.

«Je ne reprendrai pas la tête du RN. Je me concentrerai sur la présidence de ce très grand groupe», a déclaré la finaliste d’extrême droite à la présidentielle, qui s’est dit «surprise» par le nombre de députés RN – 89, un record – élus dimanche soir au second tour des législatives, alors qu’elle en espérait environ 60.
Les Républicains ont comme prévu accusé un recul aux législatives françaises de dimanche, mais ils ont tenu le choc. Face aux spéculations sur une possible coalition de gouvernement, ils se sont, «sans ambiguïté», placés «dans l’opposition».
LR ont obtenu dimanche soir 61 élus, plus trois UDI. C’est un bon résultat au regard du premier tour (LR avait qualifié 75 candidats), surtout après la débâcle de la présidentielle (4,8% des voix), mais qui n’empêche pas la droite de passer derrière le Rassemblement national, qui a réalisé une percée historique.
«Compte tenu du résultat de la présidentielle, c’est un très bon résultat auquel nous sommes parvenus aujourd’hui», a affirmé dimanche soir le président de LR Christian Jacob.

Les républicains reconduisent ainsi leurs principaux ténors: leur numéro 2 Annie Genevard dans le Doubs, le secrétaire général Aurélien Pradié dans le Lot, Éric Ciotti dans les Alpes-maritimes, ainsi qu’Alain Marleix (Eure-et-Loir), Pierre-Henri Dumont (Pas-de-Calais), Julien Dive (Aisne), Fabien Di Filippo (Moselle).
Un rôle singulier
Si Christian Jacob ne se représentait pas, sa successeure Isabelle Perigault garde la circonscription. Le parti revendique onze conquêtes, notamment dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, fief de Laurent Wauquiez. L’ancien candidat à la primaire Philippe Juvin l’emporte également dans les Hauts-de-Seine.
LR ont en revanche perdu leurs deux dernières circonscriptions à Paris, après les défaites de Brigitte Kuster et de Francis Szpiner. Le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde est également battu en Seine-saint-Denis.
En recul par rapport à la centaine de sièges qu’elle détenait jusque-là, la droite ne sera donc plus le premier groupe d’opposition dans l’hémicycle.

Les Républicains pourraient toutefois jouer un rôle singulier dans la future assemblée, car l’alliance Ensemble! du président français n’a pas obtenu la majorité absolue. En théorie, Emmanuel Macron pourrait faire appel à eux pour réunir les 289 voix de la majorité absolue.
Main tendue
La porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire l’a affirmé sur France 2: «On a toujours eu la main tendue. Que ce soit LR ou les socialistes modérés, on a réussi à embarquer un certain nombre d’amendements. Faut-il le faire plus? Certainement. Est-ce le message de ce soir? Très certainement».
Chez LR, l’idée a été clairement rejetée par la direction du parti. «Nous avons fait campagne dans l’opposition. Nous sommes dans l’opposition. Nous resterons dans l’opposition», a affirmé Christian Jacob pour qui «il n’y a pas d’ambiguïté».
Quant à Jean-François Copé, il a parlé «à titre personnel», a-t-il ajouté. Le maire LR de Meaux venait de répéter son idée d’un «pacte de gouvernement» avec Emmanuel Macron, estimant «qu'il appartient à la droite républicaine de sauver le pays».

La présidente des Pays de la Loire Christelle Morançais a, elle aussi, appelé à «bâtir avec Emmanuel Macron un contrat de gouvernement». Le sujet promet des débats animés au sein du parti, qui réunit lundi à 14 heures son conseil stratégique.
«Roue de secours»
«On ne sera pas une opposition bête et méchante, mais il n’y a aucune raison qu’on aille sauver la peau d’Emmanuel Macron», a affirmé Aurélien Pradié.
«Nous serons un bloc décisif», a affirmé l’ancienne ministre Rachida Dati, en assurant que «nous ferons des propositions et nous attendrons du gouvernement de les soutenir».
LR est en effet «au centre du jeu, mais n’acceptera de gouverner que sur son programme», a résumé le sénateur LR Marc-Philippe Daubresse.
L’ancien négociateur européen pour le Brexit Michel Barnier l’a affirmé: «Dans la situation grave où se trouve notre pays, notre groupe d’opposition sera indépendant, libre et responsable».
L'aile dure du parti est, elle, vent debout contre toute idée de coalition, synonyme selon elle de disparition programmée. Dimanche matin encore, le patron des sénateurs Bruno Retailleau a averti dans le JDD que LR ne serait pas «la voiture-balai du «macronisme». Ce serait une double trahison de nos électeurs».
Quant à Éric Ciotti, il l’a assuré sur Twitter: «Les Républicains ne seront jamais la roue de secours d’un pouvoir déliquescent».
«Maître des horloges» depuis son élection surprise en 2017, le président français Emmanuel Macron perd «son image d’invincibilité» au sortir des législatives de dimanche. Il se retrouve sans majorité absolue à l’Assemblée nationale, ce qui va le contraindre à composer avec d’autres forces politiques et accélérer la bataille pour sa succession en 2027.
«C’est un bouleversement, un tournant par rapport à son image d’invincibilité, de quelqu’un porteur de quelque chose que rien ne peut arrêter, qui arrive toujours au bout du compte à triompher des autres», relève Bruno Cautrès, chercheur au centre de recherches politiques de sciences politiques.
Depuis 2017, Emmanuel Macron, plus jeune président de la Ve république française, élu à 39 ans sans avoir jamais eu auparavant de mandat électif, incarnait le «nouveau monde». Il avait renversé la table de la politique traditionnelle, entre gauche et droite, avec sa devise fétiche du «en même temps».
«Erreurs tactiques»
S’il avait déjà perdu les élections européennes et municipales durant son premier quinquennat, cette défaite, au cœur du pouvoir législatif, est autrement plus symbolique, même si la coalition présidentielle Ensemble! arrive en tête du scrutin.
«Pour Emmanuel Macron, c’est le résultat de l’usure du pouvoir, de la politique menée qui ne plaisait à personne. Ce sont des erreurs tactiques aussi», résume Étienne Ollion, chercheur au CNRS, en pointant la décision de programmer les législatives sept semaines après le second tour de la présidentielle.

«Une campagne de sept semaines ce n’était pas du tout raisonnable. On sait qu’on perd alors entre 15 et 20 députés par semaine quand on est au gouvernement», explique-t-il à l’AFP.
Avec 245 sièges, loin de la majorité absolue (289 députés) et de son score de 2017 (350 sièges), Ensemble! se retrouve contraint de conclure une alliance avec les républicains (61 députés) ou des accords au cas par cas avec des députés divers droite ou gauche pour faire passer ses réformes.
Jupiter à terre
«Pour Emmanuel Macron, ce quinquennat sera un quinquennat de négociations, de compromis parlementaires. Ce n’est plus Jupiter qui gouvernera mais un président aux prises avec une absence de majorité à l’Assemblée» nationale, résume Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Loin du premier quinquennat, où l’Assemblée nationale faisait parfois figure de chambre d’enregistrement avec une majorité présidentielle pléthorique, chaque projet prendra plus de temps à être négocié et voté.
Mais après l’hyperprésidentalisation, où le chef de l’État supervisait tout, arbitrait tout, le Parlement retrouve toute sa place, à l’image des autres pays européens. Le président va être obligé de composer avec lui et, donc, des oppositions d’humeur variable selon les projets de réforme sur la table, des retraites à la transition écologique.

«Le premier ministre, les présidents de groupe, le président de l’Assemblée nationale vont devenir essentiels dans le fonctionnement du quinquennat, puisque c’est autour d’eux que vont se construire les majorités», explique Dominique Rousseau.
Le président va «perdre de son autorité», «se retrouver en retrait dans la définition des politiques publiques», dit-il à l’AFP.
2027 à l’horizon
Le recours de l’article 49-3, qui permet au premier ministre d’engager sa responsabilité sur un texte de loi et de le faire adopter sans vote, s’annonce plus improbable devant le risque de tirs de barrage des oppositions. Il ne peut en outre être utilisé qu’une fois par session, hors projet de finances.
Emmanuel Macron devient aussi plus dépendant des autres composantes d’Ensemble !: le Modem de François Bayrou ou Horizons d’Édouard Philippe, son ex-premier ministre et potentiel candidat à sa succession.
Ce rééquilibrage des pouvoirs va en outre poser encore plus vite la question de sa succession en 2027, puisqu’il ne pourra pas se représenter après deux quinquennats. «Dès le mi-mandat et sans doute avant, tout le monde va observer qui est en train d’émerger, de se positionner», anticipe Bruno Cautrès.
«La question de qui sera candidat en 2027 – est-ce que ce sera Édouard Philippe, François Bayrou, quelqu’un d’autre – va jouer un rôle important dans le positionnement des alliances», renchérit Dominique Rousseau.
C’est une France transformée que va diriger à partir de lundi Emmanuel Macron, au lendemain de législatives où il a perdu la majorité absolue, ouvrant une période d’incertitude et d’instabilité. Lire notre article.

La nouvelle Assemblée nationale comptera 215 femmes (37,26%) et 362 hommes (62,74%), soit un hémicycle moins féminisé que celui issu des élections législatives de 2017 (39%), selon un décompte complet de l’AFP des 577 sièges.
Longtemps à la traîne, la France s’était hissée en 2017 au 33e rang en terme de parité, sur 185 pays classés par l’Union interparlementaire.
L’alliance de gauche Nupes pour les législatives a permis de «gagner un grand nombre de députés» mais n’a parlé «qu’aux grandes villes» et a échoué à percer «un plafond» de verre, a regretté dimanche le chef de file du PCF Fabien Roussel, réélu face au RN dans la 20ème circonscription du Nord.
«L’alliance de gauche a permis de gagner un grand nombre de députés, c’est une bonne chose, je m’en félicite, et ça va permettre aux députés communistes d’avoir un groupe demain», a d’abord salué le député.
La coalition Nupes et ses alliés ont obtenu 137 sièges.
«Mais je vois aussi que ça ne nous a pas permis d’avoir une majorité, et ça n’a pas empêché non plus l’extrême droite de progresser fortement, et ça, ça m’interpelle, ça me questionne», a déploré sur BFMTV le numéro un du PCF, qui a été candidat à la présidentielle en avril. «Je vois bien que l’alliance ne parle qu’à une partie de la France, à celle des grandes villes, et pas à celle de la ruralité», a regretté un peu plus tard Fabien Roussel sur France 3.
Marc Ferracci représentera les Français de Suisse et du Liechtenstein dans la nouvelle Assemblée nationale. Ce proche du président français Emmanuel Macron a largement battu sa rivale de la Nupes Magali Mangin, avec 64,97%, a indiqué le consulat de France sur Twitter.
Le candidat du parti Renaissance, la formation présidentielle, a remercié dimanche soir sur Twitter les électeurs de la sixième circonscription des Français de l’étranger. «Cette confiance m’honore et m’engage à répondre à leurs attentes. Je la reçois également avec gravité, compte tenu des résultats nationaux», ajoute-t-il, alors que le camp présidentiel a perdu sa majorité absolue à l’Assemblée nationale.
Le camp d’Emmanuel Macron a obtenu 245 sièges à l’issue des élections législatives dimanche, en dessous de la majorité absolue (289), suivie de la Nupes avec 135 sièges et du RN qui fait une percée historique en comptant 89 sièges, selon un décompte complet de l’AFP.
LR gagne 61 sièges et son allié UDI trois, contre une centaine dans la précédente législature. Le taux d’abstention atteint 53,77%, selon le ministère de l’Intérieur.
L’alliance de gauche Nupes a fait carton plein dimanche au second tour des élections législatives en Seine-Saint-Denis, remportant les 12 sièges de députés de ce département francilien populaire.
Dans ce département emblématique de l’ancienne «banlieue rouge», la gauche détenait déjà sept circonscriptions dans la législature sortante. La coalition a réalisé ce «strike» en balayant sur son passage les trois députés LREM sortants, un député LR et le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde.
La femme de chambre et syndicaliste Rachel Kéké, figure de la lutte des grévistes de l’Ibis Batignolles, l’a emporté dimanche au second tour des législatives avec 50,3% des voix face à la candidate Ensemble!, l’ancienne ministre des Sports, Roxana Maracineanu. Investie par la Nupes, Rachel Kéké, militante CGT, devient la première femme de chambre à accéder à la fonction de députée en France.

La Première ministre française Elisabeth Borne a mis en garde dimanche soir contre le «risque» pour la France à l’issue des élections législatives où le président Emmanuel Macron a perdu sa majorité absolue à l’Assemblée nationale.
Cette «situation inédite constitue un risque pour notre pays», a affirmé Elisabeth Borne lors d’une déclaration télévisée, tout en annonçant vouloir travailler «dès demain à construire une majorité d’action, il n’y a pas d’alternative». Elisabeth Borne a souligné que les «sensibilités multiples devront être associées et les bons compromis bâtis afin d’agir au service de la France».

Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques Stanislas Guerini a annoncé sa victoire aux législatives à Paris, dans la 3e circonscription, sauvant ainsi sa place au gouvernement, contrairement à ses collègues Amélie de Montchalin et Brigitte Bourguignon, battues.
Stanislas Guerini, réélu de justesse avec environ 51% des voix face à l’écologiste Léa Balage El Mariky, investie par l’alliance de gauche Nupes, a réussi à renverser une situation mal embarquée au premier tour, comme un autre membre du gouvernement dans la capitale, Clément Beaune, lui aussi élu sur le fil.

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