La nature s’empare de la villeLes animaux sont chez eux à Vernier
Tous les indicateurs du week-end se sont mis au vert. En point d’orgue, l’inauguration d’un nouveau parc animalier dans le canton. Première visite.

Les plantons déferlent sur la cité. On ne parle que de ça ce samedi entre ville et campagne. Un gros trafic au ras du potager: légumes, herbes aromatiques et fleurs de production biologique. Tous les indicateurs urbains sont au vert, du marché de Galiffe, sur la Rive droite, jusqu’à Châtelaine et, plus loin, Vernier.
Sur la rive en face, on a sorti le même mobilier: des bancs et des tables de kermesse, des tentes de réception en toile blanche, du faux plancher rehaussé pour épargner les plantons de demain. Du plein air printanier à forte valeur ajoutée populaire. Sur les terres verniolanes, dans la partie historique de la deuxième commune genevoise, on retrouve tous ces ingrédients réunis.

Avec, en plus, les discours de circonstance marquant l’inauguration du nouveau parc animalier de l’Esplanade, ce belvédère panoramique offrant une vue imprenable sur la cité du Lignon au loin, la roselière du Rhône en contrebas, les 180 hectares de la réserve naturelle du bois de la Grille sur la gauche. On se pince, tellement c’est beau.
La dernière fois que l’on est venu dans le coin, c’était pour un meurtre. L’avant-dernière fois, aussi. L’actualité du jour est beaucoup plus joyeuse. «Vous allez découvrir des animaux remarquables, mignons et sympathiques», annonce avec entrain une oratrice. Le conseiller d’État Antonio Hodgers renchérit: «Tout en offrant des logements sociaux, Vernier sait chérir sa campagne et son lien avec la nature.»

Il a quand même fallu quelques années pour donner un toit (entièrement végétalisé) à ce lien-ci. L’idée du parc animalier remonte à 2015. Elle trottait dans la tête de l’ancien responsable du service des espaces verts, Jean-Marc Beffa, devenu chef de projet au service de l’aménagement.
Ce projet enfin réalisé est le sien. Le parc pourrait porter son nom – l’employé fidèle part en retraite dans six semaines -, le maire de la commune, Mathias Buschbeck, sous sa casquette de Peaky Blinders, ne manquerait sans doute pas de trouver l’idée excellente. Il reste de la surface en front de façade pour personnaliser cet espace réellement magnifique.

Après avoir franchi un grand portique coulissant, on se retrouve dans une cour intérieure ni trop grande ni trop petite, favorisant la déambulation et le repli sous les couverts qui protègent tout à la fois du soleil et de la pluie. Bien vu, bien pensé, bien choisi. Du mélèze. Il vient du Valais et il est chez lui au chemin De-Sales.
Le béton se limite au socle, l’ensemble architectural est en bois, des murs à claire-voie d’une rare élégance. On aimerait se faire mouton, chèvre ou canard de Poméranie pour loger à cette adresse. Les enclos sont de dimensions généreuses, les volières également. Les volatiles ont de la place, tout est prêt pour permettre à la cane de pondre ses œufs de bon poids (70 g en moyenne) au «jaune immense». On doit ce détail gourmand à notre guide du jour.

M. Beffa est chez lui, il assure la conciergerie inaugurale de son village, reconnaissant que les occupants doivent encore prendre leurs marques, mais surtout croître et se multiplier. Ils seront tous issus de races indigènes suisses, sur la base d’une collaboration étroite avec la Fondation ProSpecieRara.
À l’exemple de la poule appenzelloise, déjà présente, avec sa robe à triple imprimé: barbue, huppée et panachée. Sauf que, ce samedi, elle préfère le frais au chaud. Trop de monde pour elle, la sonorisation de campagne l’encourage à ne pas mettre une plume dehors.

La nuit, on ferme, les volières servant de clôture extérieure orientée vers le parc alentour, exactement comme au bois de la Bâtie. Les râleurs se sont tus. Ils craignaient quoi? Le bruit et les odeurs. Le mouton miroir est plus propre que l’amateur de grillades nocturnes abandonnant au petit matin les chutes de son pique-nique sauvage.
Les rêveurs, tout en saluant la réalisation actuelle, avaient imaginé un parc ouvert sur la prairie, construit dans la pente, à la limite de la zone agricole. Doux rêveurs, mais les moutons, encore eux, auraient pu manger l’herbe en regardant le fleuve. Ils se contenteront du riche cordon boisé partant de la proche église catholique: érables, noisetiers, acacias.
Un petit paradis. Venez à pied, par la Voie verte, écouter le chant du coq. Il vient de naître. D’ici à l’hiver, il sonnera le lever du jour avant les cloches.

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