Reconversion urbaineLes 6 Toits, nouvelle citadelle des musiques
Les Charmilles s’enrichissent d’un pôle de création ouvert au public, qui accueille le Conservatoire populaire, Contrechamps, l’OCG et Eklekto. Visite avant inauguration.

C’est une façade qui culmine avec six toits alignés en dents de scie, formant une figure architecturale devenue logo dans l’histoire du monde industriel. Sous ces pics, à l’abri de ces sheds, tels qu’on les appelle, on aurait pu s’attendre au vacarme de machines imposantes et à la présence d’ouvriers accaparés par leur ouvrage. Au lieu de quoi on découvre, au cœur de cette zone industrielle des Charmilles (ZIC), un monde éloigné de la vocation première des lieux. C’est ici, dans cette ruche où se côtoient des artisans de toute sorte, qu’un nouveau pôle de création musicale sera officiellement inauguré le 12 mai. Son nom, Les 6 Toits, n’oublie pas les marques de l’histoire; sa vocation, quant à elle, regarde résolument vers l’avenir.
Cimenter les collaborations
L’espace, 800 mètres carrés en tout, abritera tout ou partie des activités de quatre acteurs majeurs du paysage musical de la région. L’Orchestre de chambre de Genève, le Conservatoire populaire, tout comme les ensembles Contrechamps et Eklekto trouveront là de quoi labourer leurs projets, croiser des points de vue, cimenter les collaborations et s’ouvrir vers le quartier et ses environs. S’achève ainsi un parcours de reconversion promu par la Ville de Genève, propriétaire des lieux, qui a débuté en 2019. À l’époque, un appel à projets avait été lancé, qui visait à réaffecter les parcelles, notamment suite à la disparition du MàD.
C’est alors que le Conservatoire populaire s’est profilé le premier, en manifestant un intérêt appuyé. Dans la foulée, l’institution est partie, par la voix de son directeur Philippe Régana, à la chasse aux entités prêtes à s’associer dans une aventure plurielle. Trois autres acteurs ayant répondu favorablement, les besoins et les envies de chacun pouvaient être partagés avec le bureau d’architectes Frei & Stefani, sollicité pour concrétiser les aspirations. «Dans un premier temps, nous avons exposé à la Ville les grandes lignes et les idées cruciales de notre démarche, nous dit Raffaele Stefani, qui a conçu et accompagné le projet. Ensuite, dans un deuxième temps, nous avons présenté un plan très détaillé, avant de passer par une dernière audition.»
Qu’est-ce qui a attiré les faveurs des jurés, dans la proposition gagnante? Sans doute les solutions ingénieuses, agiles et solides à la fois, qu’elle aligne. La première, la plus importante, saute aux yeux dès le seuil franchi: des parallélépipèdes boisés semblent vous observer depuis leurs grandes baies vitrées qui tiennent de grands yeux. Ces modules, six en tout – auxquels s’ajoute l’instrumentarium d’Eklekto – sont de dimensions variées, de 12, 45 et jusqu’à 80 mètres carrés. Les parois qui les enveloppent, en panneaux OSB, sont conçues avec du bois de récupération compressé.
Insonorisation parfaite
«Ces matériaux permettent de répondre aux exigeantes conditions posées par les musiciens et par les normes de sécurité, précise Raffaele Stefani. Dans ces parois, on trouve donc des couches coupe-feu. Et surtout, une insonorisation parfaite, car tout autour, il y a les activités bruyantes d’une scierie. Il faut enfin que la température de chaque bloc soit constante pour que les qualités des instruments ne soient pas altérées.» À peine plus loin, la visite s’achève avec le navire amiral du complexe, une vaste salle tout de noir parée, là où le MàD avait élu domicile. Ici, les répétitions et les activités pourront accueillir jusqu’à deux cents personnes.
Ces bulles artistiques ne sont pas pour autant refermées sur elles-mêmes. L’aventure des 6 Toits s’écrira avec le tissu social environnant, à travers un intense travail de médiation et de participation aux activités. Dans ces lieux mis gracieusement à disposition par la Ville pour les prochaines cinq années, il y a tout pour faire prospérer cette citadelle de la musique.
Portes ouvertes sa 14 mai de 9 h 30 à 15 h. Rens. www.les6toits.ch
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