Plein airLe roi des fouets occupe seul la rue privée de tout
Un spectacle en plein air? Oui, ce vendredi, chez les Jonquillards. Du jamais-vu cette année. Reportage exclusif.

On peut dire merci au Père Fouettard de la Jonction. Grâce à lui, Genève a retrouvé ce vendredi le plaisir du spectacle itinérant, du festif en plein air, de la manif bouffonne et joyeuse. Tout cela? Absolument, et au ras du bitume, sans se cacher, comme un grain de sable artistique dans le nouvel ordre pandémique qui dépeuple et fait le vide autour de lui.
Quatre apparitions successives, dans autant d’établissements scolaires différents, pour cette figure populaire, mouillée jusqu’à l’os par la pluie qui ne voulait pas d’elle. Il faisait – il fait toujours – une météo à ne pas sortir une marionnette géante dehors.

Dehors, elle y est, dès 10 h du matin, dans le préau de l’école du Mail, entre les totems du parc Gourgas et la caserne des pompiers. La cloche vient de sonner la fin de la récréation. Les enfants retournent en classe, sans s’asseoir. Les voici aux fenêtres, grandes ouvertes, à applaudir ce personnage carnavalesque, roi des fouets, père des fous, rappelant à chacun la nécessité de ne pas perdre la flamme, «celle qui nous fait vivre, nous rencontrer et partager.»
Les bras se lèvent dans les étages, les élèves sont heureux, l’ambiance évoque le théâtre de Guignol. Malgré la distance, les bonnes ondes circulent et ricochent contre la façade. Une heure plus tard, on se retrouve dans la cour de Carl-Vogt, avec le Musée d’ethnographie dans le dos.

Les têtes blondes ont les joues collées aux vitres, ils n’ont d’yeux que pour ce couple de géants qui danse à leurs pieds. Car le Père Fouettard est venu avec sa compagne, la Mère Chauchevieille, vilaine comme un virus boursouflé.
La police, qui sait compter, se manifeste à son tour durant la pause de midi. L’escorte a beau respecter le protocole sanitaire, il est demandé aux porteurs, en train de se reposer à la Maison de quartier de l’avenue de Sainte-Clotilde, de veiller à éloigner leurs créatures l’une de l’autre.
Guignol ne rit plus. Les temps sont durs et le ciel n’y est pour rien. On retourne dans la rue, les gens s’arrêtent et filment la scène simplifiée. Pas de parade, pas de fanfare. Malgré cela, dans le regard des gens, l’impression d’assister à quelque chose de miraculeux.
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