Le Rath fête Hodler en cent tableaux
L'exposition phare de l'année commémorative dédiée à l'emblématique peintre suisse se voue au parallélisme.

On n'aurait pu rêver meilleur alignement des chiffres. Pour commémorer le centenaire de la mort de Ferdinand Hodler, les Musées d'art et d'histoire de Genève (MAH) et le Kunstmuseum de Berne – sis dans les villes de décès et de naissance de l'artiste – ont réuni exactement cent œuvres («un hasard», assurent-ils), issues pour moitié de leur fonds, augmentés de prêts publics ou privés.
Vernie jeudi 19 avril au Musée Rath, l'exposition, pilotée par la Française Laurence Madeline, ancienne conservatrice du pôle Beaux-Arts aux MAH et aujourd'hui commissaire indépendante, et Nina Zimmer, à la barre de l'institution bernoise, prend pour fil rouge la théorie hodlérienne du parallélisme. Point d'esprit rétrospectif ou de parcours chronologique dans cet accrochage, donc. «L'idée était de renouveler le regard sur l'œuvre et la carrière de Ferdinand Hodler, argumente Laurence Madeline. D'aller vers sa peinture, de se promener dans sa pensée d'artiste comme il vagabondait dans la nature, dans une démarche de délectation.»
Scénographie très réussie
D'emblée, il faut avouer que la déambulation est d'une beauté à couper le souffle. Avoir l'opportunité de considérer ensemble un si grand nombre de chefs-d'œuvre du maître suisse plonge dans le ravissement, encore souligné par la scénographie très réussie du designer lausannois Adrien Rovero. Dans des espaces immaculés, de grands plafonniers aux lignes simples dispensent un éclairage évolutif, jouant différentes ambiances de couleurs, tandis que des spots mettent en lumière chaque toile individuellement, leur conférant une remarquable limpidité. À noter également l'ingénieuse bande au sol, qui sert à la fois de signalétique pour les titres des tableaux et de distanceur.
Le parcours s'ouvre avec le manuscrit de «La mission de l'artiste», conférence prononcée par Hodler en 1897 à Fribourg et développant les principes du parallélisme, selon lequel nature et corps seraient organisés de façon rigoureuse. C'est sur les préceptes de cet exposé, dont quelques phrases clés courent le long des murs de l'exposition, que Laurence Madeline a développé sa proposition. La première section présente, sous l'intitulé «parallélisme de la création», la façon dont le peintre applique la symétrie et l'ordonnancement dans ses compositions. Elle débute avec «Le promeneur dans la forêt», qui figure l'artiste marchant en lisière de bois, silhouette longiligne sur fond de troncs élancés. Des paysages de lacs et de montagnes de toutes époques puis une série de portraits et d'autoportraits poursuivent la démonstration. Il y a par exemple une étude pour «L'Unanimité», aboutissement de la doctrine, où une foule d'hommes en cercle autour d'un personnage central lèvent le bras en signe d'assentiment.
Toile symboliste magistrale
Deuxième étape, «les principes» mettent en avant horizontalité, verticalité et opposition symétrique. Trois répliques du «Bûcheron» illustrent notamment le propos. Allongée, la femme offerte du «Désir» fait face aux hautes statures de «L'Émotion», tandis qu'on redécouvre restaurée l'étude, toute en lances couchées, pour la fresque de «La Bataille de Morat», en contrepoint de l'auguste carrure d'un «Guillaume Tell» résolument debout.
Il faut descendre afin d'apprécier le clou de l'accrochage, qui marque le troisième chapitre, soit «correspondance»: «La Nuit», toile symboliste magistrale adoubée à Paris après avoir été censurée à Genève, qui projeta Ferdinand Hodler dans la notoriété. Un grand privilège accordé par le Kunstmuseum de Berne, qui ne fait jamais voyager ce joyau. On peut seulement regretter que son emplacement ne permette pas un grand recul pour l'apprécier.
Plus loin, Laurence Madeline développe un «parallélisme des sentiments» assez flou, appariant librement paysages et portraits. Valentine Godé-Darel sur son lit de mort coudoie avec un lac Léman presque inanimé, un autoportrait tardif avec une rivière rocailleuse. «Hodler s'y peint comme s'il était fait de rochers tourmentés par le passage de l'eau, justifie la commissaire. Je voulais que le visiteur puisse projeter sa propre interprétation dans ces associations.» Le voyage au Rath se clôt avec un quatrième et ultime volet baptisé «essentiel», constitué de la seule salle organisée chronologiquement. De splendides vues lacustres et alpines témoignent de la progressive évolution de l'artiste vers l'épure, où l'harmonie du monde touche à la plénitude.
«Hodler//Parallélisme» Jusqu'au 19 août au Musée Rath, puis du 14 septembre 2017 au 13 janvier 2019 au Kunstmuseum de Berne.
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