En matière de prévention, comme dans d’autres domaines, le parlement a une guerre de retard. En 2021, il adoptait une loi permettant les achats-tests d’alcool destinés à protéger la jeunesse. En clair, les commerçants qui vendent de la vodka ou du gin à des mineurs pourront être pris en flagrant délit, dénoncés, puis sanctionnés.
Les modalités pratiques seront connues dans quelques mois, après un ultime passage dans la moulinette de l’Administration fédérale. Mais c’est désormais dans la vente en ligne que les problèmes se posent avec le plus d’acuité. De premiers achats-tests effectués sur internet par la Croix-Bleue ont mis en lumière une réalité inquiétante: dans plus de neuf cas sur dix, l’ado a obtenu ce qu’il avait commandé. Et bien souvent, sans même devoir mentir sur son âge…
«En voyant les milieux de la prévention remonter au créneau pour exiger à nouveau des mesures restrictives, on ne peut s’empêcher de se dire qu’ils prêchent dans le désert.»
Le Conseil fédéral dit vouloir passer par une autre révision de loi pour autoriser officiellement ces enquêtes en ligne et en tirer les conséquences. Reste à savoir qui assurera les contrôles et quelles amendes risqueront les contrevenants. Or l’histoire récente n’incite guère à l’optimisme.
L’instauration des achats-tests est à peu près tout ce qu’il reste d’une révision totale de la loi sur l’alcool, enterrée sans gloire fin 2015. Les élus s’étaient alors cassé les dents sur les mesures préventives. Introduction d’un prix de vente minimal, fin des opérations spéciales du type «happy hours», interdiction de la vente d’alcool de nuit en dehors des bars et des restaurants partout en Suisse: rien n’a passé la rampe. La responsabilité d’agir a été laissée aux Cantons… et aux parents.
Dès lors, en voyant les milieux de la prévention remonter au créneau pour exiger à nouveau des mesures restrictives, on ne peut s’empêcher de se dire qu’ils prêchent dans le désert.
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Éditorial – Le parlement laisse les mineurs trinquer
Depuis le naufrage de la loi sur l’alcool en 2015, presque rien n’a été fait à Berne sur le front de la protection de la jeunesse.