Le Moulin de la Pallanterie, le dernier des Mohicans
Seule minoterie du canton, l'usine de la Rive gauche produit 4000 tonnes de farine par année et a de beaux jours devant elle. Sa tour forme un repère dans la région.

C'est une tour de quarante-deux mètres qui surplombe la rive gauche et ses communes aisées depuis les années 60. Son pic trône quelques mètres plus haut, où un pavillon suisse donne de la couleur à ce bloc de béton sans charme. «Le drapeau fait cinq mètres sur cinq, soit vingt-cinq mètres carrés. Il subit tellement le vent que je dois le changer tous les trois mois», indique Marcel Meier, discret entrepreneur genevois à la tête de BISA, un des plus grands groupes boulangers de Suisse romande.
Dans son escarcelle: le Moulin de la Pallanterie, dernière institution du canton à pouvoir se prévaloir de ce titre. Corollaire à ce statut de dernier Mohican, la farine qui sort des moulins est la seule qui soit certifiée et labellisée GRTA, et ce depuis 2007. Au total, ce sont près de 5000 tonnes de blé qui sont écrasées chaque année, pour 4000 tonnes de farine qui en ressortent. L'activité est donc intense.
Aujourd'hui, environ un tiers du blé genevois passe par La Pallanterie, le reste est envoyé ailleurs en Suisse. C'est simple, affirme Marcel Meier: si ses moulins cessent de tourner, il n'existera plus de farine genevoise. L'idée de voir sa minoterie être recyclée en lieux d'activités annexes lui passe donc bien au-dessus de la tête. Pourtant, la zone de la Pallanterie avait été citée par l'étude «Genève la Nuit» comme projet pilote. Dans ce petit coin de vie coincé entre Meinier, Collonge-Bellerive, Corsier et Vésenaz, le moulin y est un symbole. Un point de repère même, avec cette tour qui s'est dressée dans les années 60. Et qu'importe sa morne apparence, le moulin tourne à plein régime depuis le lendemain de la guerre. Tâche à Julien Perraudin, le chef meunier depuis cinq ans, de faire la visite.
Des lieux exigus
«Nous sommes le plus gros des petits meuniers de Suisse», lance le guide. Il faut dire qu'on est loin d'un grand bâtiment industriel. Ici, l'arrangement semble avoir été confié à un génie de l'optimisation des espaces. Un champion de Tetris en somme, bien inspiré lorsqu'il fallut tout répartir sur trois niveaux. Pour circuler entre les impressionnantes machines, il arrive que l'espace entre deux engins atteigne tout juste le mètre.
L'exiguïté est à son paroxysme lorsqu'on monte d'un ou deux étages, au gré d'un bien mince mais tout aussi raide escalier de métal en colimaçon, qui rappelle plutôt une échelle lorsqu'arrivent les dernières marches. Et pourtant, tout semble fonctionner parfaitement: les machines sont remuantes et signalent une production soutenue. Deux moulins différents occupent le bâtiment, complètement rénové il y a une quinzaine d'années. L'un est un modèle classique à cylindre, l'autre est une «meule de pierre». Cette technique ancestrale permet de conserver l'intégralité du germe de blé. «La farine obtenue est meilleure nutritionnellement, explique Julien Perraudin. Elle est plus raffinée que celle fabriquée avec le moulin principal.» A la Pallanterie, la meule de pierre est utilisée pour écraser le blé bio. Les deux autres variétés travaillées sont le blé conventionnel GRTA et le seigle GRTA. Chaque mois, ce sont 500 tonnes qui arrivent au moulin. Tout est entreposé ici même, dans l'un des vingt-sept silos.
La tour est un silo
Précision importante, au cœur de la visite: l'imposante tour de béton est en fait un silo. On n'y pénètre pas, sous peine d'être noyé sous les céréales: «Elle est remplie avec 1000 tonnes de blé», fait remarquer le chef meunier. L'activité est donc concentrée dans le reste de l'édifice. Et comment tout cela fonctionne-t-il, sachant que la production est entièrement automatisée? «Le blé est d'abord nettoyé de tous les corps étrangers qui peuvent s'y trouver, liste Julien Perraudin. On y ajoute ensuite de l'eau pendant vingt-quatre heures pour humidifier l'enveloppe, avant de l'écraser pour obtenir deux farines différentes, blanche ou mi-blanche, qu'on stocke dans des silos en fonction du planning.»
Et c'est ainsi du lundi matin au vendredi soir, sans discontinuer. Un défaut dans la chaîne de production et les machines s'arrêtent instantanément. Seules cinq personnes sont attelées à la bonne marche du moulin et à la confection de la meilleure farine possible. Le groupe BISA compte près de 500 collaborateurs, qui en dépendent plus ou moins directement, que ce soit pour les nombreuses boulangeries ou les différents tea-rooms de Genève à Sierre. De quoi caractériser l'importance du Moulin de la Pallanterie. Sa vocation industrielle semble avoir encore de beaux jours devant elle.
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