Le croissant pétrolier de Syrte au cœur des rivalités
Le bassin pétrolifère est le terrain de combats qui auront probablement des conséquences politiques.

La bataille fait rage pour prendre le contrôle des sites pétroliers du bassin de Syrte, en Libye. Début mars, deux des principaux sites, ceux de Ras Lanouf et de Sidra, avaient été pris par la Brigade de Défense de Benghazi, groupe crée en 2016 et réputé proche d'Al-Qaida. Ces combattants islamistes s'opposent au maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est libyen. Le 14 mars, les troupes du maréchal, de l'autoproclamée Armée nationale libyenne, reprenaient la main sur la région au prix d'intenses combats.
La production reprend
La bataille pour cette zone qui contient 70% des réserves d'or noir du pays est probablement loin d'être finie. Pour Khalifa Haftar, elle représente une carte maîtresse des futures négociations pour régler la crise politique. En effet, 90% du budget de l'Etat est issu du pétrole. L'Armée nationale libyenne, qui reconnaît le parlement de Tobrouk, tient aussi deux sites pétroliers importants: Brega et Zouïtina. Or ces deux terminaux sont sur la route de la Brigade de Défense de Benghazi (BDB) dont l'objectif est de rejoindre Benghazi pour la «libérer» du joug de Haftar.
Preuve que la Brigade en question ne s'intéresse guère aux infrastructures pétrolières: après avoir conquis les deux sites, le groupe les avait remis aux mains du gouvernement d'Union nationale, né des accords de Skhirat, signés sous l'égide de l'ONU en décembre 2015. C'est Idris Bukhamada, chef des gardes pétroliers, qui en avait pris la charge. «Notre mission est simplement de sécuriser le travail de la Compagnie nationale de pétrole (NOC)», expliquait-il alors. Sa nomination fait pourtant débat, puisqu'il est accusé d'être proche d'Ibrahim Jedran.
Ce trentenaire bloquait les ports pétroliers depuis l'été 2013 pour défendre des idées fédéralistes. Khalifa Haftar et ses hommes l'avaient chassé en septembre dernier avant de relancer production qui était à l'arrêt depuis 2014. De 1,6 million de barils par jour en 2012, la production en Libye avait chuté à 250 000 barils, mi-2016. Depuis le début de l'année, la courbe s'inversait, atteignant les 700 000 barils. Une petite bouffée d'air pour l'Etat libyen.
Mais il faudra du temps pour revenir à une production normale, car les infrastructures ont sérieusement été endommagées par des combats qui ont eu lieu en décembre 2014, l'inactivité forcée et quelques attaques sporadiques.
Des sites endommagés
En décembre 2014, à Sidra, l'un des terminaux pétroliers objets des récents combats, des centaines de milliers de barils de pétrole sont partis en fumée avec l'incendie de plusieurs citernes touchées par les tirs. Sept réservoirs - d'une valeur de 32 millions de francs chacune, selon Waha Oil (joint venture entre trois entreprises américaines et la NOC libyenne qui gère le site) - sont complètement détruits sur un total de dix-neuf. «Il y en a quatre autres qui sont réparables. Nous allons en remettre deux en service d'ici deux mois. Cela permettra d'augmenter l'exportation à 100 000 barils par jour», estimait en février Ibrahim Malhouf, manager du site. Mais l'homme ne se faisait pas d'illusion: «Trois des six champs, qui nous alimentaient, sont aujourd'hui à l'arrêt, donc même si on retrouvait une capacité totale, la production ne suivrait pas.» En 2015, Jalu, Dahra et Mabrouk, plus au sud, ont été détruits par le groupe Etat islamique.
Lors d'une visite en février à Sidra, 24 heures a pu observer la teneur des réparations faites avec les moyens du bord. «Les pipelines n'étaient plus utilisables, donc on les a remplacés par des tuyaux flottants dont on n'avait plus besoin pour l'offshore. Cette citerne a été abîmée, mais on peut quand même la remplir aux deux tiers, expliquait Ibrahim Malhouf.» Plus loin, des pipelines étaient recouverts de sable «pour éviter qu'elles ne prennent feu en cas d'attaques», justifie Ibrahim Malhouf, comme s'il savait déjà que le site était convoité par d'autres groupes.
Un avion d'Haftar abattu
En fin d‘année dernière, une roquette avait touché une citerne, une autre était tombée sur un bâtiment à proximité des pipelines de réception, centre névralgique du terminal. «Si elles avaient été touchées, cela aurait été la fin de as-Sidra», enrageait Ibrahim Malhouf. Aucune information n'a pour le moment filtré sur l'état des lieux depuis les derniers combats.
Un peu plus à l'est, samedi, un avion de chasse appartenant aux forces armées du maréchal Khalifa Haftar a été abattu à Benghazi. Le Mig 21 a été abattu par un missile à guidage thermique, alors qu'il menait un raid contre des positions djihadistes à Al-Sabri. Le pilote a pu s'extraire de l'appareil et sauter en parachute avant que l'avion ne s'écrase. Il s'agirait d'un des derniers bastions des djihadistes à l'est de Benghazi.
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