Musique sacréeLe Chœur du Grand Théâtre, une fulgurance à la cathédrale Saint-Pierre
La formation dirigée par Alan Woodbridge a déployé sa richesse expressive dans un concert consacré à Arvo Pärt et à Rachmaninov.

Ses qualités se laissent apprécier dans son fief naturel de la place Neuve. Encore faut-il en cueillir l’essence, les soirs de représentation venus, entre des pages de partitions où les voix solistes, celles des protagonistes des opéras, dominent tout ou presque. L’occasion était trop belle, alors, d’entendre le Chœur du Grand Théâtre dans une petite épopée en solitaire, d’en saisir toutes les qualités samedi soir. Et la proposition faite sous les hautes voûtes de la cathédrale Saint-Pierre a attiré des centaines de mélomanes, qui ont rempli jusqu’au dernier banc.
Puissance et précision
Le programme, pourtant, était exigeant, surtout dans sa partie liminaire, la plus consistante par ailleurs. Car avec les pièces de Arvo Pärt mises à l’affiche, on chemine comme toujours avec l’Estonien sur une double voie et on perd parfois l’équilibre. Ses travaux pour voix – «Passio», «De Profundis», «Stabat Mater» … – sont traversés par des traditions lointaines, le rite orthodoxe étant chez lui à la fois une charpente et un territoire de réinvention. On l’aura mesuré une fois encore avec «Adam’s Lament», où les innombrables épisodes aux textures et intensités éloignées ont permis au Chœur dirigé par Alan Woodbridge de déployer l’étendue de son savoir-faire. On l’a trouvé diablement précis, d’une puissance par endroits phénoménale – il ne fallait pas être assis dans les premiers rangs, comme votre serviteur… – mais aussi d’une finesse à couper le souffle dans cette longue et complexe entrée en matière.
L’orgue de Vincent Thévenaz a été d’un excellent accompagnement, avant de se lancer dans un interlude du même compositeur, «Annum per annum». Œuvre étonnante, bâtie sur le socle d’une courte séquence de notes, répétées avec des registres multiples. Quasi un catalogue des possibles pour l’orgue de la cathédrale et pour son titulaire. Plus loin, après le saisissant «Otche nash» («Notre père») de Nikolaï Golovanov, ce fut le temps des «Vêpres» de Rachmaninov, dont on fête le 150e anniversaire. Ici encore, s’en est dégagé une grande intensité, avec des passages poignants, tel ce «Maintenant laisse partir», si bien chanté par le ténor Marin Yonchev. Une soirée marquante, donc, dont on espère des répliques au programme du Grand Théâtre.
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