SuisseL’aviation d’affaires gagnante à court terme du Covid
La crise liée à la pandémie devrait profiter à l’aviation d’affaires suisse en raison de la diminution des vols des grandes compagnies. Mais la cherté de la vie pourrait changer la donne.

L’aviation d’affaires suisse pourrait profiter à court terme de la réduction des vols des grandes compagnies aériennes. Mais seulement si chaque pays accorde à nouveau un accès libre à son espace aérien et terrestre. La cherté de la vie en Suisse met cependant le secteur dans une situation délicate, l’empêchant de proposer des prix compétitifs.
Interrogée par AWP, l’optimisme de Helene Niedhart, qui cumule les fonctions de présidente et directrice générale de Cat Aviation, présidente du conseil d'administration de l'Association suisse de l’aviation d’affaires (SBAA) et de gouverneure de l’Association européenne de l’aviation d’affaires (EBAA) à Bruxelles, se veut prudent.
Certes on fait appel aux jets d’affaires lorsque les liaisons régulières ne sont pas bonnes, il est nécessaire de se rendre dans des pays particulièrement critiques au niveau de leur sécurité ou le temps presse.
Pression sur les prix
Mais l’aviation d’affaires suisse subit une énorme pression sur les prix. Elle ne peut plus suivre l’offre de pays à bas coûts comme la Pologne, la Bulgarie ou le Kosovo qui rémunèrent leurs pilotes avec des salaires oscillant entre 1500 à 3000 euros (environ 1600 à 3200 francs).
La Suisse est aussi discriminée par rapport à l'Union européenne (UE), entre autres au niveau du cabotage, alors que l’aviation d’affaires suisse représente une partie importante de l’aviation helvétique. Genève, en particulier, se classe en première position dans le pays et troisième à l’échelon européen.
En tant que pays exportateur, la Suisse compte cinq fois plus d’entreprises internationales par habitant que tout autre pays de l’UE. Il en résulte que près de 34’000 emplois directs et indirects sont générés par l’aviation d’affaires, avec une performance économique estimée à 14,6 milliards d'euros, selon une étude de Booz Allen Hamilton.
«Pour l’heure, nous sommes préoccupés par une motion parlementaire qui veut imposer une taxe climatique de 500 à 5000 francs par départ de Suisse, selon la taille de l’avion. Ce prélèvement extrêmement élevé est sans commune mesure avec les autres pays européens», déplore l’experte de SBAA.
Kérosène synthétique moins polluant
«Les taxes climatiques devraient être internationales et non locales, d’autant plus qu’un avion ne reste dans l’espace aérien suisse que pendant 5 à 20 minutes tout au plus», martèle Helene Niedhart.
L’aviation d’affaires suisse redouble d’efforts pour s’éloigner des combustibles fossiles, collaborant avec Climeworks, un spin-off de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ), qui a développé la première technologie commerciale d’élimination du carbone au monde, avec un kérosène synthétique qui émet au maximum 20% de Co2.
Dès avril, l’aviation d’affaires suisse a énormément souffert de la pandémie du coronavirus: tous les vols réservés ont été soudainement annulés et les avions ont été cloués au sol. Le marché a connu un effondrement d’environ 90%.
Au début de la pandémie, comme pratiquement tous les pays du monde, la Suisse a dû fermer ses frontières et même les avions d’affaires ne pouvaient plus voler que de manière sélective. De tels vols impliquent toujours d’énormes clarifications et procédures d’approbation et ne sont souvent possibles qu’avec un soutien diplomatique, explique la fondatrice de Cat Aviation.
Redécollage des grandes compagnies
Côté grandes compagnies, après un choc sans précédent, le transport aérien se met en piste pour redécoller avec un arsenal anti-Covid-19, «clé» du redémarrage, qui devra être harmonisé au niveau mondial pour éviter un «patchwork» de mesures, explique Alexandre de Juniac, directeur général de l’Iata.
De mi à fin mars, «nous avons relevé une légère augmentation du trafic par comparaison à l’année précédente, avec surtout des vols de retour pour des clients suisses et des entreprises de plusieurs pays, ainsi que des acheminements d’aide médicale qui devaient être livrés directement en Suisse», révèle Mme Niedahrt, qui est aussi membre des conseils des aérodromes de Dübendorf et de Berne.
De son côté, Swiss a fait savoir qu’au niveau de son offre elle espère présenter dans les prochaines semaines un plan de vols qui augmentera vers les 50% d’ici à la fin de l’année.
Un certain retour à la normale pourrait voir le jour dès 2021, mais uniquement avec le redémarrage de la conjoncture mondiale. «Je crains que les dommages collatéraux du confinement soient immenses et entraînent des réajustements» du secteur, conclut Helene Niedhart.
Contactés également, les responsables de Nomad Aviation et d’ExecuJet n’ont pas souhaité répondre aux questions d’AWP.
ATS/NXP
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