C’était présenté comme le débat de la législature: trois jours à se poser la question de comment augmenter la production d’énergie renouvelable en Suisse. Il y a urgence, dit-on. Urgence sur le plan énergétique, urgence sur le plan climatique – et pourtant, la réponse n’est pas à la hauteur. Car le paquet, qui n’est pas encore définitivement ficelé, propose une espèce de méchoui dont on peine à comprendre ce qu’il va vraiment sauver.
D’accord, la Suisse n’aime pas les révolutions, mais ce n’est pas une raison pour se complaire dans le rôle d’un escargot flâneur – selon l’expression utilisée mercredi matin par le directeur de l’Association des entreprises électriques suisses.
«Il y a urgence. Urgence sur le plan énergétique, urgence sur le plan climatique – et pourtant, la réponse n’est pas à la hauteur.»
Ce qu’il y a de profondément inquiétant, c’est de voir se mélanger des attitudes dogmatiques qui se télescopent pour ne rien donner. À ma droite, les jusqu’au-boutistes qui ne se contentent pas de nouveaux barrages mais veulent assécher un peu plus les ruisseaux, tendant la perche à un référendum inutilement chronophage. Et de voir le même camp brandir le spectre du référendum quand il s’agit de demander un effort aux propriétaires pour couvrir le bâti existant avec du solaire. Les poissons n’ont qu’à faire leur part.
Et puis il y a les autres, à ma gauche, qui n’ont que la sobriété à la bouche, mais qui sont infiniment gourmands lorsqu’il s’agit de protéger jusqu’à la dernière mouche du dernier pierrier glaciaire. Avec de tels idéologues, on n’aurait construit aucun barrage le siècle passé (deux tiers de l’électricité consommée en Suisse) et on s’abreuverait au fossile plutôt qu’à l’eau de pluie. Et tant qu’on y est, s’interdire toute réflexion factuelle sur l’énergie nucléaire, c’est jouer à l’autruche, mettre la tête dans le sable et espérer y trouver du charbon.
Les élus ne touchent en revanche pas aux subventions, indispensables nous disent les investisseurs dans le renouvelable. On rappellera ici toutefois l’adage qu’un médicament infusé à trop forte dose peut devenir une drogue – en témoigne la ruée incontrôlée sur les parcs solaires alpins qui a l’air de courir davantage après les deniers fédéraux qu’après les kilowattheures. Au fond, y a-t-il un pilote dans l’avion?
Méfiance de rigueur
Reste alors les promesses chiffrées: beaucoup se félicitent d’avoir inscrit dans la loi l’objectif d’atteindre 35 TWh d’électricité renouvelable produite en 2035 (hors hydraulique). Mais à la différence de celui qui doit avoir la moyenne pour réussir ses examens, cette indication ne contraint personne et ne fera redoubler aucun des élus qui lui a donné sa voix.
En la matière, l’histoire invite à être méfiant. En 1994, le peuple acceptait un texte majeur en matière environnementale: l’initiative des Alpes. Trente ans après, la Suisse a certes percé deux tunnels ferroviaires à travers les montagnes, mais l’objectif de 650’000 camions transitant par an au maximum sur les cols alpins n’est toujours pas atteint. Une loi miracle pour face au défi du siècle? Pour l’heure, on n’y croit pas.
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La rédaction – La Suisse ne se décarbonera pas de sitôt
Après des heures de débat, le parlement a fixé les objectifs en matière de production d’énergie renouvelable. Mais il faudra bien plus.