Il est tragique pour un enfant qui naît de ne pas être reconnu par ses parents, comme le sont les circonstances dans lesquelles cela arrive. S’agissant du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), c’est le sort que la Suisse, une de ses principales génitrices, lui fait subir, et ici sans raison! La communauté internationale a été estomaquée face au délaissement suisse, cependant 91 États de tous les continents l’ont aujourd’hui signé, permettant sa mise en œuvre.
Il reviendra aux historiens de porter un jugement sur les vraies raisons de l’abandon suisse. Concernant celles que Berne invoque pour le justifier, aucune ne tient la route. J’ai moi-même dirigé la Division compétente pour la sécurité internationale du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et aucun expert ne prétendait alors que le projet du TIAN contredisait ou fragilisait des accords existants, comme le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP)!
«La Suisse mettra-t-elle sa politique en adéquation avec ses valeurs?»
Pour une raison simple: cette affirmation est, aujourd’hui comme hier, erronée voire mensongère. Quelle prétention de la part de la Suisse de contredire sur ce point tous les États signataires et le secrétaire général des Nations Unies! En vérité, le TIAN complète le TNP, prévoyant une interdiction complète des armes nucléaires, concept appliqué dans le passé aux autres catégories d’armes de destruction massive, chimiques et biologiques. Ainsi le Traité comble-t-il le vide juridique qui avait permis jusqu’ici aux armes nucléaires d’être traitées différemment des autres. Grâce à la base juridique sans équivoque de l’interdiction, un grand pas vers l’élimination totale est franchi.
Pour deux ans, la Suisse fait maintenant partie du Conseil de sécurité de l’ONU. Mettra-t-elle sa politique en adéquation avec ses valeurs? Donnera-t-elle de la consistance au slogan qu’elle s’est choisi: «Un plus pour la paix»?
Les deux Chambres du parlement ont enjoint le Conseil fédéral de signer le TIAN, sans succès jusqu’ici. Comme est resté sans effet l’appel récent de la société civile, représentée par trente-cinq personnalités, parmi lesquelles des anciennes conseillères fédérales, des anciens présidents du CICR, secrétaires d’État et ambassadeurs.
Un message clair
La guerre est revenue sur notre continent. La banalisation du discours concernant l’engagement nucléaire est lourde de menaces. La communauté internationale doit répéter inlassablement aux détenteurs de l’arme nucléaire l’opposition à son utilisation et à terme la nécessité de son élimination. Il n’y a pas de façon plus claire de le leur dire que de signer le TIAN.
La planète pourra-t-elle compter sur la Suisse dans ce combat existentiel? Notre pays retrouvera-t-il sa place parmi les États qui ont choisi le bon côté de l’histoire? Il revient au Conseil fédéral d’en décider!
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L’invité – La Suisse doit signer le Traité d’interdiction des armes nucléaires
Georges Martin milite en faveur de l’élimination complète des armes nucléaires.