La newsletter, ce (vieux) truc si chic
Presque aussi vieilles qu'Internet, les newsletters font leur réapparition dans les boîtes mail, mais dans une version sublimée, utile et hype. Présentations

Ringarde, la newsletter? Au contraire, elle n'a jamais été aussi cool. On la disait condamnée, clouée au pilori virtuel à grands coups de flux RSS, de posts Facebook et de fils Twitter. Mais voilà que le bon vieux courriel d'information s'offre un come-back. Depuis quelques mois, des initiatives intéressantes fleurissent dans les boîtes mails francophones. Rien à voir avec leurs aînées à visée autopromotionnelle: ces missives électroniques nouvelle génération revendiquent leur statut de lettres informatives. Ces expériences ont pour noms Brief Me, Quoi de Meuf? ou encore Calmos. Points communs? Un ton, des convictions et un gros souci de qualité.
«C'est un format ancien qui revient en force en ce moment, au même titre que le podcast», confirme David Honnorat, heureux papa de Calmos, une newsletter cinéma hebdomadaire au ton décalé, qui ne cesse de faire de nouveaux adeptes et affiche un taux d'ouverture de 65%.
Ce vent de fraîcheur virtuel qui souffle sur les boîtes mails nous vient des Anglo-Saxons. Plus précisément de Lena Dunham, actrice et réalisatrice de la série Girls. A l'automne 2015, la demoiselle a l'idée de lancer les Lenny Letters, une newsletter féministe accessible sur simple inscription, dont l'objectif est de «rendre le monde meilleur pour les femmes et les gens qui les aiment». Son concept engagé compte désormais plus de 500 000 fidèles. Sa petite sœur française, Les Glorieuses, fait chaque mercredi plus de 40 000 heureux lecteurs.
En France, Clémentine Gallot et Mélanie Wanga ont décidé au mois de janvier de partager à plus large échelle les mails qu'elles s'envoyaient entre elles. Le résultat s'appelle Quoi de Meuf? et mélange avec malice féminisme et pop culture tous les dimanches, à grand renfort d'hyperliens scrupuleusement sélectionnés. Résultat: 2800 inscriptions en quelques semaines, en grande partie grâce au bouche à oreille.
Un succès tel qu'il surprend encore ses auteures. «Les newsletters existaient jusqu'ici sous formes commerciales, explique Clémentine Gallot. Remises au goût du jour, elles permettent notamment aux paresseux de recevoir directement chez eux des informations qui les intéressent. On fait en quelque sorte le tri à leur place. Les internautes sont très demandeurs, car les offres francophones sont encore rares…»
Une forme de résistance
Ainsi dépoussiérée de son aura marketing, la newsletter se présente comme un subtil moyen de lutter contre «l'infobésité». Laurent Mauriac, à la tête de Brief Me, analyse le succès de sa missive quotidienne: «J'ai l'intuition qu'un besoin se crée à cause de la multiplication des flux d'information. En réaction à ce trop-plein, Brief Me est à la fois une sélection et un résumé de l'actu.» Dans cette newsletter d'information généraliste payante, livrée cinq jours par semaine, pas d'hyperliens mais la substantifique moelle de l'actualité. En quelques paragraphes, le destinataire prend connaissance de l'actualité du jour, approfondit un sujet, lit une prise de position, glane au passage une info pratique et une autre décalée, ce qui lui permettra de briller à la machine à café. Le tout avec sobriété, impartialité et professionnalisme. Une formule novatrice qui fait 500 nouveaux adeptes tous les mois. Dans la même optique, Time To Sign off résume tous les soirs l'actualité du jour, anticipe celle de demain et y ajoute une information coquine.
Des marchés de niche
Le phénomène touche tous les domaines, y compris ceux prétendument boudés par cet être mystérieux qu'est le jeune internaute. A l'exemple de la booksletter du magazine littéraire Books. Une à deux fois par semaine, l'abonné reçoit par mail une citation, un chiffre, un texte de format moyen et un long extrait, le tout en lien avec l'actualité et réalisé par un journaliste. Carton, y compris chez les moins de 25 ans.
Même succès pour la newsletter cinéma Calmos, nouvelle venue en terres virtuelles, qui propose de causer cinéma tous les jeudis, à contre-courant des réseaux sociaux et de l'ultraconnection. «Dans le monde du septième art, la prise de parole est saturée par la course au clic et au post de la bande-annonce, explique David Honnorat. Tout ce cirque empêche d'aborder le fond. Calmos fonctionne car c'est une manière de sortir du fil d'infos continu, de trier, de prendre son temps. Il s'agit d'une curation qui n'a pas de sens éditorial autre que celui de notre propre curiosité, en toute subjectivité et avec l'impression de recevoir le mail d'un ami.»
Et nul besoin d'être une énorme entreprise ou un média pour évangéliser les adresses IP. Des outils de diffusion de masse comme MailChimp ou TinyLetter permettent à tout un chacun de se lancer dans la curation à grande échelle. Et pourquoi pas d'en faire son gagne-pain, à condition de convaincre les internautes que payer vaut son pesant de pixels.
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