L'hôpital accueille un centre de formation 5 étoiles
L'espace high-tech de formation en chirurgie, installé aux HUG, a coûté 21 millions. Des médecins locaux comme étrangers s'y forment.
Ils sont une quarantaine à s'affairer derrière leur masque, noyés dans leur robe stérile bleue. Dans un vrombissement de perceuses, des cliquetis des pinces et des bruissements de protège-chaussures, ils ont l'œil rivé sur une armada d'écrans. De loin, on croirait la planète terre vue de l'espace. Mais la vue poétique est chassée par l'image d'une cavité luisante. On vient de plonger dans la chair molle d'un genou.
Les médecins sont répartis autour de huit tables d'opération, face à huit tronçons de jambes. Ils participent à un cours de chirurgie dans l'espace de la Fondation suisse pour l'innovation et la formation en chirurgie (SFITS). Créé en collaboration avec les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), il est installé dans leur nouveau bâtiment rue Gabrielle-Perret-Gentil 4 (lire encadré). Ce centre 5 étoiles qui dispose de matériel dernier cri sur 2000 m2 n'a que peu d'équivalents en Europe. Ouvert depuis le mois de septembre, il est destiné au perfectionnement de tout professionnel qui pratique des interventions chirurgicales. Il n'a même pas encore été inauguré et pourtant son planning de réservations affiche complet jusqu'en octobre…
Viser l'uniformité de niveau
Des médecins, des sociétés scientifiques ou encore des industries peuvent louer ces infrastructures. «Les collaborateurs des HUG peuvent généralement bénéficier du fond formation de l'Hôpital, détaille le professeur Pierre Hoffmeyer, président de la SFITS. Nous recevons également des apports de sponsors externes, comme un fabricant de prothèses.» Ce vendredi-là, la quarantaine de médecins assiste à une formation organisée par la Société européenne d'orthopédie pédiatrique (EPOS). «Notre objectif est que le niveau d'orthopédie puisse être correct dans toute l'Europe, qu'il y ait un échange de compétence entre les médecins des HUG et les médecins étrangers», explique le professeur Pierre Lascombes, médecin-chef du service d'orthopédie pédiatrique et responsable du cours.
La formation a débuté la veille, avec de la théorie et des exercices pratiques sur deux simulateurs dernier cri. Des membres en silicone et des outils connectés permettent d'attraper sur écran des morceaux de cartilages virtuels. «Peu de centres possèdent déjà ces machines», relève le professeur. Les quatre simulateurs ont coûté 290 000 fr. Après le virtuel, direction la salle stérile pour du quasi réel. «On pratique sur des pièces anatomiques qui proviennent de donneurs suisses exclusivement, précise le président de la SFITS. Le préparateur du laboratoire d'anatomie nous apporte les pièces et surveille les interventions.» Il souligne l'importance de la pratique sur pièce anatomique: «c'est fondamental, c'est la seule manière de s'exercer avec le plus de réalisme possible et de mesurer la difficulté des opérations». Après une première phase d'exercices, le «chairman» – un médecin responsable, micro en main pour être entendu de tous – lance: «Ladies and gentleman, it's time to switch!» Il est temps de changer de tâche. Place à la reconstruction du ligament croisé antérieur. Ça triture, ça suture, ça questionne et ça apprend.
Les médecins viennent de toute l'Europe. Aliette, 34 ans, est de Besançon. Elle a terminé sa thèse il y a trois ans. «On découvre de nouvelles techniques, on s'exerce et on se fait corriger, on crée des liens avec des confrères. C'est une chance.» Neritan Borici, 41 ans, originaire d'Albanie, se considère aussi comme chanceux. Il découvre les techniques les plus récentes et peut pratiquer sur des cadavres. «On n'y a pas accès à Tirana. On apprend en observant les confrères, sur des modèles en plastique. On ne ressent pas les vraies structures de l'anatomie.» Il compte organiser un cours à Tirana pour partager ses nouvelles connaissances.
Une Rolls-Royce nécessaire?
Bénéficier de cette «chance» a toutefois un prix. La formation coûte 600 fr. pour les membres d'EPOS, 1000 fr. pour les autres. Sont compris les deux jours de cours, le logement et les repas. «Ce qui en fait un tarif faible», relève le responsable du cours. Neritan Borici, lui, a réussi à trouver un sponsor. Pas de moyens, pas de formation? «Il est vrai que c'est un problème. Un médecin doit se former de manière continue – il doit acquérir des «crédits» tout au long de sa carrière – et cela a un coût, reconnaît Pierre Lascombes. En général, c'est l'employeur qui assume la plupart des charges mais ce n'est pas le cas dans tous les pays.» Les industries participent aussi. Pour ce cours orthopédique, six entreprises différentes sont partenaires, «elles fournissent notamment du matériel». Qu'en retirent-elles? «Une certaine forme de publicité pour leurs outils.»
Enfin, se pose la question de la nécessité d'un tel centre à Genève. Les moyens de formation dont disposaient déjà les HUG n'étaient-ils pas suffisants? «Il n'y avait pas de centre spécialisé dans la technique chirurgicale en Suisse, répond Pierre Hoffmeyer. Nous avons aujourd'hui l'un des seuls centres de formation académiques qui dispose d'autant de matériel innovant, qui soit public et qui n'appartienne pas à une industrie. Au vu du nombre de réservations, le besoin est bel et bien présent.»
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