Ksenia Sobtchak, énigmatique opposante à Vladimir Poutine
La fille du mentor de Vladimir Poutine est aujourd'hui candidate à la présidentielle. Et se défend d'être un alibi.

Droite dans ses bottes, Ksenia Sobtchak a le parler franc des candidats sûrs de leur coup. Ni les températures polaires ni les questions provocatrices ne l'ont perturbée à Mourmansk. Pour sa visite éclair vendredi dans la légendaire cité portuaire du grand nord russe, la candidate de l'opposition libérale pour la présidentielle du 18 mars a sorti ses plus chaudes bottines noires, fourrées à l'intérieur, brillantes à l'extérieur. Le thermomètre indique -26 degrés. Ksenia Sobtchak paraît sereine, tout sourire sous son bonnet en laine tressée grise.
L'invitée surprise de cette présidentielle prend le temps de partager les problèmes de la vie quotidienne. Longtemps connue pour ses émissions de télé-réalité, habituée des soirées mondaines et des unes de magazines de mode, la jeune femme de 36 ans compatit désormais avec les habitants de Mourmansk: baisse des effectifs d'écoles, pollution, arnaques immobilières, hausse des prix du poisson en magasin.
Poutine l'a connue bébé
Sur le terrain, l'ex «Paris Hilton russe» veut faire oublier les doutes planant sur sa carrière politique depuis que, un pied dans le système, un pied dans l'opposition, elle a semblé franchir le Rubicon en participant aux manifestations anti-Poutine de 2011-2012 puis en devenant la star de Dojd TV, petite chaîne privée indépendante sur Internet. Est-elle aujourd'hui une candidate téléguidée par le Kremlin, opposante rêvée pour Vladimir Poutine, jouant le rôle du contradicteur sans vraiment le mettre en danger? «N'importe quoi!» rejette Ksenia Sobtchak, assurant qu'elle n'a pas parlé au président depuis l'été dernier pour une interview. Son passé familial la poursuit pourtant. Elle est la fille d'Anatoli Sobtchak, premier maire de Saint-Pétersbourg après la disparition de l'URSS, et mentor de Vladimir Poutine.
«Oui, j'ai fait des choses bêtes avant. Mais j'ai changé. Bien plus que ceux vivant du système depuis des années»
Le chef du Kremlin l'a connue bébé et l'a vue grandir mais, assure Ksenia Sobtchak, il n'est pas son parrain. À Mourmansk, elle n'a d'ailleurs cessé de le critiquer ouvertement: la présidentielle n'est pas une vraie élection car, avec une propagande à son service, Vladimir Poutine a gagné d'avance. «Pourquoi se présenter? Pour obtenir un poste en récompense?» l'interpelle un jeune homme dans le théâtre boisé de la Maison de la Culture. Plus de trois cents personnes, petite foule plutôt jeune mais bigarrée dans cette ville de soldats et de fonctionnaires fidèles au pouvoir, sont venues l'écouter. Cette première question provocatrice ne la perturbe pas. «Oui, j'ai fait des choses bêtes avant. Mais j'ai changé. Bien plus que ceux vivant du système depuis des années», répond-elle du tac au tac. À l'aise et sans notes face aux questions, elle a défendu son alternative libérale, déterminée à lutter contre la corruption, réformer le système judiciaire, privatiser l'économie, rétablir de bonnes relations avec l'Ouest.
Pantalon militaire branché
Mourmansk n'a pas été choisi par hasard pour cette virée électorale en ce vendredi 23 février, sacro-saint jour férié en Russie car fête des «défenseurs de la patrie». Pour l'occasion, Ksenia Sobtchak a enfilé un pantalon couleur treillis militaire mais au design branché. Elle a visité la base navale puis a posé un bouquet sur la tombe du soldat inconnu. «C'est important de se souvenir», répète-t-elle lors de ses interventions, notamment à bord du brise-glace Lénine, navire de l'époque soviétique transformé en musée.
«Et il est important de construire désormais des navires militaires à la pointe du progrès technique. On attend depuis longtemps…», rappelle Ksenia Sobtchak dans la salle des commandes du vieux Lénine, ironisant sur les retards de la modernisation des capacités aéronavales du pays. «J'espère qu'ils ne construiront pas nos nouveaux navires comme ils ont bâti notre stade de football à Saint-Pétersbourg», sourit-elle dans une allusion à la corruption derrière le chantier du site de la Coupe du monde en juin. Autant de piques lancées à Vladimir Poutine, chef des armées et chef d'orchestre de ce Mondial. Et autant de preuves de son rôle, encore flou, d'opposante.
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