Jean-Noël Cuénod rend justice aux sorcières
Un jury français distingue la dernière œuvre poétique du journaliste genevois.

«Qui a éteint le feu?» Tel est le titre que Jean-Noël Cuénod a donné au texte poétique qui lui a valu récemment le prix 2019 de l'Académie Renée Vivien. Un texte envoyé à ce cénacle littéraire français sous forme de tapuscrit. Sa publication est prévue à Genève en 2020 à l'enseigne des Éditions des Sables, dirigées par la poétesse Huguette Junod. «Celle-ci a accepté d'éditer mon texte avant qu'il ne soit distingué par ce prix», précise Jean-Noël Cuénod.
«À 15 ans, je lisais la revue «Jeune poésie», fondée par Charles Mouchet»
Longtemps journaliste à la «Tribune de Genève» et correspondant de notre journal et de «24 heures» à Paris, l'auteur de «Qui a éteint le feu?» taquine la muse depuis sa jeunesse. «À 15 ans, je lisais déjà la revue «Jeune poésie», que mon professeur de français et de latin, Charles Mouchet, m'avait fait découvrir. Des poètes genevois réunis sous l'égide d'un exilé républicain espagnol, José Herrera Perete, contribuaient à cette publication. C'étaient Charles Mouchet, Georges Haldas, Jean Vuilleumier, Claude Aubert, Albert Py.»
Jean-Noël Cuénod a suivi leur exemple. Il a écrit, publié et même reçu un prix de poésie en 2017, pour son recueil «État d'urgence», inspiré par les attentats terroristes de novembre 2015 à Paris. Il s'agit du prix des Jeux floraux du Béarn, association qui perpétue la tradition d'un cercle de troubadours du XIVe siècle. Le poète genevois l'a reçu à Montpellier, en même temps que le chanteur nonagénaire Marcel Amont. «Le Prix Renée Vivien me sera remis à Amiens, annonce Jean-Noël Cuénod, car c'est dans cette ville que l'Académie Renée Vivien a son siège. Cette femme était une sulfureuse poétesse parisienne qui avait fait scandale par sa liberté de ton et de mœurs en pleine Belle Époque», indique le lauréat. Née à Londres en 1877 et morte à Paris en 1909, Renée Vivien ne faisait pas mystère de son homosexualité. Ses liaisons successives avec des femmes ont conduit deux d'entre elles à perpétuer sa mémoire à travers l'Académie, fondée en 1935. La première de ces poétesses est Hélène de Zuylen, née Rothschild en 1863, puis après le mort de celle-ci en 1947, Natalie Barney, d'un an plus âgée que Renée Vivien, mais qui vécut jusqu'en 1972. De son vrai nom Pauline Mary Tarn, Renée Vivien était imprégnée d'un esprit libertaire dont Jean-Noël Cuénod se sent proche. «Cet esprit m'a joué des tours à mes débuts dans le journalisme», confie-t-il. «Mes prises de position dans les colonnes du journal anarchiste «La Pilule», fondé par Narcisse Praz, ont provoqué mon exil dans le canton de Vaud. J'ai travaillé trois ans à «La Feuille d'avis de Vevey» avant de pouvoir être engagé à la «Tribune de Genève». «La Pilule» était un hebdomadaire qui a tenu sept ans, imprimé à 10000 exemplaires.»
L'ancien collaborateur de ce brûlot a écrit «Qui a éteint le feu?» alternativement en prose et en vers. Le récit commence devant un âtre glacé: «Sans feu, l'âme est froide comme la peau d'un cadavre, lit-on pour commencer, sans feu, les cœurs se durcissent tellement qu'aucun rayon amical ne peut en sortir ou y pénétrer.» Dès lors, il faut trouver l'Éteigneur! L'or, ce faux feu, est soupçonné. Les mots aussi, mais ils seront épargnés. Et si c'était l'air du temps qui avait refroidi les braises?
En langage cuénodien, «tout le monde personne prisonnier des images et de son nombril», voilà le vrai coupable. Et pour rallumer la flamme, celles qui ont péri par elle dans le passé – les sorcières! ? sont convoquées par le poète. Elles lui font découvrir le Christ-Femme, auquel, comme on sait, le Christ-Roi s'est substitué depuis très longtemps.
«Les hommes ayant épuisé leur virilité dans la stérilité de leurs guerres», les sorcières, à la lumière du Christ-Femme, rallumeront l'indispensable et bénéfique feu de la terre.
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À paraître: «Qui a éteint le feu?» par J.-N. Cuénod, Éd. des Sables
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