«Je suis consultant pour traquer les fraudes»
Hervé Falciani, exilé en Espagne, ne croit pas que son pays d'accueil acceptera son extradition en Suisse, où il a été condamné.

Hervé Falciani a pris part au plus gros vol de données de l'histoire aux dépens de la banque HSBC de Genève. En 2015, le Tribunal fédéral l'a condamné à 5 ans de prisons in absentia. Il est réfugié en Espagne depuis 2013, pays dont la justice doit décider si elle souhaite l'extrader.
Pensez-vous qu'il y a un risque que vous soyez extradé vers la Suisse?
Non, je ne crois pas. La Suisse ayant déjà échoué dans sa demande précédente il y a quatre ans, il n'y a pas de raison que cela change aujourd'hui. Grâce à mon action, des centaines de fraudeurs ont été condamnés. HSBC Suisse a dû payer une amende de 350 millions de francs à la justice française et 40 millions à Genève. Ce sont eux les coupables. La justice suisse fait une erreur en s'acharnant contre moi.
De quoi vivez-vous aujourd'hui? Êtes-vous en difficulté?
Non, je n'ai pas de mal à joindre les deux bouts. Je n'ai pas d'ambition démesurée. Je travaille comme consultant dans le domaine financier. Je fais de la détection de fraudes. Je travaille principalement pour des cabinets de conseils et des multinationales. Ce sont des sociétés du Panama, de Hongkong, d'Espagne… Il y a même des sociétés suisses là-dedans. Je leur permets de régler des conflits d'intérêts et de lutter contre le blanchiment d'argent.
Sinon je travaille bénévolement comme CEO et chef stratégique pour un projet de Blockchain.
Revenons-en à l'affaire des données volées. C'était il y a déjà dix ans… Qu'est-ce qui vous avait motivé à l'époque?
Attention aux termes que vous employez. L'unique condamnation qui n'ait jamais été prononcée contre en moi, en Suisse, se réfère à de l'intelligence économique. C'était avant tout un sentiment d'injustice et d'impunité de la part de la banque qui m'a poussé à agir. Il y avait une forme de mépris envers la majorité des clients qui n'avaient pas de raison d'être exposés. L'information a dépassé ma personne. Vous n'avez qu'à voir les conséquences que les SwissLeaks ont eues partout dans le monde.
Vraiment? Des témoins disent que vous vouliez vendre les données et faire beaucoup d'argent. Votre ancienne petite amie dit que vous êtes allé au Liban dans ce but.
C'est faux. Son récit est inconsistant. Cela voudrait dire qu'elle l'a fait aussi. La justice suisse n'a aucun élément de preuve qui démontre que des données sensibles ont été montrées au Liban. Je n'ai jamais eu ce genre d'informations entre mes mains.
Mais vous êtes quand même allé au Liban pour proposer ces données?
Bien sûr. Sans ce voyage au Liban, il n'y aurait pas eu de processus judiciaire possible. Je voulais déclencher une alarme en Suisse à travers ce voyage. Lorsque j'ai fui en France, les Suisses savaient déjà que j'avais des données et ils ont fait la demande d'entraide à la France. C'est cette demande officielle qui a permis aux Français d'y avoir accès.
La Suisse a produit un acte d'accusation très volumineux contre vous, est-ce pour cela que vous n'êtes pas venu à votre procès?
Non. L'enquête suisse n'a pas été sérieuse. Quand j'ai rencontré des procureurs à Genève avec mon avocat à l'aéroport en 2010, ils étaient très cordiaux. Ils ont essayé de me proposer un accord et une procédure simplifiée. C'était avant que je collabore avec l'Espagne. Je pense qu'ils voulaient étouffer l'affaire.
Vous avez qualifié votre condamnation par le Tribunal fédéral de ridicule.
Je pense que cette décision montre la blessure d'orgueil dont souffre la justice helvétique. Il y a une volonté de réécrire l'histoire en disant qu'il n'y a qu'un criminel, Hervé Falciani. Mais même si je vais en prison, vous pensez qu'on verra la Suisse comme un redresseur de torts? (Rires). C'est une démarche qui me paraît très éloignée de l'intérêt commun.
Est-ce vrai que votre vie était en danger?
Je vous renvoie aux observations faites par le procureur Bertossa lorsqu'il a instruit l'affaire. Il explique les difficultés qu'il a à obtenir des informations, notamment sur les cartels mexicains qui avaient des comptes dans la banque. Toutes les personnes que j'ai exposées ont une dent contre moi. Je suis un risque pour ceux pour qui l'opacité est nécessaire. Je continue d'ailleurs d'être un témoin protégé par les administrations avec qui je collabore.
On a parfois l'impression que vous avez décidé de vous présenter comme un lanceur d'alerte après coup..
Dans ce genre de cas, il y a toujours deux versions de l'histoire. Après chacun se fait son opinion. Je sais ce que j'ai fait et je suis content qu'on parle de mon cas. J'utilise cette publicité pour faire parler de l'antifraude.
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