ÉditorialIl faut protéger la liberté des médias
Le Conseil national votera la semaine prochaine sur une modification de loi visant à faciliter les interdictions de publication dans les médias. Cela mettrait en danger la liberté des médias et donc la démocratie suisse.

«La Suisse reléguée hors du top 10 du classement mondial de la liberté de la presse» titraient certains médias en ce début de semaine, dans le contexte de la journée de la liberté de la presse qui a eu lieu mardi. Reporters sans frontières a publié à cette occasion son classement annuel: sur 180 pays, la Suisse se trouve désormais à la 14e place. C’est insuffisant dans une démocratie directe telle que la Suisse.
«La liberté des médias est un enjeu crucial, en tant que fondement essentiel du fonctionnement de notre système politique.»
Même si de tels classements doivent être pris en considération avec prudence, la liberté des médias est un enjeu crucial, en tant que fondement essentiel du fonctionnement de notre système politique. Les médias indépendants garantissent l’échange d’informations et le débat. Ils sont indispensables à la formation de l’opinion dans une démocratie.
Le danger est bien réel
En Suisse, nous bénéficions d’un paysage médiatique riche et diversifié. Des éditeurs privés forts en traditions aux nouvelles plateformes, en passant par la radio et la télévision financées par la redevance, de nombreux acteurs rendent compte chaque jour de l’actualité régionale, nationale et à travers le monde.
Des représentants des médias de tous horizons se sont alliés de manière unique pour défendre la liberté de la presse, pilier fondamental du travail journalistique. Car le danger d’une restriction est bien réel. Le 10 mai prochain, le Conseil national votera sur un durcissement du Code de procédure civile (CPC). Il s’agit concrètement de l’article 266 intitulé «Mesures à l’encontre des médias». Le Conseil des États ainsi que les Commissions juridiques des deux Chambres préconisent de faciliter l’accès aux tribunaux à celles et ceux qui voudraient faire interdire une publication.
«Un durcissement de l’article 266 du CPC restreindrait surtout le journalisme d’investigation.»
Nous craignons que la diffusion d’un reportage critique puisse être stoppée précipitamment. Aujourd’hui déjà, les personnes concernées peuvent obtenir la non-publication d’articles rédactionnels, à condition toutefois que le dommage allégué soit d’une certaine gravité. La formulation actuelle de la loi a été décidée avec soin et elle prévient une atteinte disproportionnée au travail journalistique. Au contraire de la modification envisagée qui briserait un système qui a fait ses preuves dans la pratique depuis de nombreuses années.
Un durcissement de l’article 266 du CPC restreindrait surtout le journalisme d’investigation, qui est celui qui remplit précisément une importante mission de contrôle dans notre démocratie et contribue ainsi à l’ordre social. Mardi prochain, le maintien de la liberté des médias suisses sera entre les mains de nos Conseillères et conseillers nationaux. Ils peuvent la préserver en refusant la modification du Code de procédure civile.
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