Littérature romandeEric Bulliard ressuscite une cabine téléphonique du désert
Le Fribourgeois, en rencontre dans le cadre du Prix des lecteurs de la ville de Lausanne, raconte avec brio le curieux destin de la Mojave Phone Booth.

Un téléphone perdu en plein désert qui devient le centre du monde. C’est l’étonnant destin de la Mojave Phone Booth, qu’Eric Bulliard fait revivre dans son deuxième roman, «La cabine» (Éd. de L’Hèbe), sélectionné pour le Prix des lecteurs de la ville de Lausanne. Le Fribourgeois, journaliste culturel pour «La Gruyère», s’est inspiré d’une histoire vraie. Celle de cet appareil aujourd’hui démantelé, qui a longtemps sonné en plein désert de Mojave, en Californie, près des frontières avec l’Arizona et le Nevada.
La ligne avait été installée pour les travailleurs d’une mine après la Seconde Guerre mondiale. Une fois celle-ci fermée, la cabine est restée debout, parfaitement fonctionnelle, oubliée de tous sauf de quelques habitants du désert. Or voilà qu’apprenant son existence, un jeune idéaliste des environs de Phoenix la localise, puis révèle au monde son existence – et son numéro – par la grâce des débuts d’internet.

Dans cette réserve naturelle du désert de Mojave «où les serpents sont chez eux», observe l’un des personnages du roman, s’élèvent soudain des sonneries venues de partout. L’on s’y presse pour répondre à des appels qui arrivent du monde entier. Tout le jour, et parfois toute la nuit.
«Absurdité poétique»
Eric Bulliard raconte avec verve cette histoire qui l’a fasciné par son «absurdité poétique totalement fascinante». On y vit l’aventure de Rod, héros attachant et aventurier du web balbutiant inspiré par Godfrey Doc Daniels, le vrai découvreur de la cabine. Avec lui, on hume ce désert d’altitude à la température un peu plus supportable qu’à Phoenix par exemple, on y approche cette immensité de toutes les excentricités, ce sable qui enlise les roues, ce ciel dégagé sur les étoiles et ces «Joshua Tree», arbres à la forme emblématique de ce bout de pays, dont l’un veille sur la cabine.
Le roman tient du road-trip, mais va plus loin. Il se fait ode à l’audace des rêveurs comme Rod, hanté par l’idée d’une communauté utopique dont il a même écrit la Constitution, et documente aussi ce monde d’avant internet, alors qu’il est en passe de changer irrévocablement. Après la ruée vers l’or, l’aventure de la Mojave Phone Book tient de la dernière conquête de l’ouest avant l’hyperconnexion. Car appeler dans le désert, c’était alors un peu comme téléphoner sur la Lune.
Lausanne Palace
Samedi 22 octobre à 11 h
Entrée libre sur inscription via le lien sur le site
lausanne.ch/prixdeslecteurs
«La cabine»
Eric Bulliard
Éd. de l’Hèbe, 220 p.
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