Elon Musk est l’un des entrepreneurs-innovateurs les plus connus au niveau mondial. Après Tesla, il développe SpaceX. Son rôle est crucial du point de vue de l’information stratégique et de sa diffusion pendant la guerre actuelle en Ukraine. Grâce à plusieurs milliers de satellites, son programme Starlink permet de maintenir l’internet presque partout sur la planète, et notamment en Ukraine.
Cette maîtrise technologique de l’information est précieuse pour les applications civiles ou militaires. Pourtant, Elon Musk est encore plus connu ces dernières semaines pour le rachat de Twitter. Ce rachat en cours de finalisation lui coûterait 44 milliards de dollars! L’une des acquisitions les plus onéreuses de l’histoire récente! Un débat majeur s’en est suivi autour de Twitter… et du contrôle sous-jacent de l’information.
En fait, il y a plusieurs perspectives liées à un tel contrôle. D’abord, un contrôle technologique: Starlink achemine l’information, Twitter est une plateforme technologique. Ensuite se pose la question primordiale de la ligne éditoriale de l’information. Elon Musk veut relancer une «liberté totale d’expression» sur Twitter.
La Commission européenne l’a mis en garde sur les nécessaires modérations qu’il devra continuer à faire, sous peine d’être fortement sanctionné, voire exclu du marché européen. Il doit notamment continuer à éliminer toutes les informations outrancières, complotistes et autres «fake news». On touche ici un domaine infiniment sensible.
Le contrôle de l’information peut-il devenir excessif dans des démocraties? Le principe éditorial d’une liberté totale est résumé à travers un tweet d’Elon Musk lui-même: «J’espère que mes pires critiques pourront rester sur Twitter, car c’est cela la signification de la libre parole», tweet du 25 avril 2022.
Cela rappelle un ouvrage célèbre, celui de John Milton, «Areopagitica», paru en 1644, qui a pour sous-titre «Un discours de M. John Milton au Parlement d’Angleterre pour la liberté sans entraves de l’édition». Cet ouvrage est considéré comme une base incontournable de la liberté de la presse et des médias. Il a permis de rompre avec l’absolutisme qui contrôlait l’information, moins d’un siècle avant, sous Henri VIII en Angleterre.
John Stuart Mill considérera au XIXe siècle que plus il y a de liberté sur le marché des idées, plus il y a de compétition des idées, et, finalement, plus les idées néfastes et stupides sont naturellement éliminées. En d’autres termes, on arrive à un paradoxe: la liberté totale de l’information est peut-être celle qui est la meilleure barrière contre les thèses complotistes et autres «fake news», qui préfèrent se répandre dans une semi-obscurité.
Un MOOC (cours en ligne) de l’Université de Genève que nous venons de réaliser propose d’approfondir les enjeux des médias, et notamment les enjeux éthiques. En effet, la complexité du débat mérite encore bien des approfondissements, tant la liberté de l’information est un bien précieux et fragile à cultiver. On risque soit de l’étouffer par un contrôle excessif, soit de laisser les mauvaises herbes envahir le terrain par manque de surveillance…
Ce MOOC sera prochainement accessible à l’adresse https://moocs.unige.ch/offre/cours-ouverts. Le fichier joint est aussi actualisé.
* Fondateur de Medi@LAB-Genève, UNIGE
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Planète Réseaux – Elon Musk et la liberté de l’information