Sorties disquesDire adieu à ses oreilles
Slipknot revient, Björk aussi! Et Arno salue l’automne d’outre-tombe. Nos coups de cœur.
Slipknot

Avec l’âge, les pires crapules s’assagissent, sauf quand elles se prénomment Vladimir. Dans le cas de Slipknot, on est bon, les zozos encagoulés et numérotés de Des Moines, Iowa, dont on a cessé de relever le décompte au fil des ans et des morts, affichent tous de bons patronymes «made in USA» et une musique pas moins musclée. On les avait aimés pour leur extrémisme absolu, mettant un pied aux fesses du new metal moribond (plus vite, plus fort, plus méchant); on les observe ici avec une attention polie dans leurs habits plus civilisés, dont une intro quasi-pop avec ses touches de piano et la voix de Corey Taylor plus huilée que jamais. On préfère nettement quand Slipknot reprend son gros gourdin et tape comme un imbécile très heureux la rythmique meurtrière de «Hive Mind», au hasard. Il ne faut pas renier sa nature.
Arno
Début 2022, Arno se sait condamné. Il rassemble ses dernières forces et ses fidèles musiciens pour donner une poignée de concerts et pondre un ultime album à vitesse grand V. Le 26 mars, il en achève l’enregistrement à Bruxelles. Il meurt le 23 avril. Le disque, sorti cette semaine, revêt donc fatalement une dimension douloureuse, même si la musique qu’il abrite, ébouriffée, vigoureuse et électrique, ne frôle jamais le pathétique. Certes, on sent bien le gosier rocailleux du Flamand un peu las sur certains passages. Certes, la faucheuse plane çà et là dans les textes. Mais l’humeur reste frondeuse. Point d’orgue: le truculent duo avec Mireille Mathieu sur une version electro-reggae de «La Paloma». Il faut l’ouïr pour le croire. Comme si Arno nous adressait un dernier clin d’œil depuis l’au-delà.
Björk
La stature pop de Björk ne fait aucun doute, même si sa musique ne relève pas forcément des chansons à boire. Sorte d’extraterrestre bohémien de luxe, l’Islandaise a quitté depuis longtemps le rivage des rengaines aux formes reconnaissables pour souffler l’inconnu de sa voix de geyser. Trois mois après son concert à Montreux, la chanteuse sort une collection de treize titres qui réunissent des qualités souvent dissociées par le passé. Inspiré par la mort de sa mère en 2018, «Fossora» ne se vautre pas dans les petits cocons parfois affectionnés par la fée mûre et ne se jette pas non plus dans des épopées mystico-cosmiques. Entre la brutalité des percussions électroniques et la finesse d’arrangements orchestraux, Björk fait à nouveau valoir sa voix d’une puissance organique envoûtante, résolument mise en avant. Champignon!
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