Derrière les prix cassés, la face cachée du low cost
Deux Vaudois se sont offert un séjour à Ibiza. EasyJet leur a proposé des places à 2 fr. 45. Ces tarifs révèlent une concurrence acharnée sur les court-courriers

Las des rigueurs de l'hiver, un couple de Vaudois éprouvait un besoin de soleil. Comme tant d'usagers prudents de Genève Aéroport, ces deux voyageurs ont consulté au plus vite les offres de la compagnie EasyJet. Le 4 mars, ils ont acheté des places sur un vol Genève-Ibiza du 30 mai et un vol Ibiza-Genève du 1er juin, proposés par cette compagnie. A l'aller, le vol est facturé 15fr45 par personne. Au retour, ce sera 2fr45 par personne, même pas le prix d'un ticket de bus!
Il faut y ajouter des frais administratifs: 22 francs en tout. Divisé par quatre, cet émolument ne majore chaque place, sur chaque vol, que de 5fr50. Les prix du low cost tombent donc parfois incroyablement bas.
Le cas est évidemment extrême, le prix des sièges dans une cabine d'avion augmentant en fonction de la demande et du taux d'occupation, selon les règles du yield management(gestion tarifaire des capacités disponibles) prévalant dans le transport aérien. Les deux Vaudois ont donc probablement acheté assez tôt leurs billets pour être parmi les tout premiers passagers du vol du 1er juin Ibiza-Genève, à moins que les Baléares n'attirent peu de vacanciers avant l'été.
Même en tenant compte de toutes les explications possibles, le billet d'avion acheté le 4 mars par les deux voyageurs vaudois constitue un véritable «incident tarifaire». Il illustre la concurrence acharnée sévissant actuellement sur le marché des vols court-courriers en Europe occidentale. Des vacanciers de La Côte ont ainsi bénéficié de prix n'apparaissant guère que dans les publicités de la compagnie d'aviation irlandaise Ryanair, connue pour sa redoutable agressivité en marketing.
Evolution impitoyable
Cette plongée des tarifs renforce l'affaiblissement déjà bien avancé des rendements dans les court-courriers. Les compagnies traditionnelles ne s'en sortent plus vraiment. Lufthansa et Air France/KLM s'efforcent d'élaborer leurs propres concepts de compagnies low cost. Sans grand succès. International Consolidated Airlines Group (société espagnole, propriétaire de British Airways) semble avoir réussi une meilleure opération avec l'acquisition du transporteur low cost catalan Vueling Airlines.
L'évolution en cours s'annonce impitoyable. Air France/KLM et Lufthansa se trouvent confrontées à des grèves extrêmement coûteuses en tentant de réduire progressivement leurs charges salariales. Dans le même temps, le champion scandinave de l'aviation à bas coût, Norwegian Air Shuttle, innove au détriment du personnel: il recrute des pilotes et des hôtesses de l'air en Extrême-Orient, sur la base de contrats à durée déterminée permettant de gérer ses effectifs avec un haut degré de flexibilité.
Sous-traitances prometteuses
Dans ce contexte, le patron de Ryanair, Michael O'Leary, prépare l'avenir. Il démarche les plus grandes et les plus anciennes compagnies européennes pour leur proposer un nouveau partenariat: «Travaillez avec nous sur les court-courriers! Ensuite vous perdrez moins d'argent et je serai moi-même confronté à moins de concurrents.» Le pionnier irlandais du low cost, fondé en 1985, dispose il est vrai d'une carrure à la hauteur de ses ambitions. Avec 119 millions de passagers sur un an, Ryanair se profile désormais comme le plus grand transporteur aérien sur le Vieux-Continent.
Dans ce contexte, Michael O'Leary évalue que Lufthansa et Air France/KLM lui donneront des vols court-courriers en sous-traitance d'ici à cinq ans déjà. Il est vrai que les compagnies dites low cost, selon le consultant parisien Wavestone, opèrent avec des coûts fixes souvent inférieurs de plus de 60% à ceux de leurs consœurs traditionnelles en Europe. Ces dernières, simultanément, remplissent 30% à 60% des sièges de leurs long-courriers avec des passagers acheminés par des vols d'apport, selon le cabinet américain de conseil A.T. Kearney. Autrement dit, des court-courriers en majeure partie.
----------
Les prix les plus bas au départ de Genève Aéroport
Au début du mois, EasyJet a gratifié des voyageurs vaudois de tarifs proprement renversants (lire ci-dessus). Ces derniers demandent cependant quelques précisions. Les deux vacanciers n'ont pas à proprement parler payé deux places à 15,45 francs chacune, puis deux autres à 2,45 francs chacune, tout en s'acquittant de quatre émoluments administratifs, à hauteur de 5,50 francs chacun. Tous ces chiffres sont en fait les éléments constitutifs d'une réservation unique pour deux personnes voyageant ensemble.
«De tels tarifs demeurent néanmoins rares. Ils découlent de différents paramètres, mais ne constituent pas pour autant des changements dans les systèmes de tarification en vigueur chez les transporteurs aériens», nous indique une source proche de la branche. EasyJet nous éclaire d'ailleurs sur ses prix, aussi assumés qu'officiels. Ils ont été calculés jeudi, en fonction de billets destinés à deux passagers voyageant sur la même réservation. Comme ceux de nos deux informateurs vaudois, bientôt en partance pour Ibiza. Le prix le plus avantageux au départ de Genève Aéroport, toutes routes confondues, portait sur la destination Luton, proche de Londres et où se trouve le siège du transporteur fondé en 1995: 16,90 francs pour un aller simple. EasyJet indique en outre que pas plus de seize sièges n'étaient disponibles à ce tarif-là.
Ces données évoluent toutefois en permanence. Les tarifs indiqués, à titre d'exemple, évoluent donc eux-mêmes en tout temps.
A l'intention de tous les Romands, amateurs de plages baléares, le meilleur prix pour Ibiza s'élevait à 26,90, avec vingt sièges disponibles à ce prix-là. Pour un retour, Ibiza-Genève, calculé également jeudi pour deux personnes voyageant sur la même réservation, le tarif chutait même à 10,90 francs, avec trente-neuf places disponibles.
Chez le grand rival d'EasyJet à Genève Aéroport, Swiss International Air Lines, la grille tarifaire contient aussi de réels atouts. Sans indiquer de destination, la compagnie bâloise évoque son vol en Europe le meilleur marché: la place coûte 39 francs pour un aller simple. En considérant son unique destination dans les Iles Baléares au départ de Genève Aéroport, Swiss propose un aller simple à destination de Palma de Majorque pour 39 francs et un aller-retour pour 79 francs.
En toute transparence, EasyJet dévoile aussi son prix le plus élevé, calculé jeudi pour un aller simple au départ de Genève Aéroport, toutes routes confondues. Cet élément, susceptible de constituer lui aussi un argument commercial porteur, concernait les destinations Tenerife et Tel-Aviv. Le prix à payer sur ces routes s'élevait à 650,90 francs pour deux personnes voyageant sur la même réservation. Avec 104 places disponibles pour la première ville et 53 pour la seconde.
Au départ de l'EuroAirport de Bâle, les tarifs d'EasyJet grimpent encore plus haut: jusqu'à 777.90 francs jeudi, pour deux personnes voyageant sur la même réservation, à destination de Porto ou de Tel-Aviv. P.R.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.