Sorties livres, BDDe l’odyssée d’Ulysse à celle de Jankélévich
Buller dans la mythologie grecque, étudier la philosophie moderne, causer polar comme au temps de Frédéric Dard: ce week-end pluvieux n’est pas pour les mauviettes.
Petit cours pour redescendre de l’Olympe

Les cancres tresseront des lauriers à la professeure Catherine Mory et son acolyte Philippe Bercovici, eux qui vulgarisent en douceur des matières a priori rébarbatives. Sous le trait mariole de ce vétéran de la BD, ancien de Spirou formé par Raoul Cauvin, la littérature française, la gastronomie, la science ou le Moyen-Age se transforment en histoires truffées d’anecdotes et de gags, recadrées avec sérieux par sa consoeur.

Sur le terrain de la mythologie grecque, les compères se royaument de Narcisse et la nymphe Echo aux travaux d’Hercules ou au voyage d’Ulysse. Les dieux descendent de leur piedestal académique, les hommes les suivent au petit trot. Sans complexe, l’humour délire façon «Arrête ton char» et autres locutions familières. Mais c’est un début. De quoi réviser avec bonheur et créer des vocations.

«L’incroyable histoire de la mythologie grecque»
Mory et Bercovici
Ed. Les Arènes BD, 307 p.
Un polar de durs à cuir comme au temps de Simonin ou d’Audiard

Taillé comme Lino Ventura, Guy Roussel est surnommé le Grizzli. Un sobriquet que cet ancien voyou et ex-boxeur ne doit pas qu’à sa pilosité généreuse. Quand un de ses potes se fait menacer par un malfrat mal embouché, l’animal sort ses griffes…

Coup d’œil dans le rétro avec le premier tome d’un néo polar teinté d’humour. A la plume du «Grizzli», Matz, l’auteur de la série «Le tueur», trouve son inspiration dans la France des années 60. Il ressort des placards des truands à l’ancienne, aux costumes mieux taillés que la morale. Ces machos durs à cuire fument comme des sapeurs et manient l’argot comme dans les meilleurs dialogues d’Albert Simonin, Frédéric Dard et autre Michel Audiard.
Au dessin, Fred Simon image avec bonheur les Citroën DS et les nappes Vichy des sixties. Son style semi-caricatural contraste agréablement avec la noirceur de cette excellente histoire.
«Le Grizzli»
Matz et Fred Simon
Ed. Dargaud, 64 p.
Vladimir Jankélévich, cet apatride de la philosophie

Les formidables Cahiers de l’Herne se consacrent à Vladimir Jankélévitch (1903-1985). La plateforme est idéale pour explorer l’univers de cet «apatride philosophique», fureter dans son butin de «Je-ne-sais-quoi et Presque-rien».

Élève de Bergson, ce décortiqueur de concepts à l’ironie mordante se doublait d’un musicologue passionné. Sa pensée mixe comme un DJ des idées qui veut prendre le monde sur le fait, débusquer l’extraordinaire complexité du réel. Chez ce Russe, note Jean-Philippe Pierron, un traité de vertus se déchiffre comme une partition, l’éthique donne à entendre sa petite musique, la morale ne se fige pas, bruissant dans les notes d’une «apparition disparaissante». Il faut relire ses pages sur Rachmaninov, l’écouter se moquer des snobs, vanter la clarté contre l’obscurantisme.
«Jankélévitch»
Collectif
Éd. de l’Herne, 293 p.
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