Selon l’art. 10 al. 1 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu’elle n’est pas condamnée par un jugement entré en force. Aux termes de l’art. 6 § 2 CEDH, toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. La doctrine enseigne que «la détention provisoire porte atteinte à la présomption d’innocence car, présumée innocente, il ne paraît pas admissible de priver la personne poursuivie de sa liberté avant tout jugement sur sa culpabilité».
Dans les crimes de sang, toutes les lois sont respectées et suivies à la lettre, raison pour laquelle il est rare que des innocents soient victimes d’un acharnement judiciaire injustifié. C’est tout le contraire qui est appliqué dans les affaires pénales relatives à la criminalité financière (la corruption et le blanchiment d’argent). La présomption d’innocence fait figure pâle devant son antonyme; la présomption de culpabilité, que certains procureurs au comportement de justiciers chérissent tant.
Dans ce domaine, il arrive fréquemment que la justice range les principes de droits dans le placard, pour sortir des ténèbres les outils de persécution et de torture. Dès que saint Google met en avant des rumeurs de corruption concernant un client d’une banque suisse, non-résident en Suisse, les responsables de compliance de la banque le dénoncent à MROS (Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent), qui effectue un premier filtrage, avant de transmettre environ 25% des dénonciations aux autorités pénales, qui se chargent par un battement de cils de ruiner l’existence du client, sa réputation, ses affaires et la quiétude de sa famille.
«Les lignes commencent à bouger, puisque le Tribunal pénal fédéral a admis récemment dans une grande affaire que la confiscation des comptes viole la présomption d’innocence.»
En effet, dès qu’il entre en matière, le procureur commence par provoquer un drame en bloquant les avoirs bancaires du client au niveau des transferts sortants. Avant d’enquêter, sans même savoir si l’activité médiatiquement incriminée du client aurait un quelconque rattachement à la Suisse. Parfois il demande à la banque de ne pas informer le client! La justice de certains cantons se considère comme supérieure et mieux placée pour poursuivre, que les autorités du pays où le client et son activité sont ancrés. Le client doit prouver son innocence dans une longue procédure, au prix de sa déprime et d’énormes honoraires d’avocats, pour démontrer que les rumeurs véhiculées par internet ne sont que des rumeurs. Les autorités suisses omettent que selon la loi, le fardeau de la preuve incombe à la partie poursuivante.
Donc, 75% des dénonciations sont de trop, ce qui démontre que la peur préside à la réflexion chez beaucoup de décideurs dans les banques.
Heureusement que les lignes commencent à bouger, puisque le Tribunal pénal fédéral a admis récemment dans une grande affaire que la confiscation des comptes viole la présomption d’innocence. En espérant que le TF, sous la houlette de son nouveau président Yves Donzallaz, libre de l’influence des partis politiques, enlèvera bientôt des mains des procureurs cet instrument cruel, qui est le blocage de comptes bancaires des présumés innocents.
*Gérant de Hanna Family Office Sàrl
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L’invité – Présumé coupable jusqu'à preuve du contraire