Culture populaireComment le «Top Gun» de 1986 est devenu culte
Marquant pour plusieurs générations, l’aventure des pilotes de la Navy et surtout ses images sont restées dans les esprits.

Le «Top Gun» de 1986, c’est un son qui consacre le triomphe du synthé et des émotions faciles. C’est aussi un scénario simple, des personnages immédiats et peu complexes qu’on pourrait finalement décalquer dans n’importe quel milieu: scolaire, hospitalier ou policier. Si la nostalgie permet d’expliquer qu’on s’y rattache facilement quelques décennies plus tard, c’est un mélange d’éléments – certains totalement dépassés, d’autres encore vivants – qui permettent de se replonger dans une réalité d’un autre temps.
Dès lors, pourquoi ce blockbuster hollywoodien typique a-t-il à ce point atteint le statut de film culte? Et avec une telle rapidité? Car le succès a été immédiat. Pour les producteurs comme… pour l’armée américaine, qui a vu le nombre de candidats potentiels à ses écoles de pilote se multiplier par cinq. Il se dit d’ailleurs que l’US Navy n’a pas hésité à installer des stands de recrutement aux portes de certaines salles obscures. Le rapport à la guerre n’était pas le même qu’aujourd’hui.
Les images
Du soin apporté par le réalisateur aux jeux de lumière à différents endroits: à commencer par le tarmac ou par le porte-avions sur l’océan. À ce niveau, Tony Scott est parvenu à esthétiser mieux que personne avant lui des armes de guerre. Les pilotes en uniforme deviennent, grâce à une photographie californienne et sportive, des figures attirantes. Filmés de près, transpirants, jeunes, faillibles, et ce dès les premières minutes. Bref, humains, ils se débarrassent du cliché du pilote à particule des deux guerres pour en prendre un autre. Ils nous ressembleraient presque, non?
Esthétisation des corps aussi. Plus besoin de décrire la fameuse partie de beach-volley, presque huilée. Quant à l’inévitable scène d’amour avec Kelly McGillis, elle doit beaucoup à son tournage différé de plusieurs semaines, pour lequel il a fallu masquer les acteurs derrière un contre-jour. Là, la gamme chromatique était passée du soleil californien au bleu de nuit.
Les objets
«Top Gun» réussit à devenir un film d’aviation dans lequel ce ne sont pas les jets qui sont au centre des plans. À tel point que lors du tournage de l’opus 2022, Tom Cruise passera son temps, avec le producteur Christopher McQuarrie, à essayer d’enlever ou d’ajouter des références au film original. Ces références? Dans un contexte qui n’est plus le nôtre, blouson à patchs, Ray-Ban et moto sans casque vont former une sorte de trinité déclinable à l’unité.
La moto, paradoxalement loin des modèles de légendes, se chevauche en bord de piste, cheveux au vent, en concurrence avec un avion de chasse au décollage. Irréaliste. Mais une idée de liberté, «d’ivresse de la vitesse», finalement reproductible pour quiconque a une bicyclette et un aérodrome à proximité.
Les Ray-Ban, modèle en voie de disparition, font la paix avec l’image du pilote allié de 1945. On découvre qu’on peut les porter en intérieur, en ville, dans un bar, en jouant au volley ou en draguant au piano. Un style, de nouveau.
Le blouson. Veste de vol «G-1» avec son col mouton, qui tire ses origines dans les années 40. Elle est encore distribuée quarante ans plus tard dans la Navy et Tom Cruise va lui redonner une popularité certaine en la montrant hors du cockpit, par-dessus un simple t-shirt ou polo blanc, à une époque où le Pentagone n’a pas encore réduit le nombre de patchs portés comme des états de service, à l’image des plaquettes métalliques d’identité autour du cou.
Accessibles, à nouveau, pour nombre d’ados qui finiront par casser leur crousilles. Finalement, c’est peut-être aussi ça qui reste.
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