HumourCinzia Cattaneo, la touche féminine du stand-up genevois
Depuis trois ans, la jeune femme, qui peaufine en ce moment un nouveau spectacle, a réussi à se faire un nom dans un milieu très masculin. Portrait.

Dans le milieu du stand-up genevois, cherchez la femme. Sans exagérer, celles-ci ne sont pas légion. Mais Cinzia Cattaneo a réussi à s’y faire un nom. Et à séduire le public avec de l’humour mélangeant stand-up, prise à partie des spectateurs et sketches. Si tout va bien, elle reprendra le chemin de la scène et dévoilera son nouveau spectacle, qui n’a pas encore de titre, en janvier. Mais comme la plupart des humoristes qui font du stand-up, Cinzia Cattaneo a vécu une année 2020 un peu compliquée. «J’ai pu faire quelques dates au Caustic Comedy Club en juin, confie-t-elle en buvant un thé, lors d’une des rares journées récentes où l’on pouvait encore sortir sans que les mesures sanitaires ne nous entravent. Six dates pour être précise. Ce qui permet aussi de peaufiner un spectacle qui varie beaucoup et va continuer à évoluer. En août, septembre et octobre, il y a encore eu des live avec thèmes imposés et quatre humoristes qui se succèdent. C’était stimulant, ne serait-ce que parce que cela nous force à sortir de notre zone de confort. Il y a des soirs où on arrive à obtenir un vrai dialogue entre soi et le public.»
On l’aura compris, Cinzia Cattaneo, 24 ans, n’est pas du genre à baisser les bras et serait même plutôt une battante. «Je suis aussi la seule fille qui ait gagné Morges-sous-Rire. Mon secret? Je dirais que je suis assez fidèle à moi-même, que je ne joue pas de rôle, que je suis sincère et généreuse et que je n’ai pas peur de montrer ma vulnérabilité. Et c’est vrai que j’aime bien interagir avec le public.» Dans un stand-up majoritairement masculin, les filles sont rares. On en trouve en revanche énormément dans l’impro. «Mais c’est un monde masculin depuis toujours. Quand on fait des plateaux, au début, et qu’on n’est pas connue, on est moins considérée, c’est évident. Il peut même y avoir une ambiance vestiaire de foot. On me faisait parfois des gags qu’on n’aurait pas osé faire devant une Marina Rollman. Aujourd’hui, ça va mieux. Il y a trois ans, il y avait aussi moins d’humoristes. Tous ceux que j’ai connus et qui m’ont soutenue, comme Marina Rollman justement, ou Thomas Wiesel, ont été extrêmement bienveillants. Mais c’est vrai que cela reste plus difficile pour une femme, comme partout.»
Un an à Londres
Chez Cinzia Cattaneo, la passion de faire rire et de se produire sur scène ne date pas d’hier. «Je fais du théâtre depuis toute petite. J’ai d’ailleurs débuté à l’école et dans la même classe que Thibaud Agoston, qui comme moi vient de Veyrier (ndlr: nous lui avions consacré un portrait dans notre édition du 4 juin 2020). Plus tard, je me suis inscrite au Théâtre du Loup jusqu’à mes 16 ans, puis enfin au Conservatoire de Genève. Dans l’intervalle, j’ai obtenu ma matu, puis ai vécu un an à Londres, avec l’envie de faire du théâtre là-bas. Pourtant, je suis revenue et j’ai même commencé médecine à Neuchâtel. C’était une période curieuse, j’écrivais des blagues le soir. Jusqu’au jour où j’ai annoncé à mes parents que je voulais faire de la scène. Depuis, ils me soutiennent entièrement. Et puis en faisant une balade, je suis tombée un jour par hasard sur l’humoriste Arnaud Tsamère. J’y ai vu un signe. Ma mère a ensuite pris les devants pour que je participe au «Banane Comedy Club» (ndlr: un tremplin d’humour) en envoyant une vidéo. J’ai été sélectionnée et c’est là que tout a démarré. Puis j’ai joué régulièrement au KéMedy, avec notamment Kévin Eyer et Mehidin Susic, qui s’y produisent souvent. En trois ans, tout est allé assez vite. D’autres artistes romands m’ont soutenue, comme Marina Rollman, que je cite encore, et qui m’a laissée plusieurs fois faire sa première partie.»
Tout ce que Cinzia Cattaneo écrit, elle le teste ensuite devant un vrai public, sur un plateau. «Je m’enregistre avant au téléphone, afin d’obtenir un effet ping-pong. Mais j’ai en général déjà mes axes et ma ligne.» Depuis plusieurs mois, elle doit pourtant se contenter de patienter. «Comme tant d’autres, je ne sais pas vraiment où je vais. Jouer, c’est ce qui me rend heureuse. Idéalement, si je pouvais jouer mon spectacle à Paris, ou Bruxelles, voire faire une tournée, je serais comblée. En attendant de reprendre, je fais des capsules pour la RTS, avec Bruno Peki (ndlr: on a parlé de lui dans ces colonnes). Cela permet d’oublier le fait que je ne joue pas. Sinon, je suis toujours étudiante, à l’Uni, en histoire de l’art et cinéma.»
«La chance d’être bien entourée»
Aujourd’hui, elle constate une évolution dans ce qu’elle fait. «Lors de ma première année, j’étais encore dans le pur sketch. La deuxième, je me suis créé un personnage qui s’appelait Sylvie. Enfin, l’an passé, je ne faisais plus que du stand-up. Cela dit, je n’ai pas toujours été à l’aise dans ce milieu. Je n’y ai véritablement ma place que depuis quelque temps. Au début, je ne me sentais pas toujours légitime, surtout lorsque je faisais des plateaux avec Thomas Wiesel ou Yoann Provenzano. Aujourd’hui, je ne me dis plus du tout cela. Mais j’ai eu la chance d’être bien entourée.»
Du côté des influences, Cinzia Cattaneo avoue qu’elle a en tout cas deux modèles. Gad Elmaleh et Florence Foresti. «Mais le premier m’a déçue quand j’ai appris qu’il a plagié des humoristes américains. Je ne paierais plus ma place pour le voir. Florence Foresti, je reste une très grande fan. Mais avec beaucoup d’autres. Et il y en a dans les nouvelles générations. Comme Paul Mirabel ou Fanny Ruwet, qui est Belge. Ils méritent vraiment d’être découverts.»
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