
Founex (VD), 23 janvier
Oui, je suis un cycliste. Mais non, je ne suis pas extrémiste. Et pourtant… J'ai tapé du poing sur le toit de voitures garées sur la piste cyclable. J'ai exprimé vulgairement mon agacement face à des piétons qui traversaient la route au feu rouge ou en dehors des passages prévus pour eux. J'ai montré un doigt en particulier afin d'illustrer mon irritation lorsqu'un véhicule me coupait la priorité.
Par ailleurs, en me confrontant verbalement avec d'autres usagers de la route qui avaient volontairement ou non mis ma vie en danger, j'ai compris que cela ne servait à rien. Bien que les personnes concernées, dans les situations auxquelles je pense, étaient entièrement et indubitablement en tort, elles m'ont toutes, à quelques rares exceptions, invectivé lorsque j'ai osé émettre un reproche, pourtant initialement formulé de manière polie.
Après chaque altercation, au-delà du sentiment d'incompréhension et de révolte, je me sentais systématiquement mal tout en ayant l'impression que ces échanges étaient parfaitement contre-productifs. Alors, j'ai décidé de changer. Pour voir. Pour tester. Pour expérimenter le changement et ses conséquences, avérées pour moi comme potentielles pour autrui. Pour ce faire, j'ai décidé d'inverser la tendance, si je puis dire, en partant du postulat qu'il était inutile de me fatiguer à critiquer, de quelque façon démonstrative que ce soit, les comportements dangereux (si ce n'est encore, je l'avoue, par un léger mouvement de tête difficilement réprimable dont la compréhension est largement partagée).
J'ai donc choisi l'attitude opposée en privilégiant la stratégie de la gratification de tout comportement exemplaire, comportement qui parfois se limite au fait de ne pas mettre ma vie en danger, par exemple en m'octroyant la priorité qui m'est légalement due ou en me dépassant avec la distance de sécurité adéquate. Dans ces cas-là, je lève ostensiblement la main et je baisse la tête, en signe de remerciement. Parfois, je souris, simplement. C'est étonnant ce qu'un sourire peut faire. Dans le remerciement comme dans l'excuse d'ailleurs. Une personne qui commet une erreur mais qui sourit en la reconnaissant, d'un sourire désolé généralement accompagné d'un petit mouvement de la main, peut aisément désamorcer une situation conflictuelle.
Ne sous-estimez jamais la force d'un sourire. Et n'oubliez pas que l'erreur est humaine et que nul n'est à l'abri d'en commettre une. J'ai changé. Je me sens mieux. Essayez, juste pour voir, car cette méthode est aisément transposable à d'autres situations et contextes. Et, dans le pire des cas, vous n'aurez pas souri pour rien. Vous aurez souri pour vous.
Jérome Blanc
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Lettre du jour – Ce qu’un sourire peut faire…