Carouge statufie Titeuf dans un préau, à l'endroit même où il a vu le jour
Le héros de Zep a son bronze au cœur de la Cité sarde. Exposition en prime.

C'est sa maîtresse d'école, Mademoiselle Biglon, qui doit en tirer une drôle de tête. Tcheu! Voilà Titeuf statufié, là même où il a commencé sa carrière de cancre, dans le préau de l'école Jacques-Dalphin à Carouge. «Je n'aurais jamais imaginé ça», confie Zep, présent jeudi au vernissage, en compagnie notamment de son éditeur, Jacques Glénat, de la maire de la Cité sarde, Stéphanie Lammar et de centaines d'élèves ravis de côtoyer l'auteur de leur idole. Ému, mais heureux, le dessinateur genevois, entre trois selfies et deux (cent) dédicaces. «Avec les personnes réelles, ce genre d'hommage possède toujours un petit côté mausolée. Alors que là, ça rend Titeuf encore plus vivant. On a l'impression qu'il existe réellement.»
Titeuf statufié: une première?
Sous cette forme, oui. Le Musée Grévin possède bien une statue de Titeuf, mais en cire. C'est assez rare qu'un héros de bande dessinée soit représenté en bronze. Je sais qu'il existe un Corto Maltese en Lavaux. Bruxelles a son Tintin. Aux États-Unis, il y a les Peanuts, plusieurs représentations de Popeye, un Little Nemo et il doit sûrement exister un Mickey en bronze.
Quelles sont les contraintes pour une telle statue?
On part d'un dessin. Titeuf a déjà été adapté en figurines, en statuettes ou pour des jeux en 3D. La question de la mise en volumes s'est donc posée à plusieurs reprises. Mais dans le cas de la statue installée à Carouge, il a fallu tenir compte d'autres paramètres. C'est du bronze, c'est lourd, ça doit être solide, ça doit résister au temps.
Titeuf se prête-t-il bien à la 3D?
Ça n'est jamais évident. En dessin, on s'arrange avec la réalité, afin que le personnage demeure intéressant sous n'importe quel angle. À partir du moment où on passe en 3D, on ne peut plus tricher. Pas question que la forme du nez change selon la position adoptée, de face ou de profil. Il faut trouver des compromis.
En avez-vous tenu compte dans le dessin qui a servi de modèle?
J'ai essayé de réfléchir au maximum de quelle manière on allait positionner les yeux. C'est souvent un problème de regard. Franquin disait: pour que le personnage soit un bon acteur, il faut qu'on voie ses deux yeux dans toutes les positions. Ce qui est impossible. Pour la première fois, on a pu travailler en réalisant un moule en 3D. Cela a permis de tourner le modèle dans tous les sens et de l'ajuster en permanence.
Titeuf a vu le jour à Carouge, dans votre atelier de la rue du Collège. Comment s'est passée cette naissance, au début des années 90?
Dans le préau de l'École Jacques-Dalphin, l'heure de la récré était tellement bruyante que cela n'était pas possible de se concentrer. Plutôt que de me mettre des boules Quiès, j'ouvrais la fenêtre et je regardais les écoliers dans la cour. Cela me faisait ma récréation personnelle. Mon enfance m'est revenue à ce moment de manière assez sensorielle, en voyant ces bandes de garçons ou de filles jouer, en les entendant s'engueuler. Je me suis souvenu du goût du pain au chocolat, de l'haleine du prof de gym. J'ai noté ces émotions et c'est devenu les premières pages de Titeuf.
Le décor des premiers albums montre un environnement très carougeois…
Les bâtiments ressemblent effectivement au Vieux-Carouge, avec des petites maisons de trois étages, des cours et des platanes un peu partout. Il y a même le tram. J'ai aussi dessiné certains commerces carougeois de l'époque. Petit à petit, j'ai agrandi la ville de Titeuf, rajouté des immeubles onésiens, puis parisiens. Je me suis découvert un vrai plaisir à dessiner la ville.
D'où vient le nom de Titeuf?
Il a été trouvé en quelques secondes, spontanément. Il avait une tête d'œuf, j'ai mis Titeuf. Il aurait pu s'appeler Philippe, comme moi. Dans la cour d'école, il aurait été plus logique qu'il réponde à un vrai prénom. Mais je trouvais sympa qu'il ait un nom de fiction. Je me suis aussi dit que j'aurais davantage de facilités à écrire en me glissant dans la peau d'un personnage fictif. Et j'ai bien fait, car autrement, je n'aurais jamais pu raconter autant d'histoires. Mon enfance n'a pas duré vingt-sept ans.
La série reste-t-elle vraiment un mélange entre observation et souvenirs?
Même s'il y a des éléments personnels, ce n'est pas de l'autobiographie. D'ailleurs, j'ai dessiné l'école Jacques Dalphin alors que j'ai suivi ma scolarité à Onex. Pour les personnages secondaires, je me suis inspiré de personnes réelles. Nadia était la fille dont tout le monde était amoureux, Hugo existait aussi. Manu, c'était mon meilleur copain, mais il n'avait pas cette tête-là.
À quelques encablures de son musée, Carouge consacre une exposition hors les murs à Titeuf aux Halles de la Fonderie. Qu'y voit-on?
C'est une sorte d'historique de Titeuf depuis sa création. L'expo a été montée au Festival d'Angoulême pour les 25 ans du personnage. Il s'agit d'extraits de planches, de dessins inédits et de dessins de Titeuf réalisés par d'autres artistes. Il y a aussi tout un travail muséal qui situe Titeuf dans l'histoire de la bande dessinée et dans la société.
«Le monde de Titeuf», du 7 juin au 25 août, Halles de la Fonderie, av. Cardinal-Mermillod, 17, Carouge. Ma au di 14 h-18 h. Entrée libre
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.