Star des réseaux sociauxBirdyy, l’influenceur genevois qui tutoie les étoiles
Grâce à sa chaîne YouTube aux 1,37 millions d’abonnés, Cédric Matjabo s’est imposé sur la scène internationale et travaille avec les grands noms de la mode. Adidas, Reebok et Zalando lui ont déjà confié leur image. Portrait.

C’est dans son local de la zone industrielle de Carouge que Birdyy, de son vrai nom Cédric Matjabo, construit son empire digital. «Je veux montrer que Genève est présente sur la scène internationale des réseaux sociaux.» Le ton est donné. Grand sourire, veste en fausse fourrure imprimé léopard, claquettes-chaussettes et smartphone en main, le Genevois de 26 ans a tout de l’autoentrepreneur des réseaux sociaux, dont il connaît parfaitement les codes et les subtilités. Encore étudiant en direction artistique à l’École CREA, il développe en parallèle une petite entreprise active dans l’événementiel et se forge une solide réputation sur Instagram, en prêtant son image à de grandes marques comme Adidas, Fila ou Paco Rabanne.
C’est après une rupture amoureuse et une blessure qui a mis fin à sa carrière de footballeur au Stade nyonnais qu’il débarque en 2015 sur YouTube, sous le pseudonyme de Birdyy. Pour se changer les idées, il se lance alors, «la tête dans le guidon», dans la création des clips de jeux vidéos, très consommés sur la plateforme. «J’ai commencé en jouant à FIFA. Ce n’était pas du tout professionnel, je me filmais dans ma chambre, ma mère rentrait parfois… un classique des vidéos amateur!» Malgré tout, la chaîne connaît un succès retentissant: 600’000 personnes s’abonnent. Un plafond de verre semble toutefois être atteint sur YouTube, touché par le succès de Twitch et du livestream.
Les «pranks» à l’assaut de la Suisse
Changement de cap. Il importe la même année dans les pays francophones l’art de pranker (ndlr: phénomène, né aux États-Unis en 2012 et apparu sur YouTube en 2016, qui a pour but de piéger des proches ou des inconnus grâce à des canulars). Sa première vidéo de prank, dans laquelle il modifie dans son téléphone le nom du contact de son meilleur ami et le remplace par un prénom féminin, cartonne. En vingt-quatre heures, elle cumule 1 million de vues. Galvanisé par ce succès, Birdyy se spécialise et devient une figure incontournable du genre. Le nombre d’abonnés à sa chaîne s’envole. Plus de 1 million et demi de personnes le suivent et attendent ses vidéos. La recette du succès? «J’aime ce qui est réel. Le canular doit être crédible, sinon le public s’en rend compte. À ce jeu, je suis très fort!»
Tellement fort que ses amis et sa famille, principales victimes de ses canulars, tombent bien souvent dans le panneau: dans l’une de ses dernières vidéos, sa petite amie, complice, tente de séduire par message le meilleur ami du youtubeur. Loyal, ce dernier rapporte fidèlement la discussion à Birdyy. Lorsqu’il découvre le pot aux roses, le meilleur ami est sidéré et les abonnés ravis: «Trop bien, continue comme ça.» «Tes vidéos font plaisir de ouf, t’as un vrai ami le laisse pas partir.»
Monétiser son image
Les challenges en featuring avec d’autres youtubeurs (ndlr: défis lancés par des abonnés ou des proches) font aussi partie des succès de la chaîne. Inzkitchen, autre star des réseaux connue pour ses pranks, s’est allié à Birdyy pour réussir à faire davantage de figures de football que Wass Freestyle, qui a été sacré à trois reprises vice-champion du monde de la discipline. Rien que ça. La vidéo de dix minutes a été visionnée plus de 1,5 millions de fois.
Alors, Birdyy se voit-il pranker toute sa vie? Pas question, le Genevois a d’autres cordes à son arc et un cerveau en ébullition. «À 26 ans, t’es vieux sur les réseaux sociaux. Il faut penser à l’avenir.» Pour lui, le futur se forge sur Instagram, où les influenceurs, businessmen d’un genre nouveau, règnent en maîtres. Fort de sa notoriété sur YouTube, il monétise son image et de prestigieuses marques demandent à établir des partenariats. Le Genevois est prudent: «Je suis très sélectif en termes de collaboration sur Instagram. Pour être crédible, les influenceurs doivent être sérieux. En cas de faux pas, une notoriété difficilement acquise peut s’effondrer en quelques jours.» C’est alors avec les plus grands qu’il s’associe. Avec Adidas, il développe en 2020 une ligne de basket proche de la célébrissime Stan Smith. En mai 2021, il est le visage de la campagne publicitaire de Reebok pour Zalando.
Penser à l’avenir
Vous pensiez que c’était terminé? Que nenni! En 2019, à l’occasion de la Saint-Valentin, le youtubeur publie sur la plateforme sa première chanson, «Valentin Trap», dans laquelle il – conformément aux canons du genre – ne parvient pas à oublier une femme. Début août 2021, il remet ça en partenariat avec ASed, rappeur suisse de 18 ans, et sort le titre «Motel». Si ces vidéos n’atteignent pas encore le succès de celles mettant en scène pranks, challenges et gaming, elles comptent beaucoup pour le Genevois. «Je suis un vrai touche-à-tout. J’aime la musique, c’est un moyen pour moi de faire rayonner Genève et de travailler avec des artistes locaux, qui sont nombreux et talentueux.»
Malgré tout, Cédric Matjabo n’est pas polyvalent. Pour se donner les moyens de ses ambitions, il a engagé un community manager et un agent par l’intermédiaire de l’agence genevoise Swiss Quality Business. «C’est tout un écosystème que j’ai voulu créer. Si je veux m’exporter, il faut savoir s’entourer.» La prochaine étape? Paris et ses agences d’influenceurs spécialisées. «Ici, rien n’existe pour le business sur les réseaux sociaux, déplore Cédric. C’est dommage, ces nouveaux métiers se démocratisent de plus en plus, et font rêver la jeune génération. Je veux montrer qu’il y a ici, à Genève, un savoir-faire et tout un domaine à défricher.»
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