Bienne va-t-elle devenir la capitale du Jura bernois?
Privée de Moutier, la minorité romande du canton regarde vers Bienne. La représentation des francophones doit-elle être revue?

Après s'être entre-déchirés sur des questions identitaires, les francophones du canton de Berne vont-ils se diviser sur leur représentation politique? Avec le départ de Moutier, le Jura bernois perd sa plus grande localité – 10% de sa population – et penche un peu plus encore vers l'agglomération biennoise. Reste à déterminer si ce nouvel équilibre aura des conséquences politiques.
«Bienne va gagner en importance, c'est indéniable», réagit Jean-Pierre Graber, ancien conseiller national du Jura bernois. La ville et son agglomération (100'000 habitants, dont un quart de francophones) fonctionnent déjà comme un pôle d'influence pour les habitants de la région. «C'est la capitale économique et culturelle du Jura bernois.» Une future capitale administrative? «Je ne crois pas. Il restera 45'000 habitants dans le Jura bernois. Ils sont fiers et se battront pour conserver les unités administratives décentralisées à Moutier.»
A Bienne, les craintes portent sur l'avenir du bilinguisme. Dans un canton où l'allemand est ultramajoritaire, le départ de 7000 francophones ne laisse personne indifférent. «Le bilinguisme est un défi régulièrement confronté à des obstacles qui justifient la législation sur le statut particulier du Jura bernois et sur la minorité francophone de Bienne, soulignait dimanche le maire Eric Fehr. Ce vivre ensemble est une question de volonté politique.»
Face à ces inquiétudes, le gouvernement s'est empressé de rassurer. «La Constitution est claire: le canton se considère comme un lien entre la Suisse romande et la Suisse alémanique, détaille le conseiller d'Etat Christophe Neuhaus dans un communiqué. Le dynamisme créé par les relations entre des régions francophone, germanophone et bilingue perdurera. Disposer de deux cultures est une source d'enrichissement.»
Gommer une injustice
Pour défendre sa minorité linguistique, le Canton de Berne a en effet mis en place différents instruments: un statut particulier pour le Jura bernois et un Conseil des affaires francophones pour Bienne. Mais surtout la Constitution garantit un fauteuil de conseiller d'Etat au Jura bernois. Un avantage dont les Romands de Bienne sont exclus. Ce dernier point suscite des crispations: on ne peut pas à la fois regarder vers Bienne culturellement et économiquement, et lui tourner le dos dès qu'il s'agit de partager le pouvoir politiquement.
«C'est une injustice qu'il faut gommer», réagit Mohamed Hamdaoui. Ce socialiste biennois vient de déposer une motion en ce sens au Grand Conseil bernois. «Cette garantie avait été adoptée pour veiller au maintien du Jura bernois dans le canton de Berne. Cet objectif est atteint, il est temps de l'élargir au reste des francophones.» Et d'ajouter que le système actuel laisse peu de chances aux Romands de Bienne d'être élus, alors qu'ils pourraient parfaitement défendre les intérêts des francophones. «La Question jurassienne ayant été réglée, ce serait un symbole fort du Canton envers sa minorité linguistique.»
Sa position reste toutefois très minoritaire à Berne. Le gouvernement l'a déjà balayée, et le parlement devrait en faire de même prochainement. «La grande difficulté d'un tel changement, c'est la définition qu'il engendrerait, commente Jean-Pierre Graber. Comment jugez-vous du caractère «romand» d'un élu? Que faites-vous des bilingues?». Et de rappeler l'épisode de la candidature du Fribourgeois Urs Schwaller au Conseil fédéral.
«C'est une garantie constitutionnelle liée à un territoire, pas à une langue», tranche Manfred Bühler (UDC/BE) unique représentant du Jura bernois sous la Coupole. «Il y a peut-être quelques voix exotiques qui sont prêtes à remettre cette garantie en question, mais aucune instance politique n'ira jusque-là.»
A ceux qui craignent un affaiblissement des francophones, Manfred Bühler voit aussi le départ de Moutier comme une opportunité unique. «Avec la fin des guerres entre autonomistes et loyalistes, les francophones de la région pourront enfin s'unir pour défendre leurs intérêts. Nous sommes peut-être affaiblis numériquement, mais nous avons gagné en cohérence.»
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