Prix d’architectureAux Genevois de choisir leur immeuble préféré
Si l’architecture contemporaine a parfois mauvaise presse, elle est souvent de qualité. La «Tribune de Genève» en présente une sélection. Nos lecteurs pourront désigner leur favori.

La rentrée de septembre, c’est l’occasion de prendre de bonnes résolutions, comme celle de voir le bon côté des choses. C’est le moment qu’a choisi la «Tribune de Genève» pour parler d’architecture. Durant ces prochaines semaines, nous allons présenter, à chaque fois sur une page, une dizaine d’immeubles construits après 2000 dans le canton. À la fin de ce tour de piste, nos lecteurs pourront désigner celui qu’ils préfèrent lors d’un sondage en ligne. Le lauréat se verra ainsi attribuer un prix d’architecture.
Cette opération se veut… constructive. Plutôt que de céder à l’esprit grognon qui menace tout bon Genevois, il s’agit ici de mettre l’accent sur ce qui se fait de bien et, surtout, de donner à voir et d’aller au-delà du simple jugement à l’emporte-pièce. Ce qui nous intéresse, c’est de comprendre autant les choix esthétiques que les contraintes multiples qui les ont dictés. C’est pourquoi nous visiterons ces immeubles avec les architectes qui les ont conçus et aussi, parfois, avec les maîtres d’ouvrage qui ont passé commande. Cette approche n’interdit pas la critique, mais elle la fonde.
Les dix objets ont été sélectionnés par nos soins, pour leur qualité et aussi, pour certains d’entre eux, car ils sont des marqueurs dans la ville. Parfois, leur principale valeur réside dans des dispositifs intérieurs plutôt que dans le traitement de la façade, d’où l’intérêt d’aller y voir de plus près. Tous sont des immeubles de logements et huit d’entre eux ont été construits dans la zone de développement, celle où l’État fixe toute une série de règles pour assurer la production de logements abordables.
Le logement pris en otage
Ce choix n’est pas innocent. À Genève, on s’oppose rarement à la construction d’une école, d’un centre commercial, d’une villa ou d’un immeuble de bureaux. La majorité des résistances et des critiques ont pour cible le logement. C’est lui qui fait débat.
Cette focalisation, qui nourrit le mécontentement de bien des Genevois, démontre que l’architecture n’est pas seule en cause. Derrière les programmes de nouveaux quartiers, une autre critique surgit. Celle de la croissance, du développement urbain et, avec elle, de la perte d’un patrimoine ou d’un environnement connu. Ainsi, le débat sur la production architecturale est parfois pris en otage par ceux qui ne veulent tout simplement plus construire.
Il faut donc faire la part des choses. Mais dire cela ne revient pas à absoudre les architectes et, plus généralement, les bâtisseurs. Les «non» qui, à plusieurs reprises, sont sortis des urnes sont aussi des marques d’agacement et de lassitude vis-à-vis d’une production urbaine standardisée, peu apte à produire des quartiers vivants. Les principaux intéressés en sont conscients et s’en préoccupent. La Fédération des architectes vient de publier «douze essais pour mieux construire Genève».
«Genève Envie»
Ce diagnostic sur la qualité architecturale, l’État l’a fait lui-même, en 2013 déjà, en des termes d’ailleurs assez tranchés. Pour faire passer la pilule de son plan directeur cantonal, il rédige alors «Genève Envie», une sorte de manifeste pour une ville certes dense, mais capable de créer l’adhésion, en libérant «l’imagination des architectes brimée par les règlements et une certaine culture urbanistique». Du changement intervient. À l’immeuble en barre s’ajoutent de nouvelles formes, comme le plot ou l’îlot. Les concours d’architecture se généralisent. Pour donner plus de liberté aux architectes, on assouplit les plans localisés de quartier et on valorise la qualité typologique des appartements.
Le temps de la construction est lent. Ces mesures n’ont pas encore déployé tous leurs effets. Les immeubles que nous avons sélectionnés illustrent, chacun à leur manière, ces recherches de qualité tout en étant parfois confrontés, à peine sortis de terre, aux nouvelles exigences environnementales.
Finalement, il faut se rappeler que la question centrale est l’habitant et son bien-être. Dans «Genève Envie», l’État écrivait à l’époque: «Penser la qualité de la vie, cela signifie qu’on ne veut plus subir la ville, mais la construire comme un lieu de vie, de partage et de civilisation pour cultiver le plaisir de vivre ensemble.» À sa modeste échelle, cette opération devrait jouer ce rôle: comprendre, c’est déjà s’approprier les choses pour ne pas les subir.

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