Lettre du jourAux côtés de ma grand-mère

Genève, 18 mai
Ce mercredi 18 mai, je suis aux côtés de ma grand-mère de 86 ans, souffrant du cœur, aux urgences des HUG. Elle attend toujours qu’un médecin daigne lui jeter un regard, six heures après son arrivée.
J’attends péniblement dans ces locaux qui symbolisent davantage la mort que les soins médicaux, dans cet espace réduit où une vingtaine de patients attendent désespérément et où certains s’entassent même dans les couloirs tels des bêtes se dirigeant à l’abattoir.
Mes plaintes sont insignifiantes aux yeux des infirmiers condescendants et sous l’eau, qui m’indiquent qu’il n’y a qu’un médecin pour une trentaine de patients ce soir. Je regarde à ma gauche et vois une vieille dame avec une luxation de la jambe, elle attend aussi depuis environ six heures qu’un médecin vienne l’ausculter, elle pleure de douleur; à ma droite deux hommes menottés en sang; en face une jeune femme vomit sans arrêt et sa mère a finalement été contrainte de l’emmener ailleurs faute de prise en charge.
Finalement, les médecins auront ausculté ma grand-mère seize heures plus tard. Lorsque j’assiste à la déroute de ce monde hospitalier je suis profondément révulsée de voir qu’en Suisse, en 2022, les HUG soient dans un état aussi chaotique alors que nous payons des sommes astronomiques en assurance maladie et en soins.
Je suis choquée de constater qu’après une période de crise sanitaire les médecins et infirmiers ne parviennent toujours pas à traiter les patients comme s’ils étaient des êtres humains méritant leur respect. Je m’endormirai ce soir en me posant une seule question: le manque de moyens peut-il tout justifier?
Hanine Al Madhoun
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