Nouvelle production lyriqueAu Grand Théâtre, une guerre sans paix
Servi par la mise en scène tendue et tellurique de Calixto Bieito, mais aussi par une fosse et une distribution de toute beauté, l’ouvrage imposant de Prokofiev éblouit à Genève.

On pourrait se demander quel autre ouvrage littéraire par-delà «Guerre et paix» croise avec autant de naturel les menus destins de personnages fictionnels avec les vagues dévastatrices de l’histoire. Sur ce socle puissant qui touche à la fois petits cercles de la société et devenir des nations, Léon Tolstoï a bâti le monument que l’on sait. Genève en retrouve ces jours-ci les traits et les intrigues, du moins en partie, par l’entremise de Sergueï Prokofiev, dont l’adaptation lyrique du roman s’avère aussi imposante que la matrice originale. De sorte qu’il est aujourd’hui rare de croiser son ouvrage dans les salles tant les contraintes qu’il impose rebutent directeurs de maisons et mélomanes. C’est donc avec une bonne dose de témérité que le Grand Théâtre s’est tourné vers l’objet encombrant – plus de 70 personnages, quatre heures de musique… – pour inaugurer sa saison.