Sexisme et inégalitéAdèle Haenel se révolte contre le cinéma, ce n’est pas nouveau
Le départ de l’actrice française fait écho au coup de gueule de Delphine Seyrig en 1972. Mais qu’est-ce qui a changé entre-temps?

Nouveau coup de théâtre dans le monde du cinéma. Après avoir quitté la cérémonie des César en 2020, au moment où un prix était décerné à Roman Polanski, malgré les multiples accusations de violences et de viols, Adèle Haenel annonce cette fois-ci une grève qui sonne comme un départ plus ou moins définitif du cinéma. En cause, la complaisance envers les prédateurs sexuels dans le milieu.
L’actrice n’est pas la première à s’indigner dans l’univers du grand écran. Sa posture fait notamment écho au coup de gueule de Delphine Seyrig en 1972. L’actrice et réalisatrice française, qui s’est fait connaître pour ses films comme «Sois belle et tais-toi» ou encore «India Song», avait dénoncé le sexisme et les inégalités de genre au grand écran et dans la société de manière générale.
La star pointe les nombreuses inégalités entre hommes et femmes lors d’une interview sur le thème du bonheur. «Je crois que les actrices sont dépendantes, comme toutes les autres femmes, du règne des hommes», dit-elle notamment. Même si de plus en plus de femmes réalisatrices connaissent le succès, encore aujourd’hui les hommes représentent une écrasante majorité aux manettes du cinéma.
C’est ce que confirme le rapport de l’Observatoire européen de l’audiovisuel qui se concentre sur la période entre 2016 et 2020: ne sont des femmes que 21% des réalisateurs, 10% des directeurs de la photographie, 25% des scénaristes, 7% des compositeurs, 30% des producteurs et 38% des premiers rôles.
Beauté essentielle et à jeter
«La beauté est une chose sur laquelle on nous apprend à beaucoup compter dessus. On nous apprend aussi qu’on la jette à un moment donné», poursuit Delphine Seyrig en interview. Aujourd’hui encore, on constate que les actrices sont particulièrement jeunes et partagent l’affiche avec des hommes beaucoup plus âgés qu’elles. Comme dans le film «Eiffel in love», sorti en 2021.
Par ailleurs, rares sont les actrices qui franchissent le cap des 50 ans à l’écran, contrairement aux acteurs, «qui vieillissent comme du bon vin.» On constate toutefois que des «efforts» sont fournis pour représenter davantage les réalités des femmes plus âgées, comme avec la série «Grace and Frankie».
«Un trop-plein»
«J’ai les mains qui tremblent, je ne suis pas à l’aise car il y a trop à dire. Beaucoup de femmes ont ce trop-plein en elles, ça prouve que leur vie n’est pas ce qu’elle devrait être», poursuit-elle.
En guise de réponse, la journaliste lui demande si cela «vient peut-être de l’agressivité du Mouvement de libération des femmes». Ce constat paraît surréaliste actuellement. Mais encore aujourd’hui, «l’extrémisme» de certaines est mobilisé comme argument pour délégitimer la cause féministe dans son ensemble. «Je ne sais pas si le calme des hommes est tellement sympathique», conclut Delphine Seyrig. À méditer.
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